Raphaël nous offrira « un accès direct à la joie » aux Francofolies d’Ashdod
Un an après la sortie de son album poétique Anticyclone, incluant un duo intime avec sa compagne, l’actrice Mélanie Thierry, Raphaël se produira en Israël le 25 septembre
Depuis son premier album, Hôtel de l’univers, en 2000, en passant par l’opus Caravane, qui lui a valu trois prix aux Victoires de la musique en 2006, le chanteur continue Sur la route du succès et s’est même essayé à l’écriture.
Signé de son nom complet Raphaël Haroche, son premier ouvrage Retourner à la mer a d’ailleurs remporté l’an dernier le prestigieux Prix Goncourt de la nouvelle.
À l’issue de sa tournée pour son dernier album, Anticyclone, Raphaël se produira à Ashdod, dans le cadre des Francofolies, qui s’organisent dans le cadre de la saison culturelle France-Israël et qui permettront aux Israéliens, friands de tout ce qui est français de (re)découvrir sa musique et celle, entre autres de Magic System, Amir et Jane Birkin.
Raphaël sera accompagné le 25 septembre du pianiste Steve Nieve, qui a collaboré près de vingt ans avec Elvis Costello (qui avait cédé aux pressions du BDS en 2010), mais aussi avec l’une des idoles du chanteur : David Bowie. Il retrouvera notamment sur scène la musicienne israélienne Riff Cohen pour un concert.
Chanteur, parolier, guitariste, pianiste, scénariste, écrivain ou encore réalisateur, Raphaël est un artiste doté de nombreux talents.
Raphaël Haroche est né le 7 novembre 1975 à Paris, dans une famille juive : son père, le romancier Joël Haroche, et son oncle, le prix Nobel de physique Serge Haroche, sont nés au Maroc, d’un père marocain et d’une mère russe ; quant à sa mère, elle est originaire d’Argentine.
Il étudie le saxophone, la guitare et le piano, et se passionne pour la musique dès son plus jeune âge. Après des études au fameux Lycée Henry-VI et à l’université Paris II, en droit, il abandonne la filière académique pour se consacrer à la chanson dès 2000, lorsqu’il signe son premier album à la maison de disques EMI.
Ses débuts sur scène ont lieu à l’occasion des premières parties des concerts de Frank Black et Vanessa Paradis en 2001.
Les titres qui le font véritablement percer sont son duo avec Jean-Louis Aubert, Sur la route (en 2003), et la chanson Caravane, intégrée à l’album éponyme, vendu à 1,8 million d’exemplaires et consacré par trois prix aux Victoires de la musique en 2006.
Sans être un « chanteur engagé », Raphaël écrit quelques textes à connotation politique, avec le titre Schengen (2005), évoquant le sort des sans-papiers dans une Europe qui leur ferme peu à peu ses portes, ou encore une chanson anticonformiste, Patriote (2010), plus ou moins bien accueillie par la critique.
En plus d’une douzaine d’albums, Raphaël a écrit des musiques de film, notamment pour Un Voyage et Asphalte de Samuel Benchétrit. Il a joué dans le film Ces amours-là de Claude Lelouche et a fait un peu de théâtre, en 2011 (Pour l’amour de Gérard Philippe, de Pierre Notte), avant de réaliser lui-même deux court-métrages.
Il est couple avec l’actrice française Mélanie Thierry (César du meilleur espoir féminin pour son interprétation de Magali dans Le Dernier pour la route, un excellent long-métrage sur les déboires de l’alcoolisme avec François Cluzet dans l’une de ses meilleures performances), dont il a deux enfants, Roman (10 ans) et Aliocha (5 ans).
À l’occasion de ce concert, Raphaël a accordé une interview au Times of Israël en français :
The Times of Israël : Ce concert en Israël n’est pas votre premier en Israël, n’est-ce pas ?
Raphaël : Effectivement, je suis venu jouer ici en 2007.
Cela fait longtemps, plus de 10 ans !
[Rire] Ça fait très longtemps, c’est vrai… Je n’ai pas souvent l’occasion d’aller à l’étranger, à vrai dire : c’est un peu difficile d’exporter la chanson française. Il faudrait venir plus souvent. Mais, je suis ravi de venir la semaine prochaine.
Que souhaitez-vous amener de France à ce festival ?
C’est une création, avec un pianiste qui s’appelle Steve Nieve, un très bon musicien. Cela va être un spectacle un peu particulier de chanson française. J’espère que les Israéliens y seront sensibles et que les Français, je ne sais pas s’il y en aura, y seront sensibles aussi.
Justement, votre concert aux Francofolies coïncide presque exactement avec le premier anniversaire de votre dernier album Anticyclone. Est-ce un hasard ?
Effectivement, c’est un petit peu un hasard. Lorsque j’étais à la réunion au mois de mars, les organisateurs des Francofolies m’ont dit qu’ils préparaient une édition en Israël — la première édition, je crois — je leur ai demandé d’en faire partie parce que c’était justement l’occasion de venir jouer à nouveau. Cela me faisait très plaisir.
Pour parler du premier anniversaire, j’ai fini ma tournée de l’album Anticyclone la semaine dernière. C’est donc une autre direction. Je prends cela comme une création : c’est un point de départ avec quelque chose de nouveau, une nouvelle aventure, en fait.
Je vais interpréter des chansons de cet album et des chansons plus connues que les gens aiment.
C’est aussi une aventure pour moi de jouer avec le musicien Steve Nieve que j’aime beaucoup. Cela m’intéresse beaucoup. Je vois cela comme une nouvelle création, plutôt qu’un premier anniversaire du précédent album.
Avez-vous choisi des chansons plus spécifiquement adaptées pour Israël ?
Non ! [Rire] Je pense que toutes mes chansons sont très adaptées pour Israël.
Des chansons qui évoqueraient un peu votre identité juive, si vous en avez introduit une touche dans vos chansons ?
Je pense qu’il y en a beaucoup, dans plein de mes chansons. Certainement, j’ai été formé en écoutant de la musique dans les synagogues, donc je pense que je dois avoir un système harmonique qui me vient de là. Mais après, il n’y a rien en particulier qui m’y fait penser.
Comment vous sentez-vous quand vous venez ici en Israël ? Éprouvez-vous quelque chose de particulier ?
Je pense que oui. Je suis venu il y a dix ans. J’étais très content et très ému. J’ai fait un très beau voyage. Je me suis baladé un peu partout et je suis ravi de pouvoir revenir la semaine prochaine.
En plus, je fais le voyage avec mon fils [Il a eu deux fils avec l’actrice française Mélanie Thierry]. Alors, cela me fait plaisir de redécouvrir avec lui. Oui, c’est important bien sûr.
Vous avez envie justement de faire connaître à vos enfants cette culture qui est celle de leurs aïeuls ?
Oui, bien sûr, bien sûr ! J’ai très envie, c’est pour cela que je l’emmène.
Pouvez-vous nous parler un peu de votre lien avec le judaïsme ? Dans la plupart de vos interviews, on en parle peu.
C’est parce qu’il est vrai que les choses de la foi sont souvent assez intimes. Je trouve que c’est bien que cela reste ainsi, j’aime cette intimité.
Je viens d’un milieu très libéral, d’un milieu plutôt d’origine de l’Europe de l’Est. Les trois quarts de ma famille viennent de l’Europe de l’Est, d’une famille qui ne parle ni l’hébreu ni le yiddish. Peut-être que mes grands-parents parlent le yiddish, mais ils sont venus à une époque où ils avaient très envie de s’assimiler, c’est tout.
Avez-vous fait l’objet de pressions de la part du BDS ?
Non, aucune. Mes musiciens non plus.
Quels sont vos projets d’avenir ? Pouvons-nous espérer vous entendre chanter dans un style un peu plus « méditerranéen » pour célébrer vos origines ?
Je ne sais pas. Sans doute pas. Je pense que mes racines musicales sont plutôt du côté du blues et de la musique américaine. Quelque chose comme cela, ce ne sont pas du tout des origines familiales. J’ai plutôt envie de me rapprocher de cela, en fait. Mais, il est vrai que ce qui fait un musicien ce sont des couches et des couches d’influences, et à un moment donné, les choses ressortent. Donc je ne pourrais pas dire…
J’écoute beaucoup de flamenco, par exemple, une musique qui peut, peut-être, se rapprocher du style méditerranéen, je ne sais pas exactement comment. Mais, je la trouve apparentée en tout cas.
Travaillez-vous déjà sur un prochain album ?
Pas vraiment. Je commence à faire des chansons. Je réfléchis. J’ai envie de faire des collaborations avec d’autres musiciens. C’est aussi pour cela que cela m’intéresse de venir jouer ici et, peut-être, de rencontrer des musiciens venus chanter aux Francofolies, notamment Riff Cohen.
Cela m’intéresse de partager de la musique avec d’autres artistes. Mais, je ne sais pas encore quelle forme cela prendra.
Y a-t-il des chanteurs israéliens particuliers qui vous plaisent ? J’ai vu que vous alliez chanter avec quelques-uns sur scène dans le cadre des Francofolies.
J’ai chanté déjà avec Riff Cohen une fois, c’est une chanteuse israélienne que j’aime beaucoup. J’aime bien ce côté un peu blues yéménite. Je trouve cela très beau, très puissant, et à la fois très simple. Elle a un peu cette chose-là dans sa musique qui m’attire.
C’est une musique qui me fait penser au désert, avec des tensions, qui est quand même assez rock, et pourtant très traditionnelle.
Cela fait quasiment vingt ans que vous chantez. Au moins dix-huit ans depuis votre premier album. Avec le recul, quelles sont vos impressions ?
[Rire] Dix-huit ans, déjà ?! C’est le plus beau métier du monde, c’est merveilleux de faire de la chanson, des concerts, de chanter pour les gens… C’est un accès direct à la joie, je dirais, et à la légèreté… Même s’il y a aussi des chansons graves.
Après… On vit dans une époque très particulière pour la musique, où tout a été chamboulé, le marketing est passé devant la musique, aujourd’hui, et c’est devenu un produit de consommation de masse. Il faut trouver sa place là-dedans pour continuer à faire quelque chose d’artistique et en même temps pouvoir toucher le cœur des gens. C’est difficile, mais c’est possible.
Vous trouvez encore le temps d’écrire ? Pouvons-nous espérer un nouveau roman ou des nouvelles de votre plume ?
Oui, oui, oui ! Je trouve le temps. Je suis en train de terminer un nouveau livre. Je pense que je l’aurai fini à la fin de l’année. J’espère que cela sortira en 2019, je pense. Je travaille dessus plus de dix heures par jour, depuis un an et demi. Je sais que je passe mon temps à trouver cela super, puis à jeter, puis à recommencer et à jeter. Cela me plaît énormément !
Ce sera un roman ou à nouveau des nouvelles ?
Je pense que ce sera un roman. J’ai écrit aussi des nouvelles. Mais, je ne sais pas encore ce que je sortirai en premier. Parce qu’actuellement, je travaille beaucoup sur un roman. Mais, en tout cas, je trouve cela passionnant, c’est quelque chose de très important pour moi.
Cela complète votre travail de chanteur ? Ce sont deux choses complètement différentes ?
Oui, je pense. Ce sont deux choses différentes, mais la discipline quotidienne que cela me demande et puis le plaisir, c’est le plus important. Parce que vraiment en littérature, c’est le plaisir qui est le plus important pour moi, encore plus que dans la musique.
Après, la musique c’est comme un moyen de se nettoyer, de se vider la tête, d’avoir un accès direct à la joie, par rapport à la littérature qui fait plutôt réfléchir.
Dans le cinéma, pensez-vous continuer après vos courts-métrages (Revox en 2013 et Florence Aubenas, en 2018) ou les musiques de film pour Samuel Ben Shitrit ?
Non, j’ai écrit des films, mais c’est très difficile. Je pense qu’encore une fois, on est confronté à quelque chose d’industriel. Faire un livre, ça ne coûte pas d’argent, un disque pas trop, mais faire un film ça coûte beaucoup d’argent, alors c’est dur de se confronter à cette logique économique.
Est-ce qu’on vous a proposé de jouer dans des films, après votre apparition dans Ces amours-là de Claude Lelouch ?
Ah, non ! Moi, j’écris des scénarios. Je ne me sens pas acteur. Je ne sais pas le faire, je n’ai pas de talent pour cela. Je ne suis pas acteur. Moi, ce que je voudrais c’est réaliser, mais c’est très difficile d’avoir un projet très original et d’arriver à le financer.
C’est un rêve d’avenir ?
Oui, il y a un projet imminent, mais on est encore en recherche de financement.
En attendant, rendez-vous avec Raphaël sur la scène des Francofolies à Ashdod, le 25 septembre à 20h30, à Yad LaBanim (99 shekels), dans le cadre de la Saison croisée France-Israël 2018.
... alors c’est le moment d'agir. Le Times of Israel est attaché à l’existence d’un Israël juif et démocratique, et le journalisme indépendant est l’une des meilleures garanties de ces valeurs démocratiques. Si, pour vous aussi, ces valeurs ont de l’importance, alors aidez-nous en rejoignant la communauté du Times of Israël.
Nous sommes ravis que vous ayez lu X articles du Times of Israël le mois dernier.
C'est pour cette raison que nous avons créé le Times of Israel, il y a de cela onze ans (neuf ans pour la version française) : offrir à des lecteurs avertis comme vous une information unique sur Israël et le monde juif.
Nous avons aujourd’hui une faveur à vous demander. Contrairement à d'autres organes de presse, notre site Internet est accessible à tous. Mais le travail de journalisme que nous faisons a un prix, aussi nous demandons aux lecteurs attachés à notre travail de nous soutenir en rejoignant la communauté du ToI.
Avec le montant de votre choix, vous pouvez nous aider à fournir un journalisme de qualité tout en bénéficiant d’une lecture du Times of Israël sans publicités.
Merci à vous,
David Horovitz, rédacteur en chef et fondateur du Times of Israel