Yoaz Hendel fustigé pour des propos sur les Juifs mizrahis
Le député Kakhol lavan insiste : sa remarque sur le melting-pot israélien n'était pas railleuse ; les politiciens arabes et de droite l'accusent de racisme et d'ignorance
Les propos tenus par un législateur du parti Kakhol lavan sur la culture des Juifs arabes et mizrahis ont entraîné l’indignation et des accusations de racisme parmi les politiciens issus des formations rivales, vendredi, bien qu’il ait insisté pour dire qu’il n’avait jamais voulu défendre la suprématie ashkénaze.
Yoaz Hendel, l’une des personnalités les plus à droite du parti centriste qui avait été, dans le passé, directeur des communications du Premier ministre Benjamin Netanyahu, a dit à Haaretz au cours d’un entretien que, parmi les Juifs qui avaient immigré au sein d’Israël pour former l’Etat, « certains sont arrivés ici avec une mentalité issue des concerts de Vienne et d’autres avec une mentalité issue des darbukas [instrument de percussion des pays arabes] ».
Le député évoquait la nécessité d’une culture israélienne partagée et spécifiquement son refus d’accepter la « culture du chaos » qui, croit-il, existe dans le secteur arabe.
Ces propos sur les darbukas, des instruments importants dans les musiques juives d’ascendance mizrahie, ont été qualifiés de propos dénigrants par les politiciens de droite.
L’appartenance ethnique est un sujet sensible dans la politique israélienne. Les Juifs mizrahis (les descendants des immigrants venus des pays arabes) déplorent depuis longtemps une discrimination institutionnalisée au sein de l’establishment, perçu comme étant dominé par les Ashkénazes, les Juifs d’origine européenne.
Le Likud a mis en cause « l’attitude » de Hendel « envers ceux qui sont retournés chez eux, en terre d’Israël, amenant une grande culture, une culture riche avec eux. Il devrait avoir honte ».
https://youtu.be/yux4e66MAIY
Le ministre de l’Education Rafi Peretz, du parti Yamina, a expliqué être « fier d’appartenir à la culture des darbukas ». Yaakov Mergui, député du parti Shas, a éreinté la « condescendance » de Hendel et noté que les Juifs mizrahis provenaient d’une grande tradition comprenant « Maïmonide, les sciences et la médecine » et il l’a accusé de racisme.
Pour sa part, le législateur Ayman Odeh, à la tête de la Liste arabe unie, a clamé que « la théorie de Hendel sur la suprématie européenne » s’effondrait d’elle-même avec « l’ignorance et le manque de culture qu’il a montrés dans son interview avec Haaretz. »
Hendel lui-même a insisté sur le fait qu’il n’avait pas voulu dire qu’une culture était préférable aux autres mais plutôt qu’il « y a des milliers de couleurs et de nuances en Israël et c’est une bonne chose… Et au fait, je préfère les darbukas à la musique classique… Quiconque pourrait estimer qu’une culture musicale est préférable à une autre a un problème. Je ne suis pas comme ça pour ma part ».
Mais un député de Kakhol lavan l’a toutefois critiqué samedi. Ofer Shelah a estimé que Hendel avait « eu des mots malheureux qui n’auraient jamais dû être prononcés. Ils ne reflètent en aucune façon l’esprit de Kakhol lavan ».
Dans l’entretien, Hendel a également déclaré qu’Israël était de loin plus cultivé que les pays avoisinants.
« Je pense que la culture arabe, autour de nous, est une jungle. Il y a des violations flagrantes, là-bas, de tous les droits de l’Homme que nous connaissons dans la culture occidentale. Ces droits n’ont pas seulement fait leur apparition là-bas. Ils n’ont pas atteint ce stade de l’évolution où émergent les droits de l’Homme », a-t-il asséné.
« Il n’y a pas de droits des femmes, pas de droits pour les LGBT, pas de droits pour les minorités, pas d’éducation. La plupart des Etats arabes sont des dictatures en échec ».
Il a ajouté que l’Etat juif n’avait pas besoin de s’accommoder des aspects problématiques de la culture arabe.
« En fin de compte, la formation d’une certaine culture fait partie d’un Etat démocratique juif qui va de l’avant. Il ne s’agit pas seulement de culture musicale – mais aussi d’une culture d’organisation, de gestion, de gouvernement, et nous devons nous attacher à cette culture », a poursuivi Hendel.
« Je n’accepte pas une culture du chaos. Je n’accepte pas qu’il y ait 4 000 structures illégales par an dans les communautés arabes du Negev ou de la Galilée, je ne veux pas de la bigamie dans la société arabe, je n’accepterai pas les crimes d’honneur. Je n’accepterai pas de nuisances faites aux droits des LGBT ou aux droits des femmes », a-t-il affirmé.
Hendel s’est également exprimé contre son ancien allié Netanyahu qui, selon lui, est dorénavant plus intéressé par le pouvoir que par l’idéologie.
« Il n’a aucune limite. Peut-être que c’est parfois nécessaire mais je ne veux pas d’un tel Premier ministre », a indiqué Hendel. « Nous ne pouvons pas accepter que le culte de la responsabilité vienne remplacer l’idéologie ».
Kakhol lavan et le Likud continuent à être au coude à coude dans les sondages en amont des élections du mois de décembre – le premier conservant une légère avance.
Mais aucune des deux formations ne devrait être en mesure de former facilement une coalition de majorité après le vote national, tout comme cela avait été le cas au cours des scrutins du mois d’avril et du mois de septembre de l’année dernière, et il n’est pas certain que le vote permette de sortir de l’impasse politique sans précédent qui frappe Israël.
Yisrael Beytenu et son chef, Avigdor Liberman, conservent le rôle d’arbitre entre les blocs de droite et de centre-gauche à la Knesset.
Netanyahu a été officiellement mis en examen pour corruption la semaine dernière, ce qui fait de lui le premier chef de gouvernement israélien à être inculpé dans l’exercice de ses fonctions.
Kakhol lavan a fait savoir qu’il ne rejoindrait pas un gouvernement dirigé par Netanyahu tant que ce dernier serait soupçonné d’actes pénalement répréhensibles.