Pourquoi, 59 ans après leur dernière utilisation, Tsahal a besoin de nouveaux parachutes ?
L'armée israélienne lance le Stork, un parachute de fabrication américaine plus sûr, capable de transporter plus de poids. Mais qui donc saute encore d’un avion dans les guerres modernes

Après plus de cinq décennies, l’armée israélienne a décidé, au beau milieu des contraintes budgétaires, de remplacer ses vieux parachutes par un nouveau modèle de fabrication américaine.
Le T-11, connu comme le Stork en Israël, est non-orientable, comme son prédécesseur, mais il est capable de supporter plus de poids tout en garantissant un atterrissage plus doux.
Une caractéristique qui faisait cruellement défaut dans le modèle précédent et dont plusieurs centaines de milliers parachutistes israéliens peuvent en témoigner. Il a été déjà été utilisé dans une formation au début du mois.
« Notre objectif est de parachuter une grande force rapidement, dans une certaine zone », a déclaré le commandant de l’école de saut de l’armée israélienne, maj. Elad Grossman, à l’hebdomadaire de Tsahal Bamahane la semaine dernière.
« Et le nouveau parachute Stork le permet dans le plus court délai et dans le plus grand secret. »
Le nouveau parachute présente de nombreux avantages par rapport au modèle précédent, le Tzabar.
Il peut être déployé à partir d’un avion volant à une vitesse supérieure, ce qui signifie que le cargo Hercules utilisé pour ces missions – une cible facile pour les missiles anti-aériens modernes – pourra survoler moins de temps le sol ennemi.
Il est également livré avec un parachute de secours qui peu s’ouvrir des deux mains – le Tzabar convenait aux droitistes uniquement, ce qui présentait un problème dans le cas de, disons, d’un bras cassé – et s’ouvre à bonne distance du corps, réduisant les chances d’étranglement pendant la chute.
Un système est intégré qui empêche les cordons de se tordre, un problème fréquent avec l’ancien modèle.
Et pourtant, quelques 59 années après le dernier déploiement de troupes en parachute, peu d’éléments prouvent que les parachutistes sont encore nécessaires sur le champ de bataille moderne.
Un peu d’histoire
Le premier à sonder les troupes aéroportées modernes, Benjamin Franklin, a été inspiré par l’ascension d’un ballon à air chaud en 1783.
Il a jugé l’invention comme un « nouveau tournant dans les affaires humaines, » qui pourrait « convaincre les souverains de la folie des guerres ».
Selon son raisonnement, rédigé dans une lettre de 1784, 5 000 ballons, portant deux hommes chacun, coûteraient moins cher que cinq navires et auraient des effets dévastateurs sur l’ennemi.
Quelque 156 années plus tard, en avril 1940, les troupes allemandes Fallschirmjäger ont testé sa théorie, se parachutant au Danemark et en Norvège, et, plus tard, en Hollande.
Les Alliés ont répliqué avec des assauts aéroportés. Les résultats étaient mitigés. La trouvaille était minée par l’élément de surprise ; le prix du sang était souvent élevé.
L’entreprise sioniste, pourtant, alors que le génocide en Europe connaissait sa phase finale, a envoyé 39 de ses meilleurs hommes et femmes pour être formés et transportés par avion par les Britanniques dans l’Europe occupée par les nazis.
26 d’entre eux ont été déployés, souvent dans leur pays d’origine ; sept ont été découverts et tués, soit par exécution soit dans les camps de la mort.
La plus célèbre d’entre eux était Hannah Senesh, qui a été torturée et tuée par la Gestapo en Hongrie, mais dont la légende a joué un rôle central dans la formation des combats et l’ethos littéraire sioniste.
En juin 1948, un mois tout juste après la déclaration d’Indépendance d’Israël et au milieu d’une guerre, l’armée israélienne récemment formée, impressionnée par l’héroïsme des parachutistes la Seconde Guerre mondiale et peut-être volontairement ignorante des conséquences néfastes, a envoyé un lot de 50 parachutistes en Tchécoslovaquie.
Ils y ont été formés, avec des pilotes israéliens, puis transportés vers une base aérienne israélienne, Tel Nof, où ils ont été lâchés du ciel.

Les jours de gloire, cependant, furent sous le commandement d’Ariel Sharon, avec le saut du 29 octobre 1956, dans la douce obscurité du soir, quand 395 parachutistes ont été abandonnés profondément dans le désert du Sinaï, près de 250 km à l’intérieur du territoire égyptien.
Depuis lors, les parachutistes ont réussi à libérer le mur Occidental et la Vieille Ville de Jérusalem (1967), à mener la contre-attaque à travers le canal de Suez (1973) et à pousser encore plus loin au nord, via la route montagneuse, pour atteindre Beyrouth pour la première fois lors de la guerre du Liban (1982).
Mais ni la brigade enrôlée, ni ses réserves n’ont jamais été rappelées pour se parachuter derrière les lignes ennemies, et beaucoup pensent qu’elles ne seront jamais plus sollicitées.
« D’un point de vue opérationnel, la manœuvre aérienne – sauter au-dessus de l’ennemi – s’effectue aujourd’hui par hélicoptère, qui est plus rapide et plus souple », déclare Brig. Gen. (Ret) Uzi Eilam, qui a rejoint le premier bataillon de parachutistes, 890, en 1954, a servi dans la guerre de Suez de 1956 dans le bataillon de Motta Gur, mais n’a pas sauté.
Il a dirigé la Commission israélienne de l’énergie atomique et le département R & D du ministère de la Défense.
« En termes de morale, le parachute reste important, » ajoute-t-il. « C’est l’un des moyens pour la brigade d’attirer des gens de qualité. »

Colonel (Ret) Gabi Siboni, ancien chef de l’unité de reconnaissance de la Brigade Golani et un ami proche du chef d’état-major Gadi Eisenkot, également de la brigade Golani, a refusé se prononcer sur l’investissement dans une unité de parachutistes aujourd’hui, mais aucun doute sur son opinion.
« En tant que Golanchik typique, vous pouvez imaginer ce que je pense de l’ensemble du parachutisme. »
La capacité militaire des parachutistes comme unité aéroportée a toujours été de fournir d’importantes forces, si nécessaire, loin derrière les lignes ennemies.
Pendant la guerre du Golfe de 1991, lorsque les troupes de Saddam Hussein tiraient des missiles sur Israël depuis l’ouest de l’Irak, Israël a envisagé de larguer des parachutistes dans la région, a révélé feu le Lt. Gen. Dan Shomron dans un article de l’aviation israélienne 1999.
Il n’a pas fourni plus de détails, affirmant que ces plans pourraient être de nouveau à l’ordre du jour.
Mais la principale raison pour laquelle cette option n’a pas été retenue était la même que toujours : les troupes sont facilement repérables à l’arrivée, les avions sont sensibles aux missiles sol-air, et les troupes ne peuvent sauter qu’avec des quantités limitées, nécessitant un ravitaillement, et ne sont pas protégées par une armure ou une artillerie.

Aujourd’hui, plus que jamais, il existe un avion capable de remplacer le parachutiste. Le V-22 Osprey décolle et atterrit comme un hélicoptère – verticalement – et peut voler, en inclinant ses rotors, aussi loin et aussi vite qu’un avion cargo, dont la portée dépasse de loin celle d’un hélicoptère traditionnel.
En 2013, les États-Unis ont vendu six Ospreys à Israël, une vente inédite à un pays étranger, pour environ 400 millions de dollars de fonds d’aide. En octobre 2014, le ministre de la Défense Moshe Yaalon aurait décidé d’annuler un accord non encore signé.
L’armée n’a pas donné d’estimation du coût annuel total de son cours de formation en parachute – les parachutes, les instructeurs, les emballeurs de parachute, la base et, en particulier, le temps investi.
« Sur le plan opérationnel, les chances d’utiliser des parachutistes s’amenuisent d’année en année, » confie Maj. Gen. (Ret) Yoram Yaïr à la publication de l’armée de l’air israélienne. Mais certaines choses, dit-il, ont de la « valeur ajoutée » de la tradition et portent la marque de l’excellence, ce qui aide l’unité à maintenir sa hiérarchie au sein de l’armée.
La raison centrale de la poursuite de la formation des parachutistes, cependant, ne peut concerner uniquement des préoccupations budgétaires, de tradition ou de prestige.
Un colonel de l’armée de l’air, anonyme dans l’article, évoque qu’un jeune soldat posté à la porte ouverte d’un avion et auquel on dit de sauter dans le vent froid en garde un souvenir durable.
« Je suis dans l’armée israélienne depuis près de 30 ans et j’ai combattu dans plusieurs guerres, » dit-il. « Et rien ne ressemble au moment où vous recevez l’ordre de vous lever pour attaquer l’ennemi, alors que vous vous trouvez à la porte d’un avion, qu’on vous dit ‘saute !’ et que vous sautez. »
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