Une journaliste qui défend l’écrivain Matzneff accusée d’antisémitisme
La journaliste Josyane Savigneau a appelé une autre journaliste, Anne Rozenberg, qui condamne l'écrivain, "à plus de réflexion sur les dénonciations" en raison de son nom
Le 2 janvier paraîtra le livre Consentement de Vanessa Springora, éditrice, dans lequel elle dénonce la pédophilie de l’écrivain Gabriel Matzneff et raconte comment elle a été séduite par le presque quinquagénaire au milieu des années 1980, alors qu’elle était âgée de 13 ans.
La sortie de l’ouvrage a déclenché une vive polémique au sein de la société française et dans le milieu littéraire.
Dans le cadre de la même polémique, une autre a éclaté, celle-ci touchant la journaliste Josyane Savigneau, longtemps journaliste au Monde, ancienne rédactrice en chef du service Culture, critique littéraire, membre du jury du prix Femina, travaillant aujourd’hui pour la radio juive RCJ, Lire et la revue Nomade.
Commentant les propos de Denise Bombardier, romancière et vive critique de l’écrivain depuis les années 1990 et leur passage dans l’émission « Apostrophes » de Bernard Pivot, Josyane Savigneau a écrit sur Twitter : « Soutenir Denise Bombardier est la dernière chose qui me viendrait à l’esprit. J’ai toujours détesté ce qu’elle écrit et ce qu’elle dit et je ne change pas d’avis sur Matzneff parce que la chasse aux sorcières a commencé. Et lui sait écrire au moins. Bombardier, quelle purge ! »
« Quelqu’un à dénoncer ? En France c’est depuis longtemps un sport national. Mais ça s’aggrave, comme à la pire époque de la Deuxième guerre mondiale », a-t-elle ajouté dans un autre message.
En réponse à un autre message de Josyane Savigneau prenant la défense de Gabriel Matzneff (« La chasse aux sorcières continue. Et Denise Bombardier devient une référence »), la journaliste Anne Rozenberg a écrit : « Vos propos me dégoûtent et je me suis désabonnée de vous. Je n’ai pas attendu que vous le fassiez. Immonde. »
Ce à quoi a répondu Josyane Savigneau : « Tant mieux car j’allais le faire. Votre nom aurait dû vous inciter à plus de réflexion sur les dénonciations »
« Voici une copie d’écran de l’échange eu avec Josyane Savigneau aujourd’hui. Je lui ai exprimé mon horreur de Matzneff et de la pédophilie. Elle m’a répondu par de l’antisémitisme. Gloire et décadence… », a conclu Anne Rozenberg, visée en raison de son nom aux consonances ashkénazes.
@ASchwartzbrod Bonsoir, voici une copie d’écran de l’échange eu avec Josyane Savigneau aujourd’hui. Je lui ai exprimé mon horreur de Matzneff et de la pédophilie. Elle m’a répondu par de l’antisémitisme. Gloire et décadence… pic.twitter.com/s21aNKg96I
— Anne Rozenberg????️ (@AnneRozenberg) December 28, 2019
« Ou comment rédiger son tweet de démission du jury du prix Fémina », a commenté le compte « ParisPasRose », suivi par 65 000 personnes, politiquement marqué à gauche, suite au message antisémite.
« Vous avez vraiment comparé la dénonciation des Juifs (qui a conduit à leur extermination) au fait de souligner qu’un pédocriminel se vante de violer des enfants ? mais retirez votre twit et excusez vous. Vous êtes immonde », a commenté Valérie Rey-Robert, auteure et militante féministe.
Le livre Consentement de Vanessa Springora sort dans un contexte de dénonciation des violences sexuelles en France, après une nouvelle accusation de viol visant le réalisateur franco-polonais Roman Polanski et celles d’agressions et de harcèlement sexuels de l’actrice Adèle Haenel à l’encontre du cinéaste Christophe Ruggia.
Interrogé, l’écrivain Gabriel Matzneff a expliqué qu’il avait eu avec Vanessa Springora une relation consentie et a fait part de sa « tristesse ».
« Apprendre que le livre que Vanessa a décidé d’écrire de mon vivant n’est nullement le récit de nos lumineuses et brûlantes amours, mais un ouvrage hostile, méchant, dénigrant, destiné à me nuire, un triste mixte de réquisitoire de procureur et de diagnostic concocté dans le cabinet d’un psychanalyste, provoque en moi une tristesse qui me suffoque », a commenté auprès de L’Obs l’écrivain français, aujourd’hui âgé de 83 ans, récompensé par le Prix Renaudot de l’essai en 2013.