Yad Vashem: expo en ligne pour les 80 ans du début de la Seconde Guerre mondiale
"1939 : les familles juives au seuil de la guerre" explore la vie des communautés juives alors qu'elles n'imaginaient pas encore les atrocités que la guerre causera
Jessica Steinberg est responsable notre rubrique « Culture & Art de vivre »
Quatre-vingts ans se sont écoulés depuis le début de la Seconde Guerre mondiale, le 1er septembre 1939, un anniversaire célébré par Yad Vashem avec une nouvelle exposition en ligne relatant les expériences vécues par une dizaine de familles juives au cours de premiers mois du conflit, alors qu’il ignorait les événements qui allaient en découler.
L’exposition « 1939 : les familles juives au seuil de la guerre » décrit l’évolution de la guerre à l’aide de documents, de photographies et d’objets de l’époque de la Shoah issus des archives de Yad Vashem, dont beaucoup ont été donnés par des survivants de la Shoah et leurs familles.
Une page du journal intime écrit par Mira Zabludowski en septembre 1939 relate ses pensées au cours des premiers mois de l’occupation allemande de Varsovie. Elle avait déjà immigré vers la Palestine pré-État et était en visite chez ses parents à Varsovie au moment où la guerre a éclaté.
« Il est 16 heures. Le son des tirs d’artillerie se poursuit sans interruption depuis vingt heures. Le bruit des mitraillettes et le tonnerre des avions se répercutent dans les airs et accentuent la terreur. J’ai mal aux oreilles et à la tête. Vous ne pouvez pas entendre ce qui se dit. Juste boum ! boum ! boum ! Un pâté de maisons dans le centre-ville est en feu. Soudain, il y a un bruit terrible, puis des gémissements et des cris – des maisons s’effondrent dans la vieille ville et nous courons sauver les morts enterrés vivants sous les décombres. Soudain, le ciel s’est assombri – un nuage de fumée est descendu sur la ville. »
Zabludowski a fui la Pologne et est retournée en Israël. Son père est décédé en juillet 1940 à Varsovie, tandis que sa mère a été déportée avec d’autres membres de la famille à Treblinka.
Une photographie montre la famille Majer de Belgrade, représentant Refael et Rivka Majer, ainsi que leurs huit enfants et petits-enfants, endimanchés, pour un dernier instant de bonheur capturé avant la guerre.
Sur les 21 personnes figurant sur la photo de famille, une est décédé avant la guerre, 19 ont été tuées pendant la Shoah et une seule a survécu : Isabella Baruch, la fille de Refael et Rivka.
Après l’occupation de Belgrade par les Allemands, les Majer n’ont pas eu l’impression d’être en danger, selon Yad Vashem.
Les membres les plus âgés de la famille se souvenaient que les Allemands s’étaient comportés convenablement pendant la première guerre mondiale et ils avaient supposé qu’ils allaient traverser les événements comme ils l’avaient fait la première fois.
Moins d’un an après l’invasion allemande, 90 % des Juifs de Belgrade avaient été exterminés, y compris la plupart des membres de la famille Majer.
« Même 80 ans plus tard, il est encore difficile de comprendre l’énorme décalage entre la vie juive d’avant-guerre et son destin tragique pendant la Shoah », a déclaré la chercheuse et conservatrice de Yad Vashem, Yona Kobo.
« Nous voyons des familles de Yougoslavie, d’Allemagne, d’Autriche, de Pologne, de Roumanie, de Grèce et de Tchécoslovaquie aux plus beaux moments de leurs vies – mariages, naissances et autres événements joyeux – mais également en train de chercher des voies de sortie, luttant pour faire face à la détérioration de leur vie quotidienne – et au final, le massacre de masse des Juifs sans distinction entre hommes, femmes et enfants », a-t-elle déclaré.