Shlomo Karhi veut réduire drastiquement le budget de Kan
Selon le directeur de Kan, le projet du ministre des Communications de réduire le financement conduirait à une fermeture ; il promet qu'il continuera à diffuser "malgré les menaces"
Le ministre des Communications, Shlomo Karhi (Likud), a déclaré samedi qu’il chercherait à réduire considérablement le financement de la chaîne publique israélienne Kan. Le directeur de la chaîne a prévenu que cette mesure la contraindrait à fermer ses portes.
Karhi a déclaré qu’il ferait pression pour inclure les réductions de financement dans un ensemble de lois qui seront inclus dans le prochain budget de l’État.
« À mon avis, il n’y a plus de place à notre époque pour un radiodiffuseur public alors qu’il existe un large éventail de chaînes », a-t-il déclaré dans une interview accordée à la Douzième chaîne. « Les obstacles seront supprimés et le marché sera ouvert à la concurrence. »
« Le budget de [Kan] sera réduit de centaines de millions de shekels », a-t-il ajouté.
La chaîne publique israélienne Kan a débarqué sur les ondes en 2017 après une intense bataille législative pour fermer et remplacer son prédécesseur, l’Autorité de radiodiffusion d’Israël et la chaîne 1, longtemps critiquée pour son gaspillage budgétaire et sa programmation désuète. Kan, à l’inverse, s’est avérée beaucoup plus populaire, produisant certains des contenus télévisés les plus populaires et les plus loués du pays ces dernières années.
Kan dispose actuellement d’un budget annuel de plus de 750 millions de shekels.
« Aujourd’hui, ces centaines de millions vont à un seul acteur du marché et bloquent toute concurrence », a affirmé Karhi.
Il a également promis de fermer deux organismes publics qui supervisent la radiodiffusion commerciale, le Conseil de la radiodiffusion par câble et satellite et l’Autorité de radiodiffusion d’Israël, qui auraient « réglementé le discours » dans les médias.
Répondant à Karhi, le directeur-général de Kan a déclaré que la réduction du budget de la chaîne publique de centaines de millions de shekels entraînerait sa fermeture.
« [Kan], en tant qu’organisme de radiodiffusion indépendant, poursuivra résolument ses activités malgré les menaces qui pèsent sur son existence même », a écrit Golan Yochpaz sur Twitter.
L’Union des journalistes en Israël a décrit la réduction budgétaire proposée par Karhi comme « une déclaration de guerre contre la chaîne publique ».
« Tous les discours sur la fermeture ou la privatisation de la chaîne publique ne sont rien d’autre qu’une tentative de menacer les journalistes de la chaîne et de les dissuader de faire leur travail fidèlement, tout en portant atteinte aux moyens de subsistance de centaines de familles », a déclaré le syndicat dans un communiqué.
« Nous appelons à la fin des tentatives d’intimidation et à laisser les employés de la chaîne continuer à effectuer leur excellent travail », a-t-il ajouté.
Les commentaires de Karhi samedi sont intervenus après avoir déclaré la semaine dernière qu’il n’y avait aucune raison de soutenir le système de radiodiffusion publique en Israël. Il avait également indiqué son intention de fermer la chaîne publique israélienne Kan ainsi que d’autres organismes de régulation de la transmission télévisée et radiophonique.
Il a également déclaré qu’il proposerait de privatiser la radio de l’armée, qui est exploitée par Tsahal.
En novembre, au cours des négociations de coalition, un reportage non-sourcé de la Douzième chaîne a annoncé que le Likud chercherait à fermer le département des informations de Kan mais qu’il laisserait intacts les départements qui créent des programmes scénarisés et des documentaires.
En réponse, le Likud avait insisté sur le fait que la question n’avait pas été soulevée lors des négociations de coalition. À l’époque, Karhi avait écrit sur Twitter qu’il n’était pas au courant d’un tel plan, mais qu’il soutenait cette initiative.
« Il n’y a aucune raison de continuer à financer une chaîne publique à hauteur de près d’un milliard de shekels par an », avait-il écrit. « Fermer Kan n’est qu’un début, avant de s’occuper de la radio de l’armée. »
Lorsque Kan a débarqué sur les ondes, le Premier ministre Netanyahu – qui a également occupé pendant des années le poste de ministre des Communications – s’était fortement opposé à la création de Kan, prétendant qu’elle était trop orientée à gauche et trop difficile à contrôler.
Un désaccord interne sur la question avait failli faire tomber la coalition en 2017. Toutefois, si le département de l’information de la chaîne devait être fermé aujourd’hui, il est peu probable que le gouvernement actuel de Netanyahu, de droite et religieux, s’y oppose.
L’actuelle ministre des Transports, Miri Regev (Likud) – qui a par le passé été ministre de la Culture – avait eu ces mots tristement célèbres lors d’une audience de la Knesset en 2016 sur la question : « Quel est l’intérêt d’avoir un radiodiffuseur public si nous ne le contrôlons pas ? Pourquoi devrions-nous lui donner des fonds s’il peut diffuser ce qu’il veut ? »
Peu de temps après le lancement de Kan, Netanyahu avait déjà tenté de séparer le service de l’information du reste du radiodiffuseur public dans le but de mieux contrôler sa programmation.
Mais suite à la victoire israélienne au concours Eurovision de la chanson de 2018, le Premier ministre a renoncé à son projet, qui aurait eu pour effet de ne pas permettre à Israël de rester membre de l’UER et donc d’accueillir le concours 2019.