Israël en guerre - Jour 649

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Sur France 2, Thierry Ardisson : Gaza, « c’est Auschwitz » ; Raphaël Pitti : le « génocide » à Gaza est « caractérisé »

Sur le plateau de Léa Salamé, le médecin a assuré que les dirigeants israéliens sont des "barbares" et que les Israéliens devraient changer de gouvernement pour "le bien de leur âme"

L'animateur Thierry Ardisson, sur le plateau de « Quelle époque », sur France 2, le 10 mai 2025. (Capture d'écran Youtube / Quelle époque / utilisée conformément à l'article 27a de la loi sur le droit d'auteur)
L'animateur Thierry Ardisson, sur le plateau de « Quelle époque », sur France 2, le 10 mai 2025. (Capture d'écran Youtube / Quelle époque / utilisée conformément à l'article 27a de la loi sur le droit d'auteur)

Sur le plateau de l’émission – pré-enregistrée – « Quelle époque » diffusée samedi soir sur France 2, l’animateur vedette Thierry Ardisson, a comparé Gaza à Auschwitz, des propos pour lesquels il a demandé pardon, dimanche, auprès de « ses amis juifs ». Des propos survenus en réaction à un monologue anti-Israël de Raphaël Pitti, un médecin humanitaire, fondateur de l’ONG « Humanité, Solidarité et Médecine » (HuSoMe) et, par ailleurs, candidat Place publique sur la liste du Nouveau Front populaire à Clichy et Levallois-Perret lors des législatives 2024. Place publique est le parti de Raphaël Glucksmann, le compagnon de Léa Salamé, l’animatrice de l’émission en question.

Cette partie de l’émission a débuté avec l’animatrice reprenant des extraits d’une déclaration de la journaliste juive Anne Sinclair publiée le 8 mai dernier sur son compte Instagram : « Les Juifs n’affament pas les enfants. Les Juifs ont trop souffert pour ne pas supporter qu’on fasse du mal en leur nom. » Salamé a aussi cité une déclaration similaire de la rabbine Delphine Horvilleur parue sur sa revue Tenou’a.

Ces prises de position ont suscité de vifs débats en ligne. On retiendra la réaction du président de l’Union des Étudiants juifs de France (UEJF) qui résume : « Il est là le mensonge, de croire qu’on ne peut pas être sioniste, considérer qu’on veuille qu’Israël se défende, défende son droit à exister, fasse tout pour ramener ses otages de Gaza – et en même temps – s’alarmer de la situation humanitaire à Gaza ». « Ce n’est pas du tout contradictoire », précise Yossef Murciano, cité par France Info.

Yossef Murciano (Crédit : capture d’écran)

« On ne peut pas considérer que ce qu’il s’est passé le 7 octobre puisse expliquer ce qu’il se passe aujourd’hui à Gaza », a d’emblée estimé le médecin. « On ne peut pas tuer 50 000 enfants, on ne peut pas affamer 2 millions de personnes depuis maintenant deux mois. »

Les chiffres avancés par le ministère de la Santé du Hamas à Gaza parlent de plus de 50 000 victimes palestiniennes depuis le début de l’offensive israélienne contre le groupe terroriste, toute personne confondue. Ce bilan, qui ne peut être vérifié et qui ne fait pas la distinction entre terroristes et civils, inclut les quelque 20 000 terroristes qu’Israël affirme avoir tués au combat et les civils tués par les centaines de roquettes tirées par les groupes terroristes qui retombent à l’intérieur de la bande de Gaza.

« Nous étions dans un massacre. Moi, je me suis toujours gardé de parler de ‘génocide’ parce que c’est une affaire juridique, bien évidemment. Mais maintenant, tout est caractérisé. Cette volonté de tuer, de détruire et ensuite de déplacer l’ensemble de cette population palestinienne », a poursuivi Raphaël Pitti.

Le médecin faisait référence aux récentes déclarations du ministre israélien d’extrême-droite, Bezalel Smotrich, qui promettait la semaine dernière la « destruction totale » de Gaza, la promotion de l’émigration de la population palestinienne, et « l’occupation » de l’enclave par Israël et que Léa Salamé a tenu à rappeler.

La journaliste a d’ailleurs interrompu le médecin pour rappeler des éléments de contexte non négligeables, notant par exemple « qu’il reste 21 otages vivants à Gaza et qu’à un moment, il faut que ceux qui les détiennent les rendent, ça suffit », sans nommer explicitement les groupes terroristes palestiniens du Hamas ou du Jihad islamique à l’origine des massacres du 7 octobre 2023 qui a déclenché la guerre. Le chiffre qu’elle avance est celui donné la semaine dernière par le Premier ministre Benjamin Netanyahu, qui a indiqué qu’Israël avait des doutes sur le sort de trois autres otages, parmi les 24 dont on pensait initialement qu’ils étaient en vie sur les 58 en tout toujours retenus à Gaza.

« Les grands leaders, les grandes voix de la communauté juive jusqu’à maintenant, elles avaient du mal à parler et Anne Sinclair et Delphine Horvilleur l’expliquent », a poursuivi Léa Salamé. « Anne Sinclair dit que la montée de l’antisémitisme ces dernières semaines et après le 7 octobre a été telle qu’à un moment, effectivement, il y a une forme de solidarité […] pendant des mois et des mois, il fallait faire corps avec la communauté israélienne. »

« De plus en plus ces derniers temps… Je pense aussi à Joann Sfar, le dessinateur, qui dit : ‘Il est contraire à la morale humaine et à l’éthique juive de se taire face aux déplacements de populations forcés et au nettoyage ethnique’, qui est en train de s’opérer. Parce que c’était ça aussi, être juif. C’était être sensible à la douleur du monde », a ajouté la présentatrice dont le père Ghassan Salamé a été nommé en janvier ministre de la Culture au sein du gouvernement libanais formé à la suite de la défaite du groupe terroriste libanais pro-Iran du Hezbollah qui bloquait l’élection d’un président depuis des années. Le Hezbollah avait ouvert un front de soutien à son allié palestinien du Hamas dès le lendemain du pogrom du 7 octobre.

L’animatrice Léa Salamé, sur le plateau de « Quelle époque », sur France 2, le 10 mai 2025. (Capture d’écran Youtube / Quelle époque / utilisée conformément à l’article 27a de la loi sur le droit d’auteur)

« Il aurait été totalement normal que ce soit justement cette communauté juive, installée en Israël, qui soit pour nous la conscience-même de notre humanité après ce qu’ils avaient vécu après la Shoah », a rebondi Raphaël Pitti à ses propos.

« Chaque fois qu’il y a des crimes contre l’humanité, les Juifs auraient dû être là pour nous rappeler : ‘Attention, où allez-vous ?’ », a-t-il ajouté, semblant mettre en cause ce qu’il considère comme un silence — voire une complicité ? — de la communauté juive française face à la conduite de la guerre par le gouvernement israélien.

« Or, c’est exactement ce qu’il se passe aujourd’hui qui est totalement l’inverse. »

Au sujet du gouvernement israélien, il a estimé « qu’il s’agit de barbares qui s’ingénient à vouloir massacrer l’ensemble de cette population palestinienne ».

Quant à la présumée famine à Gaza, Raphaël Pitti va aussi jusqu’à dresser un parallèle entre la situation actuelle et les corps décharnés des prisonniers juifs des camps de concentration nazis pendant la Seconde Guerre mondiale…

« Les images que nous avons de ces enfants totalement dénutris, ce sont des images inacceptables — c’est ce qu’on a vu pendant la dernière guerre, c’est ce qu’on a vu dans les camps de concentration. »

Le médecin humanitaire Raphaël Pitti, président de l’ONG « Humanité, Solidarité et Médecine », sur le plateau de « Quelle époque », sur France 2, le 10 mai 2025. (Capture d’écran Youtube / Quelle époque / utilisée conformément à l’article 27a de la loi sur le droit d’auteur)

C’est à ce moment-là que Thierry Ardisson a appuyé la comparaison esquissée par Raphaël Pitti.

« C’est exactement comme… c’est Auschwitz quoi ». « C’est fou que ce soit les Juifs… enfin les Israéliens, parce que les Juifs… », a-t-il dit avant d’être repris par l’animatrice Léa Salamé, qui n’a cependant pas rebondi sur la comparaison avec les camps d’extermination, mais a précisé : « Une partie des Israéliens ».

« Pendant la [Seconde Guerre mondiale], on nous dit : ‘On ne savait pas’. En fait ils savaient parce qu’ils survolaient les camps de concentration », a poursuivi Ardisson. « Mais là on est exactement dans la même situation. Nos petits-enfants nous diront que nous savions et que nous n’avons rien fait. On nous dira : ‘Mais vous saviez’. »

Des propos validés par l’animatrice qui ajoute : « vous saviez ce qui se passe à Gaza et vous n’avez rien fait » et aussi par la chanteuse Suzane qui acquiesce de la tête.

« J’attends que les Israéliens fassent leur révolution […] il faut que ce soit eux qui se débarrassent de Netanyahu. Je voudrais que ce soit eux […] ce serait bien pour leur âme », a renchéri le médecin…

« En Israël, il y a aujourd’hui cette population qui manifeste, et qui a manifesté d’ailleurs dès le lendemain du 7 octobre contre Netanyahu
aussi », a déclaré la journaliste Apolline de Malherbe, qui n’a pas non plus relevé la comparaison avec Auschwitz. Apolline de Malherbe est descendante de Justes parmi les nations. « C’est à eux en effet de faire évoluer les choses », a-t-elle dit, semblant appuyer la dernière phrase de Raphaël Pitti qui se dit en colère contre le président français qui ne fait que parler selon lui.

Le médecin balaye d’un revers de la main le fait avéré que le Hamas détourne l’aide à son profit et au détriment des Gazaouis dont des centaines ont d’ailleurs récemment manifesté contre le groupe terroriste. Pitti, qui dit avoir été à deux reprises à Gaza, assure que c’est l’UNWRA, l’agence controversée de l’ONU pour les réfugiés palestiniens, qui distribue l’aide, ignorant le rôle de certains de ses employés lors du pogrom et le manque de confiance d’Israël qui lui a depuis interdit de travailler.

L’avocat et essayiste Gilles-William Goldnadel a déclaré sur X que l’animateur lui avait adressé un communiqué, qu’il joint à son message, dans lequel Ardisson écrit : « Suite au bouleversant discours du Dr. Pitti, j’ai comparé Gaza à Auschwitz. L’émotion était sans doute trop forte et mon propos exagéré. Je prie mes amis juifs de bien vouloir me pardonner ».

« Je rappelle que dans ‘Quelle Époque’, j’ai commencé par m’émouvoir du sort réservé, par exemple, à Jérôme Guedj [insulté de « sioniste » lors de récentes manifestations, ndlr] et j’ai rappelé que c’est en 2004, soit dix ans avant que Manuel Valls n’interdise ses spectacles, que j’ai viré Dieudonné en direct de Tout le monde en parle parce qu’il rallumait la mèche de l’antisémitisme. Ma participation à la Marche contre l’antisémitisme le 12 novembre 2023, confirmait ma position », a-t-il encore écrit.

« Je constate cependant que sur le plateau de France 2, Léa Salamé n’a pas récusé cette comparaison immonde. Je ne sache pas non plus qu’elle s’en soit excusée. Une fois de plus, je constate que l’audiovisuel public se fait le principal instrument de la détestation d’Israël et le fabricant de l’antisémitisme. Raison pourquoi j’ai décidé de saisir l’Arcom, » a pour sa part ajouté l’avocat.

Mais vers 21h, dimanche, le compte X de l’émission « Quelle époque » écrivait : « Suite à l’émission diffusée hier, l’équipe de ‘Quelle Époque’ tient à exprimer sa compréhension devant les réactions et l’indignation suscitées par les propos tenus par Thierry Ardisson. Il s’en est d’ailleurs excusé ce matin. ‘Quelle Époque’ a consacré de nombreuses émissions aux massacres du 7 octobre, à la montée de l’antisémitisme et à la Shoah. Et nous tenons à réaffirmer qu’en aucune manière la Shoah ne saurait être banalisée. Depuis le 7 octobre 2023, les actes antisémites ont explosé dans notre pays. Personne ne peut y rester indifférent. La séquence en question venait d’ailleurs après un long développement sur l’horreur de l’antisémitisme en France. Nous sommes extrêmement vigilants pour que jamais la haine, quelle qu’elle soit, n’ait sa place à l’antenne. »

Or, le message n’a pas fait mention des propos pour le moins controversés de Raphaël Pitti, ni de ceux de la présentatrice.

Sur X, le président de Bnai Brith France, Philippe Meyer, a interpellé l’animateur en qualifiant sa comparaison « d’ignoble ». « Auschwitz c’était la Shoah avec son inhumanité. Gaza, c’est la guerre avec ses tragédies », a-t-il écrit,

Dimanche, la Ligue internationale contre le racisme et l’antisémitisme (Licra) avait plus tôt « condamné une nouvelle fois la banalisation des comparaisons outrancières et le confusionnisme ambiant. Le nazisme et la Shoah ne sont pas l’alpha et l’oméga de toutes les crises nationales et internationales. Gaza n’est pas Auschwitz », a-t-elle écrit sur le réseau social X.

Le président du Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif), Yonathan Arfi, a lui aussi lancé : « Non, Thierry Ardisson, Gaza n’est pas Auschwitz ! », sur le même réseau.

« La Mémoire de la Shoah n’est jamais autant convoquée dans le débat public que par ceux qui veulent la retourner contre les Juifs », a déclaré M. Arfi.

« Je déplore depuis le 7 Octobre (2023, ndlr) la détresse de toutes les populations civiles, israéliennes et palestiniennes. Mais pour quel autre conflit utilise-t-on ces comparaisons avec la Shoah ? Aucune critique d’Israël ne justifie de le nazifier », a-t-il encore écrit.

« La situation au Proche-Orient est suffisamment compliquée et difficile pour ne pas avoir besoin de ces confusions coupables », a-t-il rappelé.

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