Sarah Halimi : Le Parlement adopte la réforme de l’irresponsabilité pénale
Demandé par Emmanuel Macron, le texte fait suite à l’émotion suscitée par l’absence de procès dans l’affaire Sarah Halimi, l’auteur des faits ayant été déclaré irresponsable
Jeudi, par un dernier vote du Sénat, le Parlement a définitivement adopté la réforme du régime d’irresponsabilité pénale, qui fait suite à l’affaire Sarah Halimi, sexagénaire juive tuée en 2017 par un consommateur de cannabis exempté de jugement.
« On ne jugera jamais les fous. Mais cette loi va permettre de poursuivre et de juger des actes qui n’étaient auparavant pas sanctionnables », a expliquée la secrétaire d’État Sarah El Haïry, citée par Public Sénat.
Deux textes, l’un du Sénat et l’un du gouvernement, avaient été proposés pour réformer le régime d’irresponsabilité pénale. Le 25 mai dernier, la Haute assemblée avait adopté sa propre proposition de loi dans le but de répondre au cas où « l’abolition temporaire du discernement d’une personne mise en examen résulte au moins partiellement de son fait ».
Demandé en avril par le président Emmanuel Macron suite à la vive émotion suscitée par l’absence d’un procès dans l’affaire Sarah Halimi, le texte adopté à main levée, sans les voix de la gauche, prévoit deux exceptions à l’irresponsabilité pénale.
Le gouvernement crée une « exception au régime d’irresponsabilité pénale »
La première exception indique qu’il n’y aura plus d’irresponsabilité si l’abolition temporaire du discernement résulte de la consommation proche et volontaire de psychotropes dans le but même de commettre une infraction. Cette exception a vocation à s’appliquer par exemple à des terroristes qui se drogueraient juste avant leur passage à l’acte.
« Un homme responsable consomme des produits stupéfiants dans le but, exclusivement dans le but de commettre un crime. Après, la commission de ce crime, les experts disent de lui qu’il n’a pas de discernement […] Nous, nous estimons que la prise de stupéfiants dans le but de se donner du courage, est un acte qui s’assimile au crime lui-même, c’est la raison pour laquelle nous voulons qu’il soit pénalisé. Naturellement, il faut que l’intéressé ait ensuite retrouvé son discernement, parce qu’on ne juge pas les fous », avait expliqué devant le Sénat en première lecture, Éric Dupond-Moretti, prenant l’exemple de « quelqu’un qui prend des stupéfiants pour commettre un attentat terroriste ».
Comme souhaité par nombre de sénateurs, s’il est difficile de déterminer s’il y a eu une abolition ou une altération du discernement, du fait d’expertises psychiatriques contradictoires, la juridiction compétente statuera à huis clos sur la responsabilité ou l’irresponsabilité, avant le jugement de l’affaire le cas échéant.
Il n’y aura « pas de justice spectacle », a dit le rapporteur au Sénat Loïc Hervé (Union centriste), vantant une « position d’équilibre ».
La seconde exception indique qu’il sera désormais possible de réprimer la consommation de produits psychoactifs, comme des drogues ou de l’alcool, si la personne savait que cela pouvait la conduire à des violences ou un homicide, dont elle a été déclarée irresponsable.
« Il ne s’agit pas de réprimer l’acte commis mais l’absorption volontaire de psychotropes », a résumé le garde des Sceaux et ancien avocat, Eric Dupond-Moretti.
Par ailleurs, ce ne serait plus le juge d’instruction (comme c’est le cas actuellement), mais le tribunal correctionnel ou la cour d’assises qui statuera sur la responsabilité pénale du mis en examen. « Nous avions adopté une position minimale, mais qui permettait aux familles des victimes d’avoir un procès », avait souligné Muriel Jourda, sénatrice LR, rapporteure du projet de loi au gouvernement, il y a quelques semaines.
Le deuxième volet du projet de loi contient des dispositions sur la sécurité intérieure. Il vise à renforcer la répression des atteintes commises contre les forces de l’ordre, à lutter contre les rodéos sauvages, à créer une réserve opérationnelle de la police nationale, à adapter le cadre juridique de la captation d’images de la vidéo surveillance, des caméras piétons ou encore des drones.