Un Israélien a inspiré l’une des plus grandes découvertes de Stephen Hawking
Le scientifique Jacob Bekenstein s'est opposé à l'éminent physicien théoricien avant de coopérer avec lui sur les trous noirs
Stephen Hawking, le célèbre physicien britannique décédé mercredi à 76 ans, entretenait des relations publiques tendues avec Israël.
Bien que Hawking ait visité le pays à plusieurs reprises, donnant des conférences dans des universités israéliennes et palestiniennes, il a ostensiblement boycotté une conférence académique à Jérusalem en 2013 sur ce qu’un porte-parole de l’époque a déclaré être le « conseil unanime » de ses collègues palestiniens là-bas.
Les organisateurs israéliens se sont sentis doublement insultés, soulignant que la conférence rendait hommage au président israélien de l’époque, Shimon Peres, considéré comme un symbole international pour la paix.
Cependant, Hawking peut remercier un scientifique israélien pour certaines de ses recherches les plus révolutionnaires.
Au début des années 1970, alors que Hawking avait déjà fait un travail essentiel sur les champs gravitationnels cosmiques appelés trous noirs, il s’est trouvé en désaccord avec Jacob Bekenstein, alors étudiant en doctorat à Princeton. Bekenstein, fils de parents juifs polonais au Mexique, avait la citoyenneté israélienne et enseigna pendant 25 ans à l’Université hébraïque de Jérusalem.
Dans sa thèse de doctorat, qui a fait des vagues en 1972, Bekenstein a théorisé que les trous noirs ont une entropie, ou désordre dans leur système, et par la suite, selon les lois de la physique, une température. Hawking n’était pas d’accord, soutenant que les trous noirs ne pouvaient rien rayonner et n’avaient donc pas de température. Lors d’une conférence en France cette année-là, Hawking réunit quelques collègues et s’emporta contre Bekenstein.
« Ces trois-là étaient des personnes âgées. Je venais de terminer mon doctorat. Tu t’inquiètes de savoir si tu es stupide et que ces types détiennent la vérité », a dit Bekenstein à propos de l’événement.
Mais en 1974, Hawking a confirmé la thèse de Bekenstein par un calcul complexe de la théorie quantique. Au début, il a tenu le calcul secret, craignant d’admettre son erreur. Il a finalement rendu sa découverte publique – aujourd’hui, elle est considérée comme l’une de ses plus importantes découvertes.
Comme l’a écrit The New York Times lorsque Bekenstein est mort en 2015 d’une crise cardiaque, « sa découverte est considérée comme un repère dans la recherche, jusqu’à présent inachevée, pour réaliser le rêve d’Einstein d’une théorie unifiée de la gravité qui plie le cosmos et le chaos quantique qui y règne, ce qu’on appelle la gravité quantique. »
Aujourd’hui, l’entropie d’un trou noir s’appelle entropie de Bekenstein-Hawking, mais le rayonnement émis par un trou noir s’appelle rayonnement de Hawking-Bekenstein, ou souvent simplement rayonnement de Hawking. Cela peut sembler injuste, mais c’est une distinction nécessaire, comme Bekenstein l’a dit lui-même.
« L’entropie d’un trou noir s’appelle entropie de Bekenstein-Hawking, ce qui me paraît bien. Je l’ai d’abord écrit, Hawking a trouvé la valeur numérique de la constante, donc ensemble nous avons trouvé la formule telle qu’elle est aujourd’hui », a-t-il dit.
« Les radiations étaient vraiment le travail de Hawking. Je ne savais pas comment un trou noir pouvait rayonner. Hawking l’a démontré très clairement. Ça devrait donc s’appeler radiation Hawking. »
Certains estimaient que Bekenstein, qui portait une kippa et avait remporté le prestigieux prix Wolf d’Israël en 2012, aurait dû recevoir le prix Nobel pour sa contribution à la science (le prix n’est pas décerné à titre posthume). Mais son travail et ses liens avec Hawking perdurent : Hawking a dit qu’il voulait que l’équation d’entropie de Bekenstein-Hawking soit gravée sur sa pierre tombale.