S’ils ne diront pas qu’ils veulent le cessez-le-feu, les US veulent une trêve longue
Les Américains prévoient d'utiliser une trêve pour avancer leurs plans pour l'après-guerre, expliquent les officiels, ce qui indique qu'ils ne soutiendront pas une reprise des combats - même si cela signifie que le Hamas restera à Gaza sous une forme ou une autre
Alors que la guerre entre Israël et le Hamas entre dans son quatrième mois, l’administration Biden n’a pas abandonné publiquement son opposition à la perspective d’un cessez-le-feu permanent dans la bande de Gaza.
« Nous ne pensons pas qu’actuellement, un cessez-le-feu général serait la meilleure approche », a déclaré le porte-parole du Conseil à la Sécurité nationale, John Kirby, à la fin du mois de janvier, expliquant que l’arrêt de la guerre permettrait aux dirigeants du Hamas de se maintenir au pouvoir – des dirigeants qui n’ont pas dissimulé leur intention de continuer à lancer des attaques dévastatrices en Israël, des attaques similaires à celle du 7 octobre où les terroristes avaient tué environ 1200 personnes et où ils avaient enlevé 253 personnes, prises en otage de la bande de Gaza.
Le conseiller à la sécurité nationale américaine Jake Sullivan a répété, dimanche, qu’en lieu et place d’un cessez-le-feu permanent, Washington cherchait la mise en vigueur « d’une pause durable dans les hostilités » qui permettrait aux otages qui sont encore retenus dans la bande de Gaza d’être libérés et à l’aide humanitaire de rentrer dans la bande en quantité plus importante.
Néanmoins, l’administration espère également qu’elle pourra utiliser cette pause prolongée – encore hors d’atteinte – pour négocier un cessez-le-feu plus permanent à Gaza. Un haut responsable américain a confié lundi au Times of Israel que l’administration serait ainsi en mesure de faire avancer des initiatives régionales, comme l’accord de normalisation des relations entre Israël et l’Arabie saoudite ou la création d’un horizon politique ouvrant la voie, à terme, à l’éventuel établissement d’un état palestinien.
« Si nous obtenons une pause humanitaire, alors nous voulons pouvoir être en mesure d’avancer aussi rapidement que possible sur toutes les problématiques qui se poseront dans l’après-guerre – la reconstruction de Gaza, la réforme de l’Autorité palestinienne, la gouvernance à Gaza, les deux Etats, la normalisation. Certaines d’entre elles sont difficiles à résoudre et d’une grande complexité », a expliqué un autre officiel de l’administration Biden aux journalistes alors qu’il s’apprêtait à partir en Arabie saoudite aux côtés du secrétaire d’État Joe Biden, lundi.
Le premier responsable américain a établi clairement que les négociations portant sur une pause humanitaire et sur un accord consacré à la libération des otages n’étaient pas sur le point d’aboutir, le Hamas continuant à exiger un cessez-le-feu permanent et le retrait total des troupes israéliennes dans la bande de Gaza dans ce cadre – Deux points qu’Israël refuse catégoriquement d’envisager.
Un diplomate arabe proche des négociations a indiqué que les intermédiaires espéraient sortir de l’impasse en formulant l’accord de sorte à obliger Israël à s’engager en faveur de pourparlers, pendant la trêve, sur un cessez-le-feu permanent.
Toutefois, le diplomate a dit être inquiet à l’idée que les propos publics qui ont pu être tenus par le Premier ministre Benjamin Netanyahu – qui a notamment déclaré, la semaine dernière, qu’il était opposé au retrait des troupes de Gaza ou à la remise en liberté de milliers de prisonniers sécuritaires palestiniens – n’en viennent à rompre ces négociations fragiles.
Alors qu’une grande partie de la crédibilité du président Joe Biden en matière de politique étrangère, en cette année d’élections à la Maison Blanche, reposera sur la réussite de l’accord sur les otages, Blinken profite de sa visite réalisée dans la région, cette semaine, pour aller en Arabie saoudite, en Égypte, au Qatar, en Israël et en Cisjordanie avec pour objectif d’aider à faire avancer ces discussions.
En l’absence d’un accord sur les otages, la guerre risque de traîner indéfiniment, torpillant les pourparlers sur l’accord de normalisation avec l’Arabie saoudite – Ryad refusera de le signer tant que le conflit sera en cours, ont averti les dirigeants saoudiens. Et sans accord de normalisation, il n’y aura aucune voie claire ouverte en vue de l’établissement d’un état palestinien dans la mesure où le royaume du Golfe a conditionné la normalisation avec l’État juif à des avancées effectuées en direction de la solution à deux États – une solution à deux États qui est aussi un objectif suprême de la politique étrangère américaine.
Si les États-Unis veulent utiliser la pause pour négocier un accord de cessez-le-feu plus permanent, il y a toutefois une inconnue : ce qu’il adviendra du Hamas. L’approche adoptée par l’administration Biden laisse penser qu’elle pourrait s’attendre à ce que le groupe terroriste reste d’une manière ou d’une autre.
Netanyahu et les autres leaders israéliens ont juré de continuer la guerre jusqu’à la « défaite totale » du Hamas et les États-Unis disent soutenir le départ du pouvoir du groupe terroriste au sein de l’enclave côtière.
Le diplomate arabe a noté que les acteurs régionaux avaient déjà accepté, d’une manière ou d’une autre, la perspective que le Hamas pourrait rester actif mais qu’ils cherchent actuellement des cadres interdisant au groupe terroriste de continuer à gouverner Gaza.
De la même manière, des opérations militaires contre les terroristes du Hamas – qui pourraient être menées par Israël ou par un tiers – pourraient perdurer après la guerre, a suggéré le diplomate.
Cesser de prendre des gants
Un troisième responsable américain a expliqué que l’administration Biden n’avait pas véritablement confiance en Netanyahu concernant sa prise en charge de la guerre, citant son opposition face à un éventuel retour de l’Autorité palestinienne dans la bande.
Ses partenaires de coalition d’extrême-droite poussent le Premier ministre à réétablir une présence israélienne à Gaza, à encourager les résidents palestiniens de la bande à émigrer et à occuper l’enclave côtière militairement – des politiques auxquelles Netanyahu affirme s’opposer et qui priveraient Jérusalem, c’est certain, de tout le soutien dont il bénéficie encore de Washington. Le Premier ministre a, de la même manière, évité les discussions concernant « le lendemain de la guerre » à Gaza au cabinet, et ce même alors que le chef d’état-major Herzi Halevi a averti qu’un tel évitement risquait de faire perdre à l’armée israélienne ses acquis militaires sur le terrain, dans la bande.
Ces derniers jours, Tsahal a fait savoir que le Hamas reprenait ses activités dans des secteurs du nord de Gaza dont les soldats s’étaient emparés à la fin de l’année dernière.
Le troisième officiel américain a affirmé que Netanyahu avait déjoué les efforts livrés, dans la région, en faveur de la mise en place d’une nouvelle administration dans les zones concernées, permettant ainsi au Hamas de remplir le vide.
Malgré la frustration croissante ressentie par l’administration Biden à l’égard de Netanyahu, elle n’a pas encore pris la décision d’adopter un positionnement plus conflictuel à l’encontre du Premier ministre, a fait remarquer le responsable.
Certains, au sein de l’administration, appellent à ce que le capital politique gagné par Biden auprès des Israéliens, suite au soutien diplomatique et militaire offerts à l’État juif par le président américain après le 7 octobre, soit utilisé dorénavant de manière plus agressive, a-t-il déclaré, ajoutant que ces appels se multipliaient.
L’ordre exécutif de Biden qui a sanctionné, pour la toute première fois, les partisans violents du mouvement pro-implantation pourrait être le tout premier signe de cette approche qui monte en puissance à Washington.
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