Nikki Haley, bonne présentation, sérieuse et star incontestée de la conférence de l’AIPAC
'C'est la prochaine présidente', s'est exclamé un homme assis à mes côtés, révélant son adulation alors que l'ambassadrice de Trump à l'ONU quittait la scène, acclamée comme nul autre lors de cet événement
David est le fondateur et le rédacteur en chef du Times of Israel. Il était auparavant rédacteur en chef du Jerusalem Post et du Jerusalem Report. Il est l’auteur de « Un peu trop près de Dieu : les frissons et la panique d’une vie en Israël » (2000) et « Nature morte avec les poseurs de bombes : Israël à l’ère du terrorisme » (2004).
WASHINGTON — Quatorze minutes. C’est le temps qu’a passé Nikki Haley, ambassadrice américaine aux Nations Unies, à converser avec l’intervieweur Dan Senor lors de la conférence politique annuelle de l’AIPAC dans l’après-midi de lundi. Et c’est le temps qu’il a fallu pour qu’elle s’affirme comme la star incontestée de cet événement… Et de Dieu sait quoi qui suivra.
« C’était la prochaine présidente des Etats Unis », s’est exclamé un homme placé à mes côtés alors que nous regardions Haley quitter la tribune sous les acclamations et les applaudissements. Ridicule, pourriez-vous penser – pour utiliser un mot que Haley a prononcé plusieurs fois en décrivant l’environnement de l’ONU dans lequel elle s’est plongée avec une si forte vigueur réformiste. Mais cela reflète certainement l’état d’esprit prêt à l’adulation des 18 000 personnes qui étaient présentes au Verizon Center.
Il est apparu clairement – bien avant l’apparition de Haley lors de cet événement annuel – que ses refus sans fioritures ces dernières semaines de l’obsession terrible de l’Israel Bashing aux Nations Unies lui ont acquis l’admiration intense des délégués de l’AIPAC. Depuis la seule mention de son nom lors du discours d’ouverture de l’ambassadeur Ron Dermer dimanche matin, chaque référence a Haley a été saluée par des applaudissements et des cris d’approbation.
Apparemment, la seule personne n’ayant pas conscience de son statut stellaire était l’ambassadrice elle-même, qui a été absolument charmée par l’accueil qu’elle a reçu. La standing ovation a continué pendant si longtemps que Haley, qui s’était enfin assise après avoir salué chaque section de la foule, a été dans l’obligation de se relever, et finalement de demander au public de s’asseoir de manière à ce que sa conversation avec Senor puisse commencer.
L’attrait pour Haley est facilement compréhensible. Elle présente bien, elle a l’air sérieuse. Elle s’exprime avec franchise. Ancien gouverneur de Caroline du Sud, elle a des antécédents qui comprennent le résultat hautement évocateur pour ce public d’avoir fait passer la toute première loi dans son état pour contrer le mouvement BDS (Boycott, Divestment and Sanctions) contre Israël. Et maintenant elle se mesure à une ONU honnie.
Sans sophistication apparente, elle a également offert, dès le début de son allocution, un parallèle très fort entre son éducation sikh indo-américaine et ce qu’elle a appelé la culture israélienne (je suppose qu’elle voulait évoquer la culture juive), achevant de conquérir dans le public tous ceux qui pouvaient encore nourrir des doutes à son égard : « Nous sommes très unis. Nous adorons nos familles. Nous avons une éthique de travail forte. Nous croyons dans le professionnalisme, la philanthropie et nous pensons qu’il faut rendre ce que nous avons reçu », a-t-elle continué.
Puis elle s’est tue.
« Ca, c’est les bonnes choses », a-t-elle ajouté, parmi les rires. Puis « nous sommes agressifs. Nous sommes obstinés. Et nous ne cédons pas dans un combat. Alors c’est un… » Elle n’a pu terminer cette phrase, interrompue par un tonnerre d’applaudissements.
Sa rhétorique fleure le bon sens. Elle est allée aux Nations Unies et elle a trouvé ce lieu absurde. Et elle a donc raconté cette expérience au public de l’AIPAC.
Elle s’est rappellée combien elle s’est sentie « bizarre » lorsqu’elle a pour la première fois mis le pied à l’ONU et écouté les délégués, les uns après les autres, se prêter à lIsrael Bashing – alors qu’il y a actuellement tant de crises et de menaces à gérer au Moyen Orient. « Je savais qu’ils disaient que ça n’allait pas, mais quand vous entendez, que vous voyez ce qu’il se passe, vous ne pouvez tout simplement pas comprendre et combien tout cela est ridicule », a-t-elle dit.
Elle a fustigé l’accord du nucléaire iranien, chéri par l’ancien président Barack Obama, et a indiqué que « ça m’a dépassé » et que « c’est terrible » que cette convention ait été adoptée.
Elle a déclaré que lorsque la résolution 2334 du Conseil de sécurité de l’ONU a été approuvée en décembre 2016, son passage ayant été facilité par l’administration Obama qui n’y avait pas opposé son veto, « le pays entier s’est pris un coup dans le ventre. Nous nous étions rendus coupable de quelque chose qui a montré que jamais les Etats Unis n’étaient arrivés à ce niveau de médiocrité », a-t-elle dit.
« Nous n’avons pas de plus grand ami qu’Israël. Et constater ce qu’il se passait n’était pas seulement embarrassant : c’était blessant ». De nos jours, au contraire, a-t-elle continué, « tout le monde à l’ONU redoute de me parler de la résolution 2334. Et j’ai voulu qu’ils sachent que, vous voyez, c’est arrivé une fois, mais que cela ne se répétera jamais ».
Tourtes ces déclarations sans détours ont été accueillies avec délice.
Ainsi que certains de ses bons mots, livrés avec retenue, mais avec une conviction sans failles.
Sur l’Iran : « Nous allons les observer comme des faucons ».
Sur son approche de ce qu’elle considère comme des injustices : « Tout ce que j’ai fait a été de dire la vérité ».
Sur les modifications techniques à l’ONU : « Je ne suis pas là pour m’amuser ».
Et : « l’époque de l’Israel-bashing est terminée ».
Et: « Je porte des talons hauts. Ce n’est pas une déclaration sur la mode. C’est parce que si je constate quelque chose d’injuste, on frappera à chaque fois ».
Et le mot le plus applaudi entre tous : »Ainsi pour tous ceux qui disent qu’on ne peut rien faire à l’ONU, il faut que vous sachiez qu’un nouveau shérif est arrivé ».
Mais Haley, indépendamment de ses talents de persuasion, ne serait pas arrivée à ce niveau de popularité s’il n’y avait eu les résultats initiaux tangibles de sa mission. C’est cette adéquation entre les paroles et les premières actions qui a cimenté son triomphe.
A l’ONU, les gens « ne savaient pas exactement » ce qu’elle avait en tête de prime abord. « Alors nous leur avons montré », a dit Haley. « Ainsi, quand ils ont décidé de tenter de placer un Palestinien (l’ancien Premier ministre de l’AP Salam Fayyad) à l’un des postes les plus prestigieux qui n’ait jamais été donné aux Nations Unies, nous avons dit non, et nous l’avons sorti ». S’en est suivie une réponse pleine d’enthousiasme mais Haley n’en avait pas terminé. « Cela ne veut pas dire que ce n’était pas un homme bien », a-t-elle concédé avec grâce. « Cela ne veut pas dire qu’il n’était pas bon pour l’Amérique », a-t-elle continué.
C’est alors qu’est survenu le mot de la fin : « Ce que ça veut dire, c’est que jusqu’à ce que l’Autorité palestinienne prenne place autour de la table des négociations, jusqu’à ce que l’ONU réponde de la manière dont elle est censée le faire, il n’y aura plus de cadeaux faits aux Palestiniens ». Le plafond en a tremblé.
Second exemple : « Et ils nous ont donc testés à nouveau. Et ce rapport ridicule, le rapport Falk, est sorti. Je ne sais pas qui est ce type, ou ce qu’il veut, mais il a un grave problème », a dit Haley, légèrement horrifiée. « Comparer Israël avec un état d’apartheid ? »
Alors qu’a-t-elle fait ? « La première chose que nous avons fait, c’est appeler le secrétaire général en lui disant : ‘Ce rapport est absolument ridicule. Il faut que vous l’évinciez’. Le secrétaire général l’a immédiatement fait et le directeur a maintenant démissionné ». Autres vrombissements dans la salle.
Et c’est là qu’elle a mentionné son bon mot du « nouveau shérif » : « Ainsi pour tous ceux qui disent qu’on ne peut rien faire à l’ONU, il faut que vous sachiez qu’un nouveau shérif est arrivé ». Oui, en effet.
La « prochaine présidente des Etats Unis » ? Ce n’est pas vraiment la question aujourd’hui.
Parlons plutôt d’un atout pour le président en place.