Liberman : la démilitarisation de Gaza est irréaliste
Le ministre des Affaires étrangères estime qu’Israël doit malgré tout continuer à exiger celle-ci pour que le monde l’entende
Raphael Ahren est le correspondant diplomatique du Times of Israël
L’insistance israélienne sur le lien entre la réhabilitation de Gaza et la démilitarisation du Hamas n’est pas réaliste à ce stade, a déclaré dimanche le ministre des Affaires étrangères Avigdor Lieberman, ajoutant que Jérusalem devrait continuer à l’exiger afin d’ancrer cette demande dans la conscience internationale.
« Je me réjouis de l’idée de la démilitarisation, en échange de la réhabilitation, même si tout le monde n’est pas d’accord avec cela, même en Occident » a-t-il fait savoir lors d’une rencontre avec des correspondants diplomatiques d’Israël.
Interrogé pour savoir si cette formule, proposée par Israël et approuvée par certains dans la communauté internationale, était réaliste, le ministre des Affaires étrangères a répondu que si Israël ne le faisait pas, personne n’irait débarrasser le Hamas de ses armes.
« Ce n’est pas réaliste, mais c’est toujours important d’en parler et de l’ancrer dans la conscience des gens ».
Aucune idée politique nouvelle n’est mise en oeuvre tout de suite, a affirmé Liberman, mais si on le répète, le monde va commencer à l’intérioriser. Tout comme les Palestiniens ont réussi à convaincre le monde qu’ils méritent un Etat fondé sur les lignes de 1967, en répétant cette demande, Israël devrait également réaffirmer l’idée d’un Gaza démilitarisé, dans l’espoir qu’un jour, cette exigence soit acceptée par tous. « Nous ne devons pas abandonner le narratif d’une bande de Gaza démilitarisée ».
Liberman a déclaré qu’il allait discuter des efforts de la communauté internationale pour aider à la reconstruction de Gaza avec le ministre norvégien des Affaires étrangères Borge Brende, qui est actuellement à Jérusalem.
Cependant, il a précisé qu’il ne considérait pas comme réaliste une conférence internationale pour discuter de la « réhabilitation en échange de la démilitarisation » [proposée par Yair Lapid] qui pourrait réunir Israël, l’Autorité palestinienne et les Etats arabes modérés, y compris l’Arabie saoudite.
« Au cours des dernières années, j’ai rencontré de nombreux responsables arabes », a déclaré Liberman, notant qu’ils n’étaient pas « psychologiquement prêts » à reconnaître publiquement leurs liens avec Israël.
Lors du briefing, Liberman a déclaré que le Hamas n’est « pas moins dangereux que l’EI » le groupe terroriste sunnite radical connu sous le nom d’Etat islamique. Il a également suggéré que le commandant militaire du Hamas Mohammed Deif était mort : « Si jusqu’à aujourd’hui, nous n’avons pas entendu sa voix sur une cassette ni vu le moindre signe de vie, il y a lieu d’être optimiste ».
Le ministre des Affaires étrangères a ajouté qu’il s’opposait à de
nouvelles élections en dépit d’être insatisfait de la coalition actuelle.
« De nouvelles élections seraient superflues. L’ensemble du Moyen-Orient traverse une période de turbulences sans précédent, et personne ne sait comment cela va finir. La dernière chose dont on a besoin est d’ajouter à l’agitation politique en Israël, à la fois au sein de la coalition ou en allant à des élections ».
Liberman s’est abstenu de commenter ses divergences d’opinion avec le Premier ministre Benjamin Netanyahu et d’autres ministres du gouvernement, mais il a déclaré que si le gouvernement actuel tombait, cela ne serait pas sur les questions de guerre et de paix ou de la question palestinienne, mais plutôt sur des questions sur la religion et l’État.
Samedi, le ministre de la Sécurité intérieure Itzhak Aharonovitch, un membre du parti Israël Beitenu de Liberman, a prédit que le ministre des Affaires étrangères deviendrait le prochain Premier ministre d’Israël.
Liberman a à nouveau rejeté l’espoir de parvenir à un accord de paix permanent avec le président de l’AP Mahmoud Abbas, affirmant que le dirigeant palestinien n’avait pas la légitimité pour signer des traités au nom de son peuple.
« Sans nouvelles élections [de l’Autorité palestinienne] il ne faut pas s’engager dans des processus majeurs à long terme » avec les Palestiniens, a-t-il confié, parce que celui qui succède à Abbas pourrait facilement dire que tout accord qu’il a signé avec Israël était nul parce qu’il n’avait pas de légitimité démocratique, a fait savoir Liberman.
Le conflit d’Israël avec les Palestiniens ne doit pas être considéré comme une affaire bilatérale, mais plutôt comme un problème régional qui ne peut seulement être résolu de manière globale comme un « deal » avec l’Autorité palestinienne, le monde arabe en général et les Arabes israéliens.
Le ministre des Affaires étrangères a également déclaré qu’Abbas a menacé dimanche de dissoudre le gouvernement d’union nationale avec le Hamas en raison de la tentative du groupe terroriste visant à renverser son gouvernement en Cisjordanie.
« Cette situation découle de faits que le Shin Bet a indiqué à Abbas selon lesquels le Hamas voulait prendre le pouvoir en Judée et Samarie » a-t-il assuré, en utilisant les noms bibliques de la Cisjordanie. « Ce n’étaient pas des rumeurs : le Shin Bet lui a présenté de dures réalités qui ne laissent aucune place au doute ».
Le mois dernier, le service de sécurité du Shin Bet a déclaré avoir arrêté plus de 90 militants armés du Hamas en mai et juin, confisqué des dizaines d’armes qui avaient été introduites clandestinement en Cisjordanie, et saisi plus de 170 000 dollars visant à financer des attaques. Il a produit des photos des armes saisies et de l’argent ainsi qu’un organigramme des personnes interrogées, et dit prévoir une série d’attaques massives sur des cibles israéliennes, y compris le Mont du Temple, afin de déclencher une conflagration généralisée.
À l’époque, Abbas avait déclaré que la révélation était « une grave menace pour l’unité du peuple palestinien et pour son avenir ».