US : Des vidéos de Peres et Netanyahu pour sensibiliser les électeurs juifs démocrates
Les soutiens de Clinton cherchent à capitaliser sur les inquiétudes des Juifs républicains concernant Donald Trump en particulier dans les Etats encore indécis
Eric Cortellessa couvre la politique américaine pour le Times of Israël

WASHINGTON — Moins d’une semaine avant que l’Amérique n’apporte sa conclusion à une élection qui s’est avérée la plus conflictuelle de mémoire récente, le super PAC du National Jewish Democratic Council, ‘Jews for Progress’ est en train de lancer une campagne de publicité cherchant à élargir l’appel d’Hillary Clinton aux Juifs américains.
La méthode : En montrant des dirigeants israéliens issus de tout le spectre politique saluant la candidate démocrate à la présidence, porteuse d’espoir pour ses aptitudes à la gouvernance et pour l’intérêt qu’elle porte envers l’état juif – et en soulignant les controverses qui ont entaché la campagne du candidat républicain Donald Trump dans la course à la Maison Blanche.
Une vidéo publicitaire montre ainsi le Premier ministre Benjamin Netanyahu, la parlementaire issu de l’Union sioniste Tzipi Livni, l’ancien chef de gouvernement Ehud Barak et feu l’ex-Premier ministre et président Shimon Peres exprimer leur admiration pour l’habileté diplomatique de Clinton.
“Hillary m’a toujours surpris”, explique Peres dans une interview accordée à C-SPAN et reprise par la campagne, « en comprenant que la paix exige de la patience et que la paix exige de la compréhension et non pas des impositions ».
Après Peres, Netanyahu cite un cessez-le-feu en 2012 négocié par Clinton après un embrasement violent entre Israël et le Hamas à Gaza durant son mandat de secrétaire d’Etat.
“Hillary Clinton est une dirigeante forte et déterminée”, dit-il. « Elle a des principes et elle est pragmatique. Elle sait comment faire pour accomplir une mission ».
La vidéo, qui a été envoyée mercredi par courriel à plus de 50 000 foyers juifs en Floride, accompagnée d’une lettre écrite par le fils de l’ancien Premier ministre israélien Yitzhak Rabin, Yuval, comprend également des témoignages de la part de leaders américains passés et présents, dont le sénateur républicain John McCain et l’ancien secrétaire d’Etat Henry Kissinger.
Environ 5 % de la population de cet état qui sera déterminant lors de la bataille électorale finale est juive, ce qui fait de la communauté un éventuel changeur de donne qui peut faire basculer l’équilibre des votes du Collège électoral si l’élection s’avère ardue.
Mercredi, les deux plus importants conseillers de Trump sur Israël ont livré un plan détaillé promettant une assistance au pays qui va au-delà de ses niveaux actuels mais ne promet pas de dénoncer l’accord nucléaire de l’Iran.
Ce plan en 16 points qui a publié mercredi sur la plate-forme de publication Medium par David Friedman et Jason Dov Greenblatt, reflète les promesses faites par Trump. Dans certains cas, toutefois, les propositions vont au-delà des engagements qu’il avait pris – particulièrement sur l’aide à la défense, qui va au-delà du niveau actuel.

L’un des fondateurs de ce PAC de gauche, Ron Klein, un ancien membre du Congrès de Floride et ancien président du NJDC, a expliqué au Times of Israel que le groupe cherchait à ce que les gens ayant “une connexion forte avec la communauté juive” valident Clinton en tant que personnalité respectée par des leaders israéliens aux orientations idéologiques différentes.
« La plupart des Juifs aux Etats-Unis comprennent qu’il y a des différences d’opinion en Israël, du Likud au parti travailliste et autres formations, et que les personnalités qui sont présentées ici connaissent Hillary Clinton et ont travaillé avec elle », a-t-il indiqué dans un entretien.
« C’est le contraste entre elle, qui a travaillé avec ces gens, et quelqu’un qui est considéré comme instable et indigne de confiance, qui dit une chose et son contraire quand il s’agit d’Israël et de la politique au Moyen-Orient ».
Dans une autre vidéo, l’ancien sénateur du Connecticut Joe Lieberman, qui était presque devenu le premier vice-président des Etats-Unis juif lors du scrutin de 2002, fait également part de son soutien à Clinton, affirmant qu’elle a un “bagage pro-israélien fort et consistant ».
Lieberman s’est illustré au cours de la campagne, envoyant des appels automatisés à 11 000 foyers juifs de Floride et faisant part de son appui sans faille à la candidate démocrate dans cet état essentiel.
Lieberman était devenu indépendant en 2006, abandonnant le parti Démocrate. Il avait appuyé la candidature de John McCain face à Barack Obama dans la course à la présidence de 2008.
Tandis que cette campagne de publicité se déploie fortement en Floride, elle est également lancée dans d’autres états encore en jeu et dotés de populations juives susceptibles de faire la différence le jour de l’élection. Il s’agit de l’Ohio, la Pennsylvanie, l’Arizona, le Nevada et le Wisconsin.
“Nous tentons d’influencer les électeurs qui peuvent encore être convaincus dans les états indécis. Nous avons un bon sentiment apriori sur la manière dont les Juifs voteront à New York et en Californie », a indiqué au Times of Israel l’ancien président du NJDC Marc Stanley. « Alors la vraie question, c’est de savoir comment les Juifs voteront dans l’ Ohio, en Floride, en Pennsylvanie, dans le Nevada, dans le Wisconsin, etc.”
‘Jews for Progress’ a également distribué des flyers rappelant les gros titres issus des controverses de Trump, le soutien dont il a bénéficié de la part des chefs du Ku Klux Klan et son tweet d’une photographie de Clinton avec une étoile à six pointes apparaissant en surimpression sur de l’argent et une légende disant « La candidate la plus corrompue que cela n’avait jamais été le cas ! »
“Les Juifs ont une très grande sensibilité historique concernant la démagogie raciste et populiste”, explique Klein, qui insiste sur le fait que les Juifs ont reconnu en Trump les échos de l’Allemagne de 1930. « Ils savent que l’ascension de Hitler était due en partie et en des circonstances différentes à con côté populiste et démagogue. Les Juifs sont hypersensibles à cela et à juste titre. »
“Nous avons une longue histoire de persécutions et de discrimination, et quand nous voyons cela, nous comprenons que s’ils parlent d’un groupe un jour, ils pourront parler de nous le lendemain”, ajoute-t-il.
Klein déclare qu’il ne pense pas que Trump soit antisémite, mais explique “qu’en s’entourant de gens qui le soutiennent ou qui pensent que ce qu’il dit est cohérent avec leurs propres convictions – qu’il s’agisse du Ku Klux Klan ou de qui que ce soit d’autre : voilà qui est une grande inquiétude pour la communauté juive. Nous prêtons énormément d’attention à ce signal”.

‘Jews for Progress’ a été lancé en juillet 2016 durant la Convention Nationale Démocrate. Créé par Klein, Stanley, l’ancien président du NJDC Michael Adler, l’ancien directeur démocrate des Finances et responsable de l’AIPAC Fran Katz Watson et le collecteur de fonds démocrate Steve Paikowsky, il a été désigné pour diriger “une campagne hautement ciblée dans les états indécis déterminants, où un glissement dans le vote juif parviendrait à inverser la tendance lors des élections présidentielles”.
Avec les acteurs du DC Steve Rabinowitz et Aaron Keyak de Bluelight Strategies à la tête des opérations quotidiennes du PAC, une partie de l’objectif est de ruiner les efforts livrés par la Coalition Juive Républicaine visant à ternir l’image de la candidate démocrate aux yeux des électeurs juifs.
Le président Barack Obama avait perdu neuf points de pourcentage parmi les électeurs juifs entre 2008 et 2012, passant de 78 % à 69 %, selon les estimations.
Le modèle du PAC est largement basé sur “The Hub,” un outil réactif de communications créé par Rabinowitz et Keyak et géré en 2012 qui livrait des réponses rapides à des questions éventuelles concernant le candidat d’alors, Barack Obama, sur les problèmes liés à Israël ou aux Juifs.
Au début de l’année, la RJC s’était engagée à dépenser 25 millions de dollars dans la course à la présidence mais la candidature de Trump avait entravé la levée des fonds parmi les donateurs juifs républicains, à l’exception remarquée des deux plus grands appuis financiers du candidat – le magnat des casinos et milliardaire Sheldon Adelson et Bernard Marcus, fils de migrants juifs de Russie et co-fondateur de Home Depot.
“Il n’y a pas eu de formidable soutien juif à la base pour Trump, et nous n’avons assisté à aucun appui de donateur juif républicain en sa faveur”, affirme Stanley.
Adelson, qui a donné la semaine dernière la somme de 10,5 millions de dollars pour soutenir la candidature de Trump, ce qui représente une nette baisse par rapport à l’estimation faite des fonds qu’il avait investi dans la campagne de Mitt Romney en 2012, a promis une aide de dernière minute de 25 millions de dollars il y a trois jours.
“Cet argent n’a pas été particulièrement concentré sur les Juifs en fait”, dit Stanley au sujet des donations d’Adelson cette année. « Il adopte une approche bien plus sommaire dans les états clés ».