Pour la première fois, un responsable brésilien critique la nomination de Dayan
Le conseiller en politique étrangère du président du Brésil nie l'existence d'un « bras de fer » avec Israël
Raphael Ahren est le correspondant diplomatique du Times of Israël
La nomination de l’ancien chef des résidents d’implantations, Danny Dayan, comme ambassadeur d’Israël au Brésil était une « erreur », a déclaré un haut responsable à Brasilia mardi. C’était le premier commentaire officiel du pays d’Amérique latine sur la nomination controversée de Jérusalem.
Pour expliquer l’opposition de son gouvernement envers Dayan, haut conseiller en politique étrangère de la présidente Dilma Rousseff, Marco Aurélio Garcia, s’est reféré au passé de Dayan comme haut dirigeant du mouvement d’implantations et son opposition à un Etat palestinien.
Aurélio Garcia a également accusé Jérusalem de violer le protocole diplomatique en annonçant la nomination de Dayan avant d’en informer Brasilia et il a soulevé le fait qu’il y a un an et demi, un responsable israélien avait appelé le Brésil un « nain diplomatique ».
« Je pense que c’était un faux pas du gouvernement israélien », a déclaré Aurélio Garcia sur une chaîne de télévision brésilienne au sujet de la nomination de Dayan.
« Premièrement, enfreindre une règle diplomatique n’est pas une frivolité ». En annonçant publiquement la nomination de Dayan avant d’en informer le Brésil, Israël a commis une infraction « grave » aux règles des relations internationales, a-t-il indiqué.
Dans le même temps, Aurélio Garcia – qui en 2014 a accusé Jérusalem d’avoir commis un « génocide » dans la bande de Gaza – a tenté de minimiser l’incident diplomatique.
« Il n’y a pas de bras de fer avec un pays ami comme Israël, avec qui la politique étrangère du Brésil avait de grands liens avant même l’émergence de l’Etat d’Israël », a-t-il ajouté.
Le Premier ministre Benjamin Netanyahu a annoncé la nomination de Dayan en tant que nouvel ambassadeur d’Israël au Brésil le 5 août. Le cabinet israélien a approuvé la nomination de Dayan, le 6 septembre, ouvrant la voie au ministère des Affaires étrangères pour demander ce qu’on appelle dans le jargon diplomatique un agrément – la confirmation du pays d’accueil de l’envoyé d’un autre Etat dans sa capitale.
Après que l’agrément n’a pas été accordé pendant plusieurs mois, il s’est avéré que Brasilia refusait d’accepter Dayan en raison de son passé en tant que président du Conseil de Yesha, un comité représentant les implantations israéliennes en Cisjordanie, et la manière peu orthodoxe dont sa nomination a été annoncée. Les autorités brésiliennes ont confirmé anonymement ces rapports, mais Jérusalem a refusé de revenir sur sa décision.
Le 5 janvier, The Times of Israël a signalé que le Brésil, espérant qu’Israël retire la nomination de Dayan et nomme un autre candidat, a promis de garder le silence à propos de Dayan tant que Jérusalem faisait la même chose.
Mais jeudi dernier, lors d’une conférence de presse pour les journalistes étrangers, Netanyahu a, pour la première fois depuis le mois d’août, commenté publiquement la question, en affirmant clairement qu’il n’a pas l’intention de remplacer Dayan. « Je crois que Danny Dayan est un candidat particulièrement qualifié », a-t-il déclaré. « Et il reste mon candidat ».
Dans son entrevue, mardi, Aurélio Garcia a indiqué que Dayan a été rejeté en raison de ses positions en faveur des implantations juives en Cisjordanie et contre un Etat palestinien, qui sont un anathème pour la communauté internationale, y compris le Brésil.
Dayan était le président du Conseil Yesha jusqu’en 2013. Il a ensuite servi comme l’émissaire en chef à l’étranger du groupe, une fonction qu’il a quittée il y a un an. Il a refusé d’être interviewé pour cet article.
Aurélio Garcia a déclaré que la nomination de Dayan est venue « dans la foulée » de la guerre d’Israël à Gaza en 2014 et l’incident diplomatique qui a suivi la dure critique brésilienne des actions d’Israël là-bas.
« A cette époque, il y a eu une réaction disproportionnée et un fonctionnaire de troisième ou de quatrième classe a déclaré que le Brésil était un pays sans importance, un nain diplomatique », a poursuivi Aurélio Garcia, se référant à Yigal Palmor, qui à l’époque était le porte-parole du ministère des Affaires étrangères.
« L’action a été si désastreuse que le président israélien [Reuven Rivlin] a dû appeler la présidente Dilma pour présenter ses excuses ».
Protestant contre le prétendu « usage disproportionné de la force » d’Israël dans la bande de Gaza, le Brésil en juillet 2014 a rappelé son ambassadeur à Tel-Aviv.
Palmor a réagi durement : « Ceci est une démonstration malheureuse [pour expliquer] pourquoi le Brésil, un géant économique et culturel, reste un nain diplomatique », a-t-il dit. « Le relativisme moral derrière ce geste fait du Brésil un partenaire diplomatique pertinent, celui qui crée des problèmes plutôt que de contribuer à [trouver] des solutions ».
Palmor s’est plus tard également moqué du Brésil pour sa défaite « disproportionnée » 7 à 1 contre l’Allemagne pendant la Coupe du Monde qui se déroulait à l’époque.
Rousseff a critiqué les remarques de Palmor à l’époque : « les paroles, y compris celles du porte-parole, créent parfois un très mauvais climat ».
Quelques semaines plus tard, Rivlin a appelé son homologue pour présenter des excuses, en lui disant que les commentaires du diplomate « ne reflétaieent pas les sentiments de la population » d’Israël.