« Vous n’êtes qu’un lâche ! » : la prison à vie requise contre Nemmouche
L'e jihadiste a été reconnu coupable d'avoir abattu de sang-froid Emmanuel et Miriam Riva, ainsi qu'Alexandre Stens et Dominique Sabrier, à Bruxelles en 2014
« Sans la moindre hésitation », l’accusation a requis lundi une peine de prison à perpétuité contre le jihadiste français Mehdi Nemmouche, reconnu coupable aux assises de Bruxelles des quatre « assassinats terroristes » commis en 2014 au musée juif de la capitale belge.
Une peine de « 30 ans minimum » a par ailleurs été demandée à l’encontre de son co-accusé, Nacer Bendrer, désigné jeudi par le jury « co-auteur » de la tuerie, pour lui avoir fourni les armes.
« Ce qu’on vous demande, sans la moindre hésitation, c’est de condamner Mehdi Nemmouche à la réclusion à perpétuité », a déclaré l’avocat général, Yves Moreau, à l’issue de son réquisitoire, ne trouvant « aucune circonstance atténuante » en faveur du jihadiste, qualifié de « psychopathe ».
« M. Nemmouche, vous n’êtes qu’un lâche, vous tuez des gens en leur tirant dessus par derrière, vous tuez des dames âgées en leur tirant dessus à l’arme de guerre, vous tuez car cela vous fait plaisir de tuer et parce que vous savez que vous ne prenez aucun risque », a-t-il lancé au Français, rasé de près, qui l’a écouté, le regard parfois dans le vide.
« Si vous nous dites aujourd’hui qu’en Belgique, on peut être un terroriste sans être condamné très sévèrement, alors il ne faudra pas s’étonner de voir des gens débarquer chez nous avec des bombes ou des armes de guerre dans leurs valises », a aussi insisté M. Moreau à l’adresse du jury populaire, à qui il a réclamé de la « fermeté ».
Après un dernier mot des avocats de la défense, la cour partira délibérer sur la peine, pour un verdict qui ne sera pas susceptible d’appel.
« Sang sur les mains »
Jeudi dernier, après deux jours et demi de délibérations, les 12 jurés avaient estimé que Mehdi Nemmouche, 33 ans, et Nacer Bendrer, 30 ans, étaient tous deux auteurs de la tuerie.
Le premier, un délinquant multirécidiviste radicalisé en prison et passé par la Syrie, a été reconnu coupable d’avoir abattu de sang-froid, le 24 mai 2014 au Musée juif, les Israéliens Miriam et Emmanuel Riva, 53 et 54 ans, ainsi qu’un employé belge de 26 ans et une bénévole française de 66 ans.
Il a « tué froidement, gratuitement, quatre êtres humains », a rappelé l’avocat général. « Je crois qu’on a touché l’extrême de l’extrême en terme de gravité. »
Concernant Bendrer, le jury a souligné l' »aide indispensable » concrétisée par la remise des armes et des munitions, sans laquelle Nemmouche n’aurait pu exécuter son quadruple assassinat. La cour est allée au-delà de ce que réclamait l’accusation, qui dépeignait le Marseillais en « complice ».
Au procès, ouvert le 10 janvier, Nacer Bendrer a reconnu que Mehdi Nemmouche lui avait demandé une Kalachnikov début avril 2014. Mais il a affirmé n’avoir pas donné suite. Sans convaincre les jurés.
Il « n’a pas le sang des victimes directement sur les mains, même s’il est éclaboussé de ce sang de la tête au pied », a estimé Yves Moreau.
Me Gilles Vanderbeck, avocat du Marseillais, a réclamé une peine ne dépassant pas 15 ans de réclusion, estimant que le « doux » Bendrer ne pouvait être assimilé au « monstre » Nemmouche, « froid, cynique, glacial ».
Nacer Bendrer purge déjà une peine de cinq ans de prison en France pour une tentative d’extorsion de fonds dans le milieu du narcobanditisme.
« Carabistouilles ! »
Jeudi, à l’issue de deux jours et demi de délibérations, la cour avait dit « écarter » la thèse des avocats de Nemmouche, qui l’avait décrit comme la victime d’un « piège » tendu par de supposés agents des services iraniens ou libanais pour lui faire porter la responsabilité de la tuerie.
« Des carabistouilles ! », a répondu lundi le parquet, demandant au jury de ne pas faire preuve de « naïveté ».
Le verdict de culpabilité retient les preuves de l’enquête accablant Nemmouche, comme son ADN ou ses empreintes sur les armes, ou encore les vidéos de revendication.
Me Michèle Hirsch, représentant une partie civile, a insisté sur l’importance du témoignage au procès des deux journalistes otages en Syrie ayant reconnu en Nemmouche un de leurs geôliers.
Le récit de cette séquestration (qui fait l’objet d’une procédure distincte en France) a permis de montrer, selon l’avocate, que Nemmouche « n’était pas un loup solitaire » mais appartenait à « la même meute » que les auteurs des attentats de 2015-2016 revendiqués par l’EI.
Un exemple de ces liens est cité dans l’arrêt: le Belge Najim Laachraoui, mort en kamikaze à l’aéroport de Bruxelles le 22 mars 2016, après avoir été un artificier du 13 novembre, présentait à cette époque le Français comme « un frère » de combat, est-il noté.