Israël en guerre - Jour 465

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Un autiste emprisonné depuis 2 ans toujours en attente d’évaluation par un psy

Un juge a accepté la demande du père que son fils, condamné pour fausses menaces d'attentats, soit examiné par un expert, mais l'examen n'aura pas lieu avant plusieurs mois

Jacob Magid est le correspondant du Times of Israël aux États-Unis, basé à New York.

Le suspect est présenté au tribunal de Rishon Lezion, alors qu'il est suspecté d'avoir proféré de fausses menaces d'attentat à la bombe contre des institutions juives dans le monde entier, le 23 mars 2017. (Flash90)
Le suspect est présenté au tribunal de Rishon Lezion, alors qu'il est suspecté d'avoir proféré de fausses menaces d'attentat à la bombe contre des institutions juives dans le monde entier, le 23 mars 2017. (Flash90)

Presque deux ans et demi après avoir été condamné à 10 ans de prison pour avoir fait des milliers de menaces d’attentats à la bombe contre des centres communautaires juifs américains, un jeune israélo-américain de 20 ans doit encore être examiné par un spécialiste de l’autisme pour déterminer si ses conditions de détention sont convenables pour sa maladie, comme la loi l’impose.

Depuis son arrestation en mars 2017, les gardiens de la prison de Nitzan à Ramle gardent M. – dont le nom ne peut pas être publié par décision de justice en Israël – dans sa cellule 23 heures par jour. Selon son père, le jeune détenu peut seulement sortir dans la cour de la prison avec des chaînes aux mains et aux pieds.

L’Administration pénitentiaire israélienne affirme que M. constitue un danger pour lui-même et pour d’autres détenus. Il aurait essayé de s’échapper, et a réussi à passer un autre appel de menace à la bombe avec un téléphone de la prison.

Pourtant, une travailleuse sociale de l’Etat, qui a visité la prison en février dernier, a établi dans son rapport que ces incidents étaient liés à des crises d’autisme de M. provoquées par les conditions extrêmes dans lesquelles il est détenu.

Le mois dernier, le père de M. a déposé un recours au tribunal de Lod demandant que son fils soit examiné par un expert psychiatrique indépendant spécialiste de l’autisme afin de déterminer les conditions de détention appropriées pour son fils.

Selon son recours, les conditions de détention de M. ont été examinées par plusieurs officiels de la prison, mais pas par un expert médical compétent, même si la Loi d’ordonnance pénitentiaire impose qu’un « détenu ait accès à des conditions de détention convenables selon les recommandations d’un médecin de la prison ».

M., un israélo-américain qui a été reconnu coupable d’avoir fait des canulars et menacé d’attentats à la bombe des centres juifs et d’autres cibles à travers le monde, arrive au tribunal de Tel Aviv pour entendre sa condamnation, le 22 novembre 2018. (Jacob Magid/ Times of Israël)

Malgré la réponse de l’Administration pénitentiaire recommandant le rejet du recours, le juge Avraham Yaakov a statué en faveur du père de M. le 10 juillet et ordonné qu’un examen par un expert spécialisé dans l’autisme soit prévu d’ici une semaine.

Les parents de M. ont cependant appris que la consultation avait été prévue pour la fin octobre, près de 3 mois après l’ordre du juge Yaakov.

Environ deux semaines plus tard, M. a été sanctionné pour un comportement non précisé. Le service de prison a affirmé qu’il avait mis sa propre vie, et celle d’autres détenus, en danger. M., dont le diagnostic d’autisme est bien connu de la justice, a été placé pendant 48 heures à l’isolement, où il a été attaché à un lit. On lui a aussi supprimé ses appels quotidiens pendant deux semaines et ses visites de famille ont été suspendues pendant un mois.

Quand les parents de M. sont arrivés à la prison pour leur visite hebdomadaire le 1er août, il leur a été indiqué qu’ils ne seraient pas autorisés à entrer. Un jour plus tard, un autre détenu de la prison de M. a appelé ses parents pour les prévenir de la mesure disciplinaire imposée à leur fils.

Le père de M. a déposé un recours en urgence, exigeant que les gardes de prison mettent un terme aux mesures disciplinaires contre son fils, et que la consultation d’octobre soit avancée.

En réponse, l’administration pénitentiaire a maintenu que rien dans la condamnation de M. n’empêchait les sanctions disciplinaires prises par les gardes de la prison.

Photo d’illustration d’un cordon de police au JCC de Nashsille, après que la communauté a reçu une menace de mort, le 9 janvier 2017. (Capture d’écran The Tennessean)

La semaine dernière, le juge Ido Druyan Gamlielle a rejeté le dernier recours du père et ordonné à l’administration pénitentiaire d’agir « à sa propre discrétion ».

Le père de M. a déclaré au Times of Israël qu’il avait reçu un appel téléphonique de son fils mercredi, le premier depuis des semaines, au cours duquel le jeune homme lui a dit que la surveillance était devenue tellement envahissante qu’il avait préféré être placé en confinement.

« Chaque expert psychiatrique [qui s’est penché sur cette affaire] a conclu qu’il ne devrait pas être en prison parce qu’il est autiste, et pourtant ils continuent à torturer mon fils », a-t-il dit.

En décembre dernier, Yoram Sheftel, l’avocat de M., a déposé un recours à la Cour suprême contre la condamnation de son client en juin 2018. Il a fait valoir l’argument qu’il y avait eu des erreurs importantes de la part des autorités israéliennes lors de l’interrogatoire et dans les procédures menées à l’encontre de son client.

G. et S., les parents de M., reconnu coupable de menaces d’attentats à la bombe, dans leur maison d’Ashkelon, le 26 avril 2017. (Times of Israël)

Le document de 52 pages débute en mettant en avant le fait que M. « est actuellement le seul individu atteint d’autisme qui purge une peine de prison en Israël, sans parler du fait qu’il est en détention depuis près de deux ans ». Le document continue en soulignant que les enquêteurs qui ont interrogé M. n’ont pas pris en compte son autisme et n’étaient pas compétents pour interroger un tel suspect. Le recours suggère également que la condamnation s’est basée sur des aveux de culpabilité faits par M. après son arrestation que les autorités doivent toujours présenter.

Immédiatement après qu’il a été placé en détention, les parents et l’avocat de M. ont informé les autorités que le suspect était atteint d’autisme et que, selon la loi, il devait être interrogé par un enquêteur formé à interroger des individus avec des besoins spécifiques. En outre, la loi impose qu’un tel suspect soit interrogé en présence d’un parent.

Ces provisions légales ont été violées par les autorités, a accusé Sheftel, avançant l’argument que ces vices de procédures invalidaient l’ensemble de l’enquête contre son client.

M. a été reconnu coupable de centaines d’accusation d’extorsion, de publication de fausses informations ayant causé la panique, de délits informatiques, de blanchiment d’argent, entre autres charges. En novembre, il a été condamné à purger 10 ans de prison et à payer une amende de 60 000 shekels (15 280 euros).

L’avocat Yoram Sheftel s’exprime lors d’une conférence de presse à Tel Aviv, le 1er mars 2016. (Flash90)

Les autorités ont déclaré que M. a passé plus de 2 000 appels de menaces, principalement vers des écoles, des hôpitaux et des centres communautaires juifs américains entre 2015 et 2017, en utilisant un service d’appel en ligne qui changeait le son de sa voix, lui permettant ainsi de cacher son identité. Il a aussi ciblé des centaines de compagnies aériennes et des aéroports, des centres commerciaux et des commissariats de police aux Etats-Unis, au Canada, au Royaume-Uni, en Nouvelle-Zélande et en Australie. Il a également tenté de soutirer de l’argent au sénateur d’Etat républicain Ernesto Lopez du Delaware.

En plus des menaces d’attentats à la bombe, M. a proposé des services d’extorsion sur le dark net. Des documents du tribunal présentés en août l’ont relié à un message laissé sur le site Alphabay, illicite et maintenant fermé, faisant de la publicité pour un « Service d’email de menaces à la bombe ». L’offre proposait d’envoyer des menaces personnalisées aux écoles pour 30 dollars, avec un surcoût si le client cherchait à piéger quelqu’un.

Ses menaces ont conduit à faire décoller en urgence des avions de combat, des avions commerciaux ont dû larguer du carburant et faire des atterrissages d’urgence, et des écoles ont été évacuées, entre autres nombreuses conséquences chaotiques. Dans certains cas, il aurait aussi menacé d’exécuter des enfants qu’il aurait eu en otages. La police a également retrouvé des centaines de photos et de vidéos pédophiles sur son ordinateur.

Les menaces d’attentats à la bombe, effectuées en pleine montée de l’extrême droite et de l’antisémitisme aux Etats-Unis, ont semé la peur dans les communautés juives.

Le recours déposé par Sheftel avançait l’argument que le tribunal « a ignoré ou rejeté sans réelle raison… la conclusion très claire du centre médical Hadassah, où M. a été examiné par cinq experts indépendants qui ont établi que son client disait la vérité quand il a expliqué qu’il avait réalisé les milliers de menaces parce qu’il avait l’impression que c’était ‘amusant pour les autres' », avec, par exemple, des enfants qui pouvaient quitter l’école plus tôt après ses appels.

Un adolescent juif israélo-américain, accusé d’avoir fait des dizaines de menaces d’attentats à la bombe aux Etats-Unis et ailleurs, escorté par la police alors qu’il quitte le tribunal de Rishon Lezion, le 23 mars 2017. (AFP/Jack Guez)

Une audience sur le recours a été tenue en avril, mais aucune date n’a été fixée par le tribunal pour la remise de sa décision.

En plus de sa peine de prison en Israël, M. a été mis en examen pour des accusations de crimes racistes par le Département américain de la Justice, ce qui lui fait encourir de lourdes peines de prison dans le pays.

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