ONU: Israël s’abstient sur la résolution pro-Ukraine après un vote anti-Israël de Kiev
L'abstention sur les réparations russes pour l'Ukraine ne serait pas liée au vote soutenu par Kiev demandant un avis juridique de la CIJ sur l'"occupation" israélienne
L’Assemblée générale des Nations unies a adopté lundi une résolution, non contraignante, en faveur d’un mécanisme de réparations par la Russie des destructions humaines et matérielles causées par son invasion de l’Ukraine.
Contrairement au Conseil de sécurité, où la Russie a un droit de veto, Moscou ne pouvait pas bloquer cette résolution portée par l’Ukraine, le Canada, les Pays-Bas et le Guatemala, et adoptée avec 94 voix, moins que les 143 recueillies pour condamner les « annexions illégales » de la Russie le 12 octobre.
Quatorze pays ont voté contre cette résolution, dont la Russie, la Chine, Cuba, le Mali ou l’Ethiopie, tandis que soixante-treize pays se sont abstenus, principalement du continent africain, mais aussi le Brésil, Israël ou l’Inde.
L’Etat hébreu a été le seul pays occidental à s’abstenir après que Kiev a voté en faveur d’une résolution anti-israélienne au sein du même organe.
La mission israélienne auprès des Nations unies n’a pas publié de déclaration expliquant cette décision, mais le site d’information Ynet a cité un responsable israélien qui a déclaré que cette décision n’était pas une expression de la frustration israélienne à l’égard de l’Ukraine, qui a voté en faveur d’une résolution vendredi dernier demandant à la Cour internationale de justice de se prononcer sur « l’occupation, la colonisation et l’annexion prolongées du territoire palestinien » par Israël.
Le fonctionnaire a expliqué qu’Israël craint plutôt que le vote de lundi en faveur des réparations pour l’Ukraine ne crée un précédent qui sera appliqué aux réfugiés palestiniens. Toutefois, le site d’information a également cité un autre diplomate israélien qui a qualifié le vote de lundi par Israël d' »enfantin ».
Quoi qu’il en soit, la décision de s’abstenir lors du dernier vote a été prise avant que l’Ukraine ne vote en faveur de la résolution anti-israélienne vendredi, selon Ynet, qui n’a pas cité de source.
Le vote d’Israël lundi marque un changement de tendance pour Jérusalem aux Nations unies, où le pays a soutenu les mesures pro-ukrainiennes après avoir hésité à le faire dans les premiers jours de l’invasion russe par crainte de nuire aux liens avec la Russie.
resolution on russia being held accountable for war in ukraine (including paying reparations) passed by unga
results of the (symbolic) vote below
in favor: 94
against: 13
abstained: 74 pic.twitter.com/idvhsnUsDW— ian bremmer (@ianbremmer) November 14, 2022
Intitulée « Agression contre l’Ukraine : recours et réparation », la résolution « considère que la Fédération de Russie doit répondre de toute violation du droit international en Ukraine ou contre l’Ukraine (…) et qu’elle doit (en) assumer les conséquences juridiques (…) y compris (en réparant) le préjudice » matériel et humain.
Selon cette résolution, « il faut établir, en coopération avec l’Ukraine, un mécanisme international aux fins de réparation des dommages » et « un registre international des dommages qui servira à recenser, documents à l’appui, les preuves pour les demandes d’indemnisation émanant de personnes physiques, morales ou de l’Etat ukrainien.
« Reconstruire »
« L’Ukraine aura la lourde tâche de reconstruire le pays et de se rétablir après la guerre. Mais ce redressement ne sera jamais complet sans un sentiment de justice pour les victimes de la guerre russe », a lancé à la tribune de l’Assemblée générale, l’ambassadeur ukrainien à l’ONU Sergiy Kyslytsya.
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a salué la décision prise à l’ONU.
« De la libération de Kherson à la victoire diplomatique à New York – l’Assemblée générale des Nations unies vient de donner son feu vert à la création d’un mécanisme de réparations par la Russie des crimes commis en Ukraine », a-t-il déclaré, sur Twitter. « L’agresseur va payer pour ce qu’il a fait ! », a-t-il ajouté.
Au siège des Nations unies, à New York, le représentant russe a au contraire dénoncé une volonté des pays occidentaux de légitimer par avance l’utilisation « de milliards de dollars » d’actifs russes gelés pour sanctionner Moscou, y compris selon lui pour l’achat d’armes à l’Ukraine.
Interrogé avant le vote, Richard Gowan, analyste au sein de l’organisation International Crisis Group, avait expliqué à l’AFP que « la résolution ne serait pas contraignante, mais qu’elle offrirait une base politique à l’Ukraine afin de préparer le terrain pour obtenir des réparations de la part de la Russie ». Ainsi, a-t-il ajouté, « le registre des dommages proposés permettrait de quantifier ce qui est dû à l’Ukraine ».
Durant son intervention, l’ambassadeur ukrainien a pris exemple sur la Commission d’indemnisation mise en place par l’ONU entre 1991 et 2022 et qui a permis au Koweït de récupérer auprès de l’Irak 52,4 milliards de dollars de réparations pour les dommages causés par son invasion en août 1990. Une commission créée par le Conseil de sécurité.