Une plainte contre « X », 75 ans après la « rafle du Vieux-Port » à Marseille
Près de 800 juifs ont été envoyés à la mort dans les camps d'exterminations nazis, et tout un quartier populaire baptisé "la petite Naples" a été vidé de force
Soixante-quinze ans après « la rafle du Vieux-Port », quatre survivants et quatre descendants portent plainte contre « X » pour crime contre l’Humanité, espérant retrouver d’éventuels responsables encore en vie des persécutions et du transfert forcé d’au moins 20 000 Marseillais.
« Cette plainte est tardive, mais elle doit permettre de reconnaître les victimes pour ce qu’elles sont. Il y a une très grande pudeur dans les familles, on ne parlait pas de ces plaies et elles sont restées ouvertes. Aucun tribunal n’a jamais jugé ce qu’il s’est passé à Marseille » début 1943, a expliqué à l’AFP l’avocat marseillais Pascal Luongo, dont le grand-père a fait partie des victimes de cette rafle assez méconnue.
Entre les 22 et 24 janvier 1943, une série de rafles ont été conduites dans les vieux quartiers de Marseille sur ordre des nazis, Hitler ayant décidé « d’épurer » le « chancre de l’Europe », avec la participation de la police française.
Près de 800 juifs ont été envoyés à la mort dans les camps d’exterminations nazis, et tout un quartier populaire baptisé « la petite Naples », derrière le Vieux-Port, a été vidé de force de ses habitants, pour beaucoup des immigrés italiens, puis dynamité.
Cette opération Sultan « a conduit à l’évacuation d’environ 20 000 personnes, la destruction de 1 500 immeubles sur 14 hectares et le transfert forcé de 12 000 personnes dans un camp de rétention à Fréjus (Var) », rappelle la plainte, révélée mardi par le site d’information Marsactu.
« Huit cents personnes parmi ces 12 000 seront déportées en Allemagne, notamment au camp de concentration d’Oranienburg-Sachsenhausen (…) et certaines y périront », poursuit cette plainte, rédigée par Me Luongo.
« Cette population civile, ciblée pour son lieu d’habitation et ses origines, a vécu des arrestations arbitraires, persécutions, transferts forcés, déportations et atteintes volontaires à la vie, autant d’actes inhumains dans un plan concerté pour le compte d’un Etat, l’Allemagne nazie, mais aussi de l’État français de Vichy », poursuit le document, envoyé au parquet de Paris, compétent pour les crimes contre l’Humanité, qui sont imprescriptibles.
« Les derniers survivants attendent justice et humble reconnaissance de leurs souffrances », et conservent l’espoir de retrouver des responsables ou complices, anciens soldats allemands et policiers français, ou mettre en cause des personnes morales et Etats allemand et français.