Une artiste présente une tranche de vie juive dans ses tableaux de synagogues
La Britannique Beverley-Jane Stewart, qui expose à Tel Aviv, est fascinée par les shuls depuis l'enfance : "C'est une façon de parler du temps, un mélange d'ancien et de nouveau"
Jessica Steinberg est responsable notre rubrique « Culture & Art de vivre »
Quiconque a déjà passé du temps dans une synagogue ou une église reconnaîtra cette expérience fondatrice, parfois spirituelle, souvent communautaire dans « Halls of Prayer, The Spirit of British Jews », une collection de peintures de l’artiste britannique Beverley-Jane Stewart, actuellement exposée au Cimbalista Jewish Heritage Center de l’université de Tel Aviv jusqu’au 20 février.
C’est une exposition qui emmène les visiteurs faire un tour dans les synagogues britanniques, de la synagogue Marble Arch de conception Art Déco et de la synagogue Bevis Marks du 18e siècle à la synagogue plus moderne St. Johns Wood ou Bradford Tree of Life, construite par des immigrants allemands en 1881 dans le West Yorkshire.
Pour certains visiteurs, les peintures offrent un voyage dans le temps vers ces lieux de prière, mais il n’est pas nécessaire d’être familier avec les shuls britanniques pour s’identifier aux huiles réalistes de Beverley-Jane Stewart, qui recréent minutieusement les sanctuaires où les communautés célèbrent depuis longtemps le Shabbat, les fêtes et les rassemblements festifs.
« J’ai essayé de mettre les choses dans une perspective de temps, comment les choses se sont établies et comment c’était », explique la peintre. « Ce qui a amené les gens ici et ce qui a existé ici dans le passé. »
Chaque tableau est une myriade de détails, depuis les vitraux, les sols inclinés du sanctuaire et les lustres éclairés par de vraies bougies jusqu’aux fidèles eux-mêmes, vêtus de cravate noire ou de jeans et de pulls, selon la synagogue.
Beverley-Jane Stewart peint de mémoire et à partir des photographies qu’elle prend lors de ses visites afin de capturer les détails.
Ses œuvres couvrent des années de travail sur ces peintures, mais ce n’est que lorsqu’elle a rencontré les conservateurs Vera Pilpoul et Ram Ozeri qu’ils ont commencé à constituer une collection pour l’exposition, ajoutant même certaines des esquisses qu’elle avait reléguées à la poubelle.
C’est Ozeri, le fondateur de la Biennale d’art juif contemporain de Jérusalem où Beverley-Jane Stewart a exposé « Balfour Accomplished » en 2017, qui a pensé à rassembler les œuvres de l’artiste.
Le résultat de leur collaboration est ce coup d’œil unique sur le voyage historique que Stewart a entrepris depuis 1986, lorsque sa propre synagogue d’enfance à Brixton a fermé, lui servant une tranche d’histoire sociale sur un plateau.
La fascination de Stewart pour les synagogues et les communautés qu’elles forment a commencé dès son enfance. Elle dit avoir grandi dans une famille juive traditionnelle et avoir fréquenté régulièrement la synagogue avec sa mère, qui était l’assistante sociale non officielle de la communauté.
Stewart a suivi une formation d’enseignante mais a toujours peint, créant des œuvres sur la vie communautaire des Juifs britanniques. Elle a parcouru sa ville natale, Londres, ainsi que toute l’Angleterre, visitant des synagogues et explorant l’histoire et le contexte des communautés juives.
Certaines de ses œuvres comprennent des scènes séparées sur les côtés ou en bas des tableaux montrant l’extérieur des synagogues, ou des vues de rue qui décrivent les lieux dans leur ensemble – comme la mer et le port à Exeter ou les marchés de laine à Plymouth.
« J’ai découpé des tableaux pour montrer à quoi tout cela ressemblait », indique l’artiste. « Cela parle aux gens du temps, un mélange d’ancien et de nouveau ».
Bradford Tree of Life est une synagogue réformée construite par des immigrants juifs allemands, la première du genre. Sa représentation par Stewart raconte l’histoire de la communauté, dont beaucoup étaient des commerçants et des marchands de laine, conformément à la région.
À côté, un tableau de l’East End de Londres et sa collection de shuls, dont certaines sont désormais fermées. Ses couches riches et denses de détails extérieurs montrent les rues et les commerces voisins, un cimetière et, dans un coin, une vague image du « Violon sur le toit » de Marc Chagall, en référence aux interrogations de Stewart elle-même quant à la survie des communautés juives de l’East End et à leur maintien à Londres.
Pour l’instant, elles demeurent, ainsi que leurs synagogues.
L’exposition « Halls of Prayer » est visible jusqu’au 20 février. Elle se déplacera ensuite à la synagogue et au musée de Casale Monferrato, en Italie, en mars 2020.