116 000 membres du Likud appelés à voter à la primaire du parti
Plus de 100 bureaux de vote sont ouverts ce jeudi de 9 à 23 heures ; Résultats attendus vendredi matin
Les membres du Likud (droite) de Benjamin Netanyahu sont appelés à élire jeudi leur nouveau chef, dans le cadre d’une primaire réclamée par le principal rival du Premier ministre israélien, Gideon Saar, déterminé à lui ravir le parti.
Cette primaire, aux allures de référendum sur la popularité de M. Netanyahu dans ses propres rangs, a peu de chances d’être remportée par le député Saar.
Mais si elle aboutit à un résultat serré, ce sera un coup dur pour le Premier ministre, à la tête du Likud depuis 1993 hormis une parenthèse de six ans lorsque le parti était dirigé par Ariel Sharon.
M. Netanyahu, 70 ans, est déjà en mauvaise posture. Le Premier ministre le plus pérenne de l’histoire d’Israël a face à lui la perspective des troisièmes élections législatives en moins d’un an, prévues le 2 mars, et il est inculpé pour corruption dans trois affaires.
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Environ 116 000 membres du Likud sont appelés à voter de 9 à 23 heures dans plus de 100 bureaux de vote. Les résultats du scrutin ne devraient pas être dévoilés avant vendredi matin.
« Netanyahu ne peut que perdre », estime Stephan Miller, sondeur ayant travaillé sur de nombreuses élections en Israël. « Qu’importe le pourcentage qu’obtiendra Saar, ce sera la première fois en dix ans que des électeurs de droite expriment explicitement leur désir de se débarrasser de Netanyahu ».
Selon M. Miller, si Gideon Saar, 53 ans, reçoit plus d’un tiers des votes, « cela portera un coup significatif à Netanyahu ».
Le vainqueur de la primaire aura la lourde tâche de mener la campagne du Likud pour les législatives de mars.
Au terme des élections anticipées d’avril, puis de septembre, ni M. Netanyahu ni le centriste Benny Gantz n’ont réussi à rallier 61 députés, seuil de la majorité parlementaire pour former un gouvernement.
Le président Reuven Rivlin a dû confier cette tâche au Parlement lui-même, qui n’y est pas parvenu non plus.
Rassembler
Le 21 novembre, M. Netanyahu a été inculpé pour corruption, fraude et abus de confiance dans trois affaires. Il a dénoncé de « fausses accusations motivées par des considérations politiques ».
Peu de temps après, des rivaux au sein du Likud, en tête desquels Gideon Saar, ont appelé à la tenue de primaires pour lui désigner un successeur.
M. Saar, cacique du parti, a été plusieurs fois ministre, avant de mettre sa carrière politique entre parenthèses en 2014 après avoir été écarté par M. Netanyahu.
Si M. Saar est encore plus marqué à droite que le Premier ministre, notamment sur la question palestinienne, il joue la carte du rassembleur au-delà de son propre camp, en misant sur ses relations avec des chefs d’autres partis.
Sans le dire ouvertement, il mise aussi sur le fait qu’il n’est pas inculpé par la justice, le parti Kakhol lavan de Benny Gantz refusant de partager le pouvoir avec un Premier ministre inculpé.
Selon de récents sondages, un Likud dirigé par M. Saar remporterait moins de sièges le 2 mars que s’il était dirigé par M. Netanyahu.
Toutefois, sous M. Saar, des électeurs du Likud pourraient se tourner vers d’autres partis de droite, ceux qui n’avaient pas atteint le seuil de 3,5 % des votes pour entrer au Parlement lors des précédents scrutins.
Dans ce cas, le camp de droite, tous partis confondus, pourrait être renforcé et potentiellement atteindre le seuil de la majorité parlementaire nécessaire pour former un gouvernement.
« Au sein du Likud, beaucoup comprennent qu’il faut choisir entre être avec Netanyahu et dans l’opposition, ou être avec Saar mais au gouvernement », estime une source proche de M. Saar.
« Changement dans l’air »
M. Netanyahu, surnommé « Bibi », s’est longtemps présenté comme l’unique leader du Likud, isolant ses critiques et forçant ses rivaux au départ.
Le président du Parlement Yuli Edelstein n’a soutenu publiquement aucun candidat. Gilad Erdan, ministre de la Sécurité intérieure, a exprimé son soutien à Netanyahu.
D’après Ofer Zalzberg, analyste politique au centre de réflexion International Crisis Group (ICG), une telle neutralité aurait été impensable il y a quelques années. « Ils sentent qu’il y a un changement dans l’air et espèrent que la bataille entre Saar et Netanyahu créera les conditions pour qu’une troisième partie remporte la mise ».
Pour M. Netanyahu, il est essentiel de rester en fonction : la loi israélienne prévoit que tout ministre étant poursuivi pénalement doit démissionner, mais cela ne s’applique pas au Premier ministre.
« Bibi continuera, même s’il obtient 50 % et une voix de plus » que M. Saar, prédit Gideon Rahat, professeur de sciences politiques à l’université hébraïque de Jérusalem.