Netanyahu, soyez bien attentif aux grondements de l’histoire du peuple juif
Il n'est pas trop tard pour sauver et guérir notre miraculeux pays. Contraint de faire face à sa propre mortalité, le Premier ministre changera-t-il enfin de cap ?
David est le fondateur et le rédacteur en chef du Times of Israel. Il était auparavant rédacteur en chef du Jerusalem Post et du Jerusalem Report. Il est l’auteur de « Un peu trop près de Dieu : les frissons et la panique d’une vie en Israël » (2000) et « Nature morte avec les poseurs de bombes : Israël à l’ère du terrorisme » (2004).
- Des manifestants soutenant le gouvernement israélien et ses projets de refonte rassemblés à Tel Aviv, épicentre de 29 semaines consécutives de manifestations anti-gouvernement, le 23 juillet 2023. (Crédit : Jack Guez/AFP)
- Le Premier ministre Benjamin Netanyahu s'exprimant après s'être fait poser un pacemaker, dans une vidéo de l’hôpital Sheba, le 23 juillet 2023. (Crédit : Capture d'écran)
- Des manifestants devant la Cour suprême, au milieu d'une vague de protestations qui dure depuis des mois contre la refonte judiciaire prévue par le gouvernement, à Jérusalem, le 23 juillet 2023. (Crédit : Menahem Kahana/AFP)
- Des manifestants pro et anti-refonte priant au mur Occidental, à Jérusalem, le 23 juillet 2023. (Crédit : Charlie Summers/The Times of Israel)
Il est tout simplement impossible d’ignorer le coup de tonnerre de l’histoire juive ancienne.
À la veille de Tisha BeAv, lorsque le peuple juif a subi la perte de ses deux Temples bibliques, reconnus et pleurés à ce jour comme une punition pour les intolérances et les haines internes de nos ancêtres, le troisième exercice de souveraineté, largement glorieux, est aujourd’hui menacé – non par des ennemis extérieurs mais, une fois de plus, par une division interne croissante.
Dimanche soir, à Jérusalem et à Tel Aviv, deux groupes de militants ont défilé simultanément sous des mers différentes du même drapeau bleu et blanc, avec des objectifs contradictoires pour notre minuscule et précieuse nation – les deux côtés d’un fossé qui déchire le pays, dressant les Juifs les uns contre les autres, étranglant notre économie, aliénant nos amis et affaiblissant notre indispensable armée.
Et à ce moment précis de vérité existentielle, le dirigeant qui a propulsé Israël sur le chemin escarpé de l’oubli potentiel s’est retrouvé cloué sur un lit d’hôpital, rappelant la fragilité du pouvoir humain, les limites et le court laps de temps dont nous jouissons.
Pourtant, tout n’est pas perdu. La volonté de remplir la plus fondamentale des obligations éthiques juives – traiter les autres comme nous voudrions être traités – reste largement répandue.
Nous l’avons vu avec les femmes ultra-orthodoxes qui ont apporté de l’eau aux Juifs majoritairement laïcs qui marchaient vers Jérusalem ce week-end dans le cadre de leur pèlerinage moderne vers notre capitale historique, l’une d’entre elles ayant déclaré aux caméras de télévision qu’elle ne pensait pas être d’accord avec leur cause mais qu’elle pensait avoir beaucoup à apprendre d’eux. Nous l’avons vu dimanche soir, lorsqu’un grand nombre de manifestants rivaux en partance et à l’arrivée se sont croisés sur les escalators de la gare de Jérusalem, et se sont applaudis mutuellement, criant des professions d’amour et de fraternité alors qu’ils se dirigeaient dans des directions opposées. Nous l’avons vu lors de la prière et de la marche conjointe des pro et des anti-refonte, dimanche matin, qui a commencé devant le symbole même de notre perte ancienne et de notre révérence, le mur Occidental.
Tout n’est pas perdu, évidemment, en raison de la passion pour ce pays que ce moment désastreux de notre histoire moderne a déclenchée. Ce dont nous avons besoin, c’est d’un leadership qui recentre cette passion pour renforcer ce qui nous fédère plutôt que d’exacerber ce qui nous éloigne.
« Ce pays est un miracle », a rappelé dimanche soir l’ancienne ministre de la Justice Ayelet Shaked, une femme de droite mariée à un pilote. « Allons-nous tout gâcher pour une question de ‘raisonnabilité’ ? »
Seul Benjamin Netanyahu peut vraiment expliquer pourquoi il a agi comme il l’a fait ces derniers mois : en embrassant honteusement certains des dirigeants juifs les plus radicaux d’Israël dans sa quête désespérée de voix électorales l’année dernière, en plaçant des suprémacistes juifs au cœur de la coalition qu’il a ensuite formée, en donnant son accord de principe à une législation qui briserait l’État juif démocratique et tolérant inscrit dans la Déclaration d’Indépendance, et en travaillant de manière obsessionnelle à mettre sur la touche les juges qui se mettraient en travers de son chemin.
Mais non, il n’est pas trop tard – pas trop tard pour que Netanyahu sauve Israël d’une répétition de l’histoire. Pour arrêter le décret maléfique et rechercher un consensus. Pour affronter Yariv Levin, le ministre obsessionnel de la Justice qu’il a habilité, un homme capable de reconnaître que les dirigeants élus ne doivent pas contrôler toutes les branches de la gouvernance, tout en faisant adopter une législation qui va précisément dans ce sens. Défier les fanatiques qu’il a placés à la table de son cabinet. Tenir compte des préoccupations des guerriers sionistes modernes d’Israël, de ses propres camarades de Tsahal et de ceux des générations suivantes, qui lui disent qu’ils ont risqué et risqueront leur vie pour le royaume, mais pas pour un roi.
Il est impossible pour chacun d’entre nous en Israël aujourd’hui d’ignorer le grondement de l’histoire juive ancienne. Mais c’est pour Netanyahu qu’il gronde le plus fort, confronté à sa propre mortalité alors même qu’il est à l’affût d’un pouvoir excessif. Cela l’oblige à marginaliser les radicaux toxiques et à guérir notre inestimable pays.
Israël est effectivement un miracle. Et nous ne pouvons tout simplement pas, nous ne devons pas, le ruiner.
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