Voici la mère juive qui a inventé le vernis à ongles OPI
Dans son nouveau livre, "Je ne suis pas vraiment une serveuse," Suzi Weiss-Fischmann parle de son parcours pour devenir la Première dame des ongles
JTA via Kveller — Suzi Weiss-Fischmann, âgée de 65 ans, avait l’habitude de se ronger les ongles. C’était un tic nerveux et chronique, et il fallait que cela cesse. Après tout, elle était la co-fondatrice et la directrice créative d’une entreprise mondiale de vernis à ongles, et s’arracher les peaux mortes ne faisait pas bonne image pour cette femme qui travaille dans l’industrie de la beauté.
C’est l’une des petites informations amusantes de Je ne suis pas vraiment une serveuse, le nouveau livre de Weiss-Fischmann sur son parcours depuis son enfance de la Hongrie communiste – où elle apprenait l’hébreu en secret avec un rabbin – jusqu’à être reconnue dans le monde entier comme la Première dame des ongles.
Une survivante de la Shoah de la deuxième génération, Weiss-Fischmaan est la fière mère juive derrière OPI, la plus grande marque de vernis à ongles connue pour ses noms de couleur recherchés. Quand elle a lancé l’entreprise avec son beau-frère, George Schaeffer, dans les années 1980, les deux ne connaissaient rien au vernis à ongles. Alors pourquoi se sont-ils lancés dans l’industrie de la manucure ?
L’industrie de l’ongle avait besoin d’une touche de glamour, et avec l’oeil de Weiss-Fischmann pour marier les couleurs, le duo a sauté sur l’occasion qui se présentait devant eux. C’est ainsi qu’OPI – qui signifie Odontorium Produits Inc. – est né.
La carrière de Weiss-Fischmann en fait rêver plus d’un, mais l’idée de créer des noms ironiques pour des couleurs audacieuses de vernis à ongles comme « Une raison de liaison » et « Un Moment papillon » n’est qu’une infime partie de ce que la prêtresse de la beauté a fait pour OPI. (Weiss-Fischman a vendu OPI à Coty en 2010, mais elle demeure une ambassadrice de la marque et elle a toujours la mission de trouver un nom aux couleurs).
Dans Je ne suis pas vraiment une serveuse – le titre est aussi le nom d’une couleur iconique de vernis à ongles – Weiss-Fischman raconte son parcours pour changer la donne dans l’univers de la beauté.
Kveller s’est entretenu avec celle qui va bientôt devenir grand-mère pour parler des valeurs juives qui ont influencé le succès d’OPI et pour lui demander comment elle a obtenu le titre de Première dame des Ongles.
Au début de votre livre, vous parlez – contrairement aux Etats-Unis – du fait d’avoir grandi dans un environnement où les femmes avaient des carrières et ne dépendaient pas sur leurs maris pour leur revenus. Comment cela a-t-il affecté votre personnalité, votre carrière ?
Les femmes n’ont aucune limite. Les seules limites sont celles que vous vous fixez vous-mêmes. J’ai grandi dans un environnement où les femmes étaient médecins, ingénieurs, avocates, et elles avaient toutes étudié à l’université.
Les hommes avaient l’air de perdants, ou peut-être d’avoir moins réussi. Je n’ai jamais eu le sentiment que je ne pouvais pas faire quelque chose, et quand quelqu’un faisait une remarque stupide, cela ne m’affectait pas.
Les noms humoristiques du vernis d’OPI sont légendaires. Parlez-moi des réunions organisées pour choisir les noms des collections d’OPI.
Les noms étaient une partie énorme de l’ADN de la marque. Le choix du nom se basait sur la géographie, et bien sûr, nous aimons manger, alors nous voulions toujours goûter la nourriture de la ville ou du pays respectif que la collection cherchait à représenter, et ensuite, tout était une question de s’amuser.
Je veux dire que nous choisissions littéralement des noms dingues – bien sûr, certains sont inavouables, pour des raisons évidentes. Mais, c’était un processus démocratique. Alors on écrivait les noms sur un tableau, et l’équipe votait.
C’était le moment phare de chaque collection et de chaque saison. Je pense qu’au fil des ans, nous avons continué à faire de mieux en mieux. Les noms vieillissent comme le vin – ils deviennent plus drôles avec le temps.
Parfois, j’allais dans des salons et je regardais les gens anticiper les nouvelles couleurs d’une collection. Mais comme ils étaient impatients de découvrir les nouvelles couleurs, ils retournaient toujours le flacon pour voir son nom. C’est ce qui créait un lien personnel avec OPI. C’était si important pour nous de garder la fidélité du consommateur.
Parlez-moi de l’ADN d’OPI, l’importance d’actions caritatives, et comment vos valeurs juives ont influencé votre leadership
Mon père disait les choses très simplement : tu donnes, et tu reçois. Et c’est ce qui s’est toujours passé dans ma vie. Nous étions très charitables.
Tout particulièrement en tant d’immigrants, nous savons ce que ce pays a donné à ma famille, et à la famille de George. Les gens demandent toujours, « que peut-on faire pour améliorer sa vie ? » et je dis toujours que si l’on peut, il faut faire des dons, ou aider quelqu’un à avancer dans sa vie.
Si vous pouvez faire la différence dans la vie de quelqu’un, vous avez fait du bien.
Qui sont vos modèles ?
Mes parents. Ma mère est une petite femme incroyable, elle est si forte. Je veux dire que c’était mon héroïne. Mon père était un père très aimant, très orienté vers la famille. Au niveau du travail, c’était George Schaeffer, mon beau-frère. C’était un homme d’affaires génial, et il m’a appris beaucoup de choses. Dans la mode, j’aime Chanel. En ce qui concerne les dirigeants politiques, je dirais Golda Meir. Je ne la mentionne pas seulement parce que c’est une femme. Je pense qu’elle était une dirigeante fantastique, et c’est un modèle pour toutes les femmes, pas seulement les femmes juives.
Dans votre livre, vous parlez des dîners de Shabbat que vous organisez chaque semaine. Donnez-nous plus de détails.
Le dîner de Shabbat était quelque chose de très important dans notre vie. Vendredi soir, le dîner permet de faire le lien entre tous les événements de la semaine. Mon fils n’a pas fréquenté de lycée juif, les matchs de football avaient habituellement lieu le vendredi soir. Il pouvait y aller, mais seulement après le kiddoush, le motzi et le dîner.
Je pense que c’est très important de faire grandir des enfants avec quelque chose de constant dans leurs vies, une sorte de discipline qui donne du sens à la semaine. Les traditions comme avoir une soukka, les seders de Pessah et Rosh HaShana ont toujours fait partie de la vie de mes enfants, et j’espère qu’ils auront des enfants qui continueront à avoir les mêmes traditions.
En tant que mère qui travaille, vous expliquez que vous aviez peu de temps pour manger avec vos enfants ou pour aller les chercher à l’école. Pourquoi était-il aussi important de prendre du temps sur votre semaine pour faire vos ongles ?
Il faut savoir définir ses priorités. Il faut aussi faire certaines choses pour soi-même, parce que vous savez, nous les femmes, nous pouvons faire plusieurs choses à la fois. Nous pouvons faire tellement de choses : nous gérons la maison, nous nous occupons du budget, nous prévoyons les repas. Je veux dire qu’il faudrait inventer un nouvel adjectif pour décrire ce que les femmes font.
Alors parfois, il faut prendre quelques minutes, ou une heure, juste pour soi-même. Faire une manucure ou une pédicure est toujours un moyen de tout oublier parce que, vous savez, on a un petit massage et cela vous fait du bien un instant.
J’ai adoré tout ce que j’ai fait avec OPI, mais mes enfants et mon mari sont ma plus grande passion. La famille est toujours en première position. C’est comme cela que j’ai grandi, et dans ce monde de dingues, c’est votre famille qui est toujours là.
A la fin du livre, vous expliquez que votre nouvelle passion est de transmettre tout ce que vous avez appris pendant votre voyage avec OPI à la prochaine génération, l’dor v’ador. Pourquoi est-ce si important pour vous de partager votre histoire ?
Je pense que raconter son histoire est très important. J’ai le sentiment qu’il est de mon devoir de former des nouveaux leaders qui sont dans ce domaine d’activité, et la philanthropie.
C’est si important de pouvoir partager avec d’autres gens et d’inspirer d’autres personnes pour faire de grandes choses. Et j’ai le sentiment que c’est ce que je peux faire de mieux maintenant. Il ne faut pas sous-estimer l’importance de la transmission de son histoire.
Et nous les femmes, que faisons-nous le mieux quand nous nous réunissons ? Nous racontons des histoires.