800 religieux juifs américains demandent à Israël de refuser les expulsions
Des rabbins et des chantres ont écrit à Netanyahu que "nous, Juifs, savons trop bien ce qui survient quand le monde ferme ses portes à ceux qui sont obligés de fuir leurs foyers"

Ce sont presque 800 personnalités religieuses juives américaines qui ont signé une lettre ouverte recommandant vivement au gouvernement israélien de cesser les expulsions des demandeurs d’asile africains.
Le courrier, initié par des organisations juives – dont le Nouveau fonds israélien, le groupe de soutien aux réfugiés HIAS et le groupe de défense des droits de l’Homme Truah – a établi que « notre propre expérience de l’esclavage et de la libération et notre propre expérience en tant que réfugiés nous obligent à agir avec miséricorde et justice envers ceux qui cherchent un refuge parmi nous ».
Il y a approximativement 38 000 migrants et demandeurs d’asile africains en Israël, selon le ministère de l’Intérieur. Environ 72 % sont Erythréens et 20 % sont Soudanais et la vaste majorité est arrivée entre 2006 et 2012. Un grand nombre habite dans le sud de Tel Aviv et certains habitants et militants leur reprochent le taux de délinquance en hausse et ont fait pression sur le gouvernement en faveur de leur expulsion.
Le mois dernier, la Knesset a approuvé un amendement à la loi dite « des infiltrés » qui ouvre la voie à l’expulsion forcée de migrants et demandeurs d’asile érythréens et soudanais à partir du mois de mars, et l’emprisonnement indéfini de ceux qui refuseront de quitter « volontairement » le territoire.
Dans la nouvelle lettre, des rabbins, des chantres et des étudiants appellent le Premier ministre Benjamin Netanyahu à commencer à « se mettre à la hauteur des responsabilités internationales d’Israël » envers les réfugiés.
« Cela comprend offrir aux demandeurs d’asile une chance équitable de pouvoir remplir des dossiers de candidature au statut de réfugié et à ne pas expulser des demandeurs d’asile dans des pays qui ne peuvent pas garantir leur sécurité. Cela comprend également que votre gouvernement puisse commencer à examiner ces candidatures d’une manière efficace, juste, transparente et impartiale ».
Ils ont évalué que « en tant pays fondé par les réfugiés, et dont les tous premiers dirigeants ont aidé à esquisser la convention internationale sur le statut des réfugiés en 1951, Israël ne doit pas expulser ceux qui sont en quête d’un asile au sein de ses frontières. Nous, Juifs, savons trop bien ce qui survient lorsque le monde ferme ses portes à ceux qui sont contraints de fuir leurs foyers ».
« Les demandeurs d’asile qui sont venus en Israël échappent aux tortures, à l’esclavage et à la guerre », a dit la lettre. « Nous sommes en colère face aux informations livrées qui nous apprennent qu’un grand nombre de ceux qui ont été expulsés vers l’Afrique ont déjà subi des viols, les vols, la torture et les trafics d’êtres humains ».
Ce document a suivi des courriers similaires envoyés par les chefs de la communauté juive nord-américaine, dans lesquels ils demandaient à Netanyahu « de faire ce qui est juste, de faire ce qui est juif, d’être une lumière parmi les nations dans la façon dont nous traitons les étrangers parmi nous ».

Des chefs de groupes juifs – parmi lesquels le HIAS, le centre d’action religieuse du judaïsme réformé, le conseil national des femmes juives, J-Street et Truah – avaient initialement envoyé un courrier à Netanyahu au mois de novembre lui demandant de ne pas expulser les demandeurs d’asile. Le bureau du Premier ministre avait répondu des semaines plus tard, mettant en doute le fait que les migrants africains soient des réfugiés ou qu’ils cherchent véritablement un refuge face aux persécutions ou aux guerres.
Répliquant au début du mois, les groupes ont noté que de nombreux migrants venus du Soudan ou d’Erythrée avaient demandé le statut de réfugié mais qu’ils n’étaient pas traités de manière équitable.
« Nous savons qu’un grand nombre [de migrants] sont effectivement des demandeurs d’asile et des réfugiés qui méritent une protection et nous sommes profondément inquiets pour leur bien-être », ajoutait le courrier.
« Nous savons également qu’en dehors d’Israël, approximativement 56 % des candidats à l’asile Soudanais et 84 % des Erythréens ont été acceptés comme réfugiés. Le fait que moins d’un pour cent des demandeurs d’asile soudanais et érythréens en Israël aient reçu le statut de réfugié met sérieusement en doute la validité du processus de demande d’asile tel qu’il est mis en oeuvre actuellement ».
Les signataires ont dit que des informations indiquaient que les migrants contraints au départ ne trouvaient pas d’asile sûr ailleurs.
« Votre lettre nous assure également que vous continuerez à oeuvrer ‘avec la plus grande sensibilité’ au bien-être de ces migrants. Ces garanties sont malheureusement difficiles à croire face aux témoignages continus de ceux qui ont été expulsés d’Israël et qui ont affronté l’exploitation, le trafic d’être humain et même la mort », a dit le courrier.
Jeudi, un groupe de survivants israéliens de la Shoah a également demandé à Netanyahu de ne pas procéder aux expulsions prévues. Ces 36 survivants ont appelé le Premier ministre à « prendre une décision historique » et à renverser le plan controversé, selon le quotidien Haaretz.
« Nous vous le demandons : Arrêtez ce processus ! », a dit la lettre. « Vous seulement avez l’autorité nécessaire pour prendre cette décision historique et pour montrer au monde que l’Etat juif ne permettra pas la souffrance et la torture des personnes placées sous sa protection. »
Netanyahu avait annoncé des accords passés permettant d’envoyer les migrants dans des pays tiers en Afrique. Il avait toutefois refusé de divulguer de quels pays il s’agissait.
Au mois de novembre, la ministre des Affaires étrangères du Rwanda, Louise Mushikiwabo, avait fait savoir que son pays pourrait accueillir environ 10 000 demandeurs d’asile depuis Israël. Israël paierait 5 000 dollars au gouvernement rwandais pour chaque migrant expulsé plus une « subvention de départ » de 3 500 dollars qui serait versée directement à la personne expulsée du territoire.
Auparavant, le Rwanda et l’Ouganda avaient accepté environ 4 000 migrants et demandeurs d’asile qui avaient signé un document attestant qu’ils avaient « volontairement quitté » Israël mais, jusqu’à présent, les pays n’ont accepté aucun demandeur d’asile ayant été expulsé contre sa volonté.
JTA a contribué à cet article.