La mère d’une ado de 13 ans qui aurait été violée s’indigne du verdict des juges
Yarin Sherf a été inculpé pour une série de délits sexuels perpétrés dans un hôtel de quatorzaine mais les charges de viol n'ont pas été retenues, entraînant l'indignation
Stuart Winer est journaliste au Times of Israël
La mère d’une adolescente de 13 ans qui avait expliqué avoir été agressée par un homme alors qu’elle se trouvait en quarantaine dans un hôtel prévu à cet effet et géré par les services sociaux de l’État a exprimé son indignation suite à une audience de la cour dans ce dossier. Les magistrats ont fait savoir que l’homme ne serait pas mis en examen pour viol.
« Je n’arrive pas à croire que je suis en train de dire ça – mais j’ai le sentiment que ma fille a été violée une seconde fois », a déclaré la mère de la jeune fille.
« Il s’est rendu coupable de viol, c’est le crime qu’il a commis et toute autre interprétation des faits est erronée », a-t-elle ajouté, affirmant que « cette décision donne le feu vert à un prochain viol et le facilite ».
Yarin Sherf, 21 ans, a été inculpé en première instance par le tribunal de Tel Aviv pour relations sexuelles interdites, harcèlement sexuel, menaces et enivrement d’une personne mineure – mais pas pour viol.
« Une situation dans laquelle, d’un côté, la mise en examen indique des violences contre une enfant de 13 ans et de l’autre, dans laquelle on évoque des relations consensuelles interdites, est à la fois illogique et impensable », a continué la mère.
« Nous ne nous tairons pas jusqu’à ce que le violeur soit pleinement puni pour l’acte grave qu’il a commis », a-t-elle continué.
La décision du tribunal a suscité un tollé chez nombre de militants.
La directrice de la plus grande organisation israélienne de défense des droits des femmes a qualifié l’acte d’accusation de « grave échec du système pour l’État ».
Lors du dépôt de l’acte d’accusation, une manifestation avait été organisée devant le palais de justice pour soutenir la jeune fille.
Selon la législation israélienne, toute relation sexuelle avec une mineure de moins de 14 ans est considérée comme un viol, même avec son consentement. La justice n’a pas poursuivi l’action judiciaire, car la victime présumée avait dit à Sherf qu’elle avait 14 ans.
Selon l’acte d’accusation, Sherf est arrivé à l’hôtel de quarantaine le 23 février, où il a rencontré la jeune fille pour la première fois.
Au cours des heures qui ont suivi son arrivée à l’hôtel, il a pris contact avec la jeune fille via Instagram. Après l’avoir dans un premier temps invité dans sa chambre, cette dernière lui aurait proposé qu’il vienne plutôt la rencontrer dans la sienne.
Avant qu’il n’arrive, la jeune fille avait découvert son âge réel via l’application TikTok, et lui aurait dit qu’il était « trop vieux ».
Selon les procureurs, elle lui aurait demandé s’il avait vraiment 21 ans. Sherf aurait répondu qu’il avait 20 ans, et elle aurait affirmé avoir 14 ans.
Sherf a continué à contacter la jeune fille, qui lui aurait demandé de « laisser tomber », et aurait refusé qu’il vienne dans sa chambre.
Dans un message, Sherf aurait écrit que, si elle n’était pas d’accord, il effectuerait un « Eilat 2.0 », faisant référence au viol collectif d’une jeune fille de 16 ans l’année dernière dans un hôtel de la ville balnéaire.
À la suite de quoi ils ont continué à communiquer. La jeune fille a finalement dit à Sherf de venir dans sa chambre, où ils ont eu des relations sexuelles. Lors de la rencontre, Sherf aurait giflé la fille après qu’elle ait refusé de pratiquer une fellation, puis il se serait excusé lorsqu’elle l’a mis en garde face à son comportement.
Quelques heures plus tard, après que la fille lui a envoyé une photo d’elle via Instagram, Sherf a de nouveau proposé de lui rendre visite. Bien qu’elle a d’abord refusé en lui disant vouloir « être seule », elle lui a ouvert la porte quand il est arrivé, et ils ont à nouveau eu des relations sexuelles.
Un employé a plus tard frappé à la porte de la chambre. Il a trouvé Sherf caché dans la salle de bain, puis a fait un signalement à la police.
Le procureur a demandé que Sherf soit maintenu en détention jusqu’à la fin de la procédure.
Ravit Shafir, la procureure qui a déposé l’acte d’accusation, a souligné que « l’homme avait profité de son pouvoir et de la différence d’âge entre lui et la mineure. Son jeune âge ne l’a pas empêché de persévérer jusqu’à ce qu’il obtienne ce qu’il voulait ».
Hagit Peer, présidente de NA’AMAT, organisation de défense des droits des femmes, a déclaré que l’acte d’inculpation était un « échec ». Elle a souligné que les relations sexuelles avec une mineure de moins de 14 ans étaient considérées comme un viol, même avec son consentement.
Peer a précisé dans un communiqué : « Cette jeune fille a été agressée sexuellement alors qu’elle se trouvait seule, sans ses parents, dans un hôtel pour malades du coronavirus censé être protégé par l’État. »
Sahar Shmueli, qui a rejoint la manifestation devant le palais de justice, a déclaré au site d’information Walla qu’elle connaissait Sherf.
« Une jeune fille de 13 ans a été violée et le juge s’en fiche », a déclaré Shmueli, rejetant l’idée que la relation ait pu être consentie. « Il est important que chaque victime sache qu’elle n’est pas seule, même si le système protège les violeurs. »
Sherf est actif sur les réseaux sociaux. Il a publié par le passé des remarques à la fois désobligeantes et révélatrices de son attitude violente envers les femmes.
Cette histoire fait suite à plusieurs cas récents de violence à l’égard des femmes en Israël qui ont déclenché une vague de protestation. Samedi, une manifestation à Tel Aviv a réclamé que le gouvernement prenne toutes les mesures nécessaires contre ce type de comportement.
En début de semaine, trois hommes ont été arrêtés après avoir violé en groupe une jeune fille de 16 ans dans le nord du pays.
En février, un policier a tué sa femme à bout portant dans l’implantation de Na’ale en Cisjordanie.
Quelques jours plus tôt, un homme avait été condamné à 15 ans de prison pour le viol et le meurtre avec préméditation de la fille de 12 ans de son ex-épouse.
En septembre de l’année dernière, 11 hommes avaient été inculpés pour viol collectif sur une jeune fille de 16 ans dans un hôtel d’Eilat. Cette affaire, qui a bouleversé tout le pays, avait suscité des appels en faveur de réformes.