Rivlin et Lapid soutiennent le renflouage de la Dixième chaîne
La seconde chaîne commerciale d’Israël est à court d’argent et demande à Netanyahu de trouver une solution
Lazar Berman est le correspondant diplomatique du Times of Israël
La classe politique israélienne a fait pression en faveur de la Dixième chaîne lundi, un jour après que la chaîne de télévision ait annoncé qu’elle allait fermer mercredi en raison de difficultés financières.
Le président Reuven Rivlin a déclaré que la fermeture de la chaîne compromettrait le caractère démocratique d’Israël, tandis que l’ancien ministre des Finances Yaïr Lapid a appelé à une solution financière pour sauver la chaîne de la faillite, solution qui doit être adoptée par le Premier ministre Benjamin Netanyahu.
À 22h30 dimanche, le canal a cessé ses émissions régulières pour la nuit et a affiché à la place une photo du Premier ministre Benjamin Netanyahu et un message annonçant la fermeture.
Le canal a repris ses émissions lundi matin, mais pas avant que plusieurs hommes politiques s’expriment contre la fermeture de la chaîne.
Dans un post sur sa page Facebook, Rivlin a appelé à un plan de sauvetage temporaire, particulièrement à la lumière des élections imminentes.
« La fermeture d’une chaîne jette une ombre sur la démocratie israélienne, en particulier en période électorale », écrit-il. « Compte tenu de la concurrence limitée dans le marché des communications israéliennes, nous ne pouvons pas nous permettre de perdre cette chaîne, en particulier à un moment où nous avons besoin d’être exposés à l’éventail de toutes les opinions. »
Rivlin a concédé que les dettes devaient être payées, mais a exhorté le gouvernement « à trouver une solution, même temporaire, à la crise actuelle pour empêcher la fermeture de la chaîne » au moins jusqu’à ce que le nouveau gouvernement soit formé .
Le président a affirmé qu’ »un débat démocratique pluriel est une condition pour une démocratie saine », laissant apparaître une critique envers le manque de diversité parmi les médias israéliens.
« Quelle que soit notre opinion sur la variété actuelle [des médias], le moyen d’en créer de nouveaux n’est certainement pas lié à la fermeture de canaux existants », écrit-il.
Lapid appelle Netanyahu à ne pas tenir compte de «considérations personnelles» et à adopter sa proposition financière pour sauver la station de télévision.
« Il existe un cadre – qui est déjà sur la table au ministère des Finances – que nous avons préparé pour réglementer les émissions sur les Deuxième et Dixième chaînes et qui peut empêcher la fermeture de la Dixième chaîne et permettra de continuer la diffusion. Ce que Netanyahu doit faire, c’est le sortir du tiroir et le mettre en œuvre », affirme Lapid.
« Nous ne devons pas laisser les intérêts découler de considérations personnelles ; il faut surmonter cela dans la nécessité de préserver la liberté des médias et les valeurs démocratiques », a-t-il ajouté.
En soutenant la chaîne de télévision, Rivlin et Lapid ont rejoint de nombreux hommes politiques israéliens – y compris Tzipi Livni, Zehava Gal-On, Moshe Kahlon, et Naftali Bennett – qui ont appelé à un plan de sauvetage financier.
Après des années de difficultés financières, la Dixième chaîne devrait cesser de diffuser à partir de mercredi, a-t-elle annoncé dès dimanche soir.
À 22h30 dimanche, le canal a cessé ses émissions régulières pour la nuit, et a affiché à la place une photo du Premier ministre Benjamin Netanyahu et un message annonçant la fermeture.
« Dans trois jours, La Dixième chaîne sera fermée », dit le communiqué. « Le Premier ministre, Benjamin Netanyahu, qui est également ministre des Communications, refuse de trouver une solution .»
« Par conséquent, le syndicat des employés a décidé d’arrêter, pour ce soir, les émissions de la chaîne. » Et la reprise des diffusions devrait se faire dès lundi matin à 6 heures, fait encore savoir le communiqué.
En décembre 2012, la Knesset a voté pour étendre la diffusion de la franchise de la Dixième chaîne pendant deux ans et pour accorder à celle-ci – elle était déjà à court de fonds – un prêt pour couvrir ses dettes envers le gouvernement tout en l’obligeant à transférer ses opérations à Jérusalem dans les neuf mois.
Au cours des dernières années, la station a brûlé des dizaines de millions de shekels en s’endettant. Elle a continué à diffuser à défaut de répondre aux critères imposés.
Néanmoins, de nombreux employés de la chaîne avaient accusé le chef du Likud d’une animosité personnelle en menaçant de ne pas vouloir étendre la franchise, après que la chaîne ait diffusé une série d’émissions sur Netanyahu et sur les membres de son entourage, y compris sa femme.
Un des dirigeants de la chaîne, Nadav Eyal, a écrit sur Facebook suite à la suspension des émissions de dimanche que la chaîne avait été rentable au cours des derniers mois, et qu’un accord mutuellement acceptable avec l’Autorité pour la télévision et la radio – qui gère les questions de licences de radiodiffusion – devait finaliser la question de la dette.
« Cet après-midi, l’Autorité nous a envoyé une lettre surprenante. Elle est revenue sur l’accord visant à régler la dette, et a émis une exigence dont elle savait que la chaîne ne pouvait répondre », a écrit Eyal, ajoutant que la chaîne était prête à payer la partie convenue de la dette immédiatement.
Eyal a aussi laissé entendre que Netanyahu avait une responsabilité dans la crise.
Le chef du syndicat des travailleurs de la chaîne, Matan Hodorov, a fustigé le Premier ministre dans un message délivré aux employés, accusant Netanyahu d’ignorer ce qu’il a appelé « la plus grande crise de l’histoire de la télévision israélienne ». »
« Nous espérons qu’une solution acceptable sera trouvée pour défendre la liberté des médias en Israël », a écrit Hodorov sur le site de news Nana10, qui est affilié avec la chaîne.
Pendant ce temps, les hommes politiques israéliens ont écrit sur les médias sociaux à propos de cette affaire.
Moshe Kahlon, fondateur du parti Koulanou et ancien ministre de la communication du Likud, a appelé Netanyahu à intervenir pour qu’une solution rapide soit trouvée à la crise.
Zehava Gal-On du Meretz a eu des mots très durs pour le Premier ministre, le qualifiant de tyran utilisant les « derniers jours de son mandant en portant un coup à la liberté d’expression et en laissant une chaîne israélienne qui emploie des centaines de personnes fermer tout simplement parce qu’elle ne suit pas sa propre ligne [de droite] ».
Tzipi Livni, qui s’est associée au parti travailliste pour former un bloc de centre-gauche, a changé sa photo de profil avec une image qui contient le slogan « Saving Canal 10 » [Il faut sauver la Dixième chaîne]. « Nous ne voulons pas que le droit des téléspectateurs de choisir leur chaîne soit bafoué, ni que la vie de 1 000 personnes soient mises en danger », a-t-elle écrit.
Miri Regev du Likud a estimé qu’ »il ne devrait pas y avoir d’écrans noirs à la télévision dans un pays démocratique », et a promis de faire « tout son possible afin que nous ne puissions pas voir de telles choses sur nos écrans ; nous allons aider la Dixième chaîne à reprendre des émissions régulières ».
Naftali Bennett a déclaré que, bien que « n’étant pas un grand fan de la Dixième chaîne, on ne devrait pas permettre qu’elle ferme. Il est temps d’aider la Dixième chaîne ».
La Dixième chaîne, qui a commencé à diffuser en 2002, est la deuxième chaîne commerciale d’Israël. Elle est également disponible aux États-Unis et sur les réseaux câblés européens. Elle produit entre autres des programmes originaux d’actualité et de divertissement.