Un projet de loi pour mieux protéger les arbres en Israël
Pour coïncider avec la fête annuelle de Tou Bishvat, le député Alon Tal soumettra un projet de loi tourné vers la nature pour rafraîchir une loi datant de 1926
Sue Surkes est la journaliste spécialisée dans l'environnement du Times of Israel.
À part les déchets laissés sur le sol et les conflits de stationnement, peu de problèmes locaux mettent les gens autant en colère que l’abattage d’un arbre bien-aimé.
Mais l’importance des arbres va bien au-delà des querelles de voisinage et des émotions humaines.
Les arbres fournissent de l’oxygène et absorbent le dioxyde de carbone. En maintenant la cohésion du sol, ils contribuent à prévenir le ruissellement des eaux de pluie, les inondations et l’érosion. Ils fournissent de l’ombre, ce qui permet de maintenir les températures basses. Et ils fournissent de la nourriture et un abri à un grand nombre de créatures qui jouent un rôle considérable dans nos écosystèmes.
C’est dans cet esprit que le député du parti Kakhol lavan, Alon Tal, soumet un projet de loi ce lundi, jour de la fête de la plantation d’arbres de Tou Bishvat, afin de créer la première loi forestière en Israël.
La plantation d’arbres et la sylviculture en Israël sont toujours régies par l' »ordonnance sur les forêts » de 1926, établie sous le Mandat britannique. Cette loi reste similaire à la version de 1921, adoptée peu après la conquête de la Palestine par les Britanniques sur les armées ottomanes lors de la Première Guerre mondiale.
« Depuis cette époque, les modifications et les amendements de l’ordonnance ont été extrêmement modestes. Compte tenu de l’importance des arbres et des forêts d’Israël pour la santé humaine, les loisirs, les corridors écologiques, la préservation des espèces et le changement climatique, il est grand temps qu’Israël adopte une législation adaptée aux défis nationaux et mondiaux du 21e siècle », a déclaré M. Tal, ancien professeur de politique environnementale et ancien président du comité qui supervise les forêts pour le conseil international du Fonds national juif (JNF/KKL).
Le projet de loi vise à renforcer et à ancrer dans la loi le statut du JNF/KKL en tant que « forestier national », un mandat qui lui a été confié par l’État en 1961.
Cette organisation a fait la une des journaux la semaine dernière pour avoir planté des arbres dans le désert du Neguev, ce qui a provoqué de violentes émeutes parmi les Bédouins locaux.
Le projet de loi d’Alon Tal vise également à créer un Conseil des forêts et des arbres, sur le modèle du plénum de l’Autorité de la nature et des parcs (INPA), du Conseil de l’Autorité de l’eau et d’autres organes statutaires chargés des ressources naturelles publiques.
Ce conseil devrait pouvoir établir la politique forestière en approuvant des plans annuels assortis de budgets à mettre en œuvre par le JNF/KKL.
Le conseil comprendrait des représentants de la communauté scientifique, des ministères concernés, de l’INPA et du grand public.
Ses sous-comités traiteront d’une série de questions, telles que la gestion forestière, l’impact du changement climatique, la recherche d’un juste équilibre entre les loisirs publics et la préservation de la nature, l’éducation du public et la prévention des incendies de forêt, selon le projet de loi.
Une fois par an, le jour de Tou Bishvat, le JNF/KKL soumettrait au conseil un rapport annuel sur la mise en œuvre de sa politique, le conseil étant autorisé à demander des détails supplémentaires. Le rapport sera rendu public.
Le projet de loi charge le ministère de l’Agriculture de tenir à jour une base de données de tous les arbres à protéger et impose des règles strictes en matière d’abattage des arbres, en veillant à ce que, lorsque des autorisations sont accordées pour l’abattage d’arbres, des arbres de remplacement soient plantés ailleurs ou qu’une compensation financière soit fournie.
Pour permettre aux citoyens de s’opposer plus facilement à l’abattage proposé d’un arbre, le projet de loi suggère de placer des panneaux sur les arbres en question ou à proximité et de créer un mécanisme de recours plus facile pour les protestataires.
Il renforce les pouvoirs d’exécution et insiste pour que les personnes reconnues coupables d’avoir causé des dommages à une forêt soient passibles d’une peine de six mois à trois ans de prison et d’une ordonnance du tribunal les obligeant à payer les réparations et la réhabilitation.
Il y a exactement un an, un rapport de la Knesset a révélé qu’entre 2013 et 2018, près de 40 000 licences ont été accordées par le commissaire aux forêts – nommé par le ministre de l’Agriculture – pour déraciner 376 000 arbres, dont plus de la moitié (204 000 arbres, soit 54,4 %) pour l’aménagement de bâtiments. Seuls 68 000 (15,3 %) devaient être replantés ailleurs.
Le ministère de l’Agriculture avait délivré ces dernières années des dizaines de milliers de licences pour abattre 376 000 arbres – dont plus de la moitié pour faire place à des projets de construction.
De 2016 à 2018, 477 cas d’abattage illégal d’arbres (d’arbres adultes) ont fait l’objet d’une enquête et 140 amendes – allant de 7 500 NIS pour un arbre à 29 200 NIS pour un groupe – ont été imposées. Cependant, plus de la moitié de ces amendes n’ont jamais été payées.
Dans une section consacrée à l’importance de la plantation d’arbres urbains pour l’ombrage, à une époque où les températures augmentent, le projet de loi adopte un modèle australien en spécifiant que les maires se fixent pour objectif de mettre 40 % de l’espace urbain à l’ombre des arbres, et soumettent des plans municipaux pour garantir la réalisation des objectifs dans les 15 ans.
Toutes les autorités de plus de 30 000 habitants commenceraient par un recensement complet des arbres avant d’élaborer des plans de plantation pluriannuels.
La loi prévoit la création d’un fonds spécial destiné à aider les autorités locales, ainsi qu’à protéger les arbres existants et à financer l’expansion des forêts. Il serait alimenté par les droits perçus pour l’abattage des arbres, ainsi que par des fonds publics et des dons.