Anwar Gargash: « Nous avons gagné beaucoup de temps sur l’annexion »
Au lendemain de l'accord historique, le ministre des Affaires étrangères des EAU dit que son pays veut faire avancer la normalisation "dans les meilleurs délais"
Un éminent ministre des Emirats arabes unis a promis, vendredi, que l’accord de normalisation conclu avec Israël n’était pas une mesure purement symbolique, ajoutant qu’Abou Dhabi voulait voir des relations de grande envergure se mettre en place « dans les meilleurs délais ».
Il a également noté que l’accord allait repousser le plan d’annexion de pans de la Cisjordanie par Israël pendant longtemps et il a vivement recommandé aux Israéliens et aux Palestiniens de reprendre les négociations de paix.
Les Palestiniens, pour leur part, ont estimé que le pacte conclu entre l’Etat juif et les Emirats arabes unis était « méprisable » et ils ont évoqué une « trahison ».
« Nous ne parlons pas d’un processus lent et graduel… Il y a des secteurs que nous voudrions développer avec Israël et il y a des secteurs qu’Israël veut développer avec nous », a indiqué le ministre d’Etat aux Affaires étrangères des Emirats arabes unis, Anwar Gargash, au cours d’un entretien accordé au site d’information Walla – la toute première interview accordée par un ministre émirati à un site d’information israélien.
L’interview a aussi été publiée en anglais sur le site Axios.
« Je vois des équipes se rencontrer afin de traiter des nombreux champs d’intérêt pour nos deux pays en Israël et aux EAU », a continué Gargash, qui a ajouté que les équipes de négociation respectives se rencontreraient « aussi vite que possible ».
Gargash a précisé que les Emirats désiraient coopérer avec Israël notamment dans les secteurs de l’agriculture, de la sécurité alimentaire, de la cyber-sécurité, du tourisme, des technologies et du commerce.
Il a également noté que l’accord impliquerait l’ouverture d’ambassades respectives dans les deux pays. Il n’a pas précisé le calendrier qui permettrait de voir des Israéliens entrer pour faire du tourisme aux Emirats arabes unis et vice versa, mais il a souligné qu’il espérait que les échanges culturels débuteraient « bientôt ».
« J’espère que ce sera bientôt, vraiment bientôt. Nous ne parlons pas de quelque chose qui se développera petit à petit – nous devons faire avancer les choses, il faut donner le feu vert et j’espère que ce sera très bientôt. Et j’espère aussi qu’Israël participera à l’Expo de Dubaï. Et il est évidemment important que nous puissions voir également des touristes israéliens venir à Dubaï », a-t-il dit.
« C’est un tournant important dans les relations arabo-israéliennes. Nous avons assisté à de nombreux événements marquants qui avaient moins réussi. Si nous en tirons les leçons pour la région, c’est que ce n’est pas parce que vous allez faire une annonce que tout va instantanément réussir. Nous devons travailler tous ensemble », s’est exclamé le ministre des Emirats arabes unis.
Gargash a souligné qu’un résultat important de l’accord, aux yeux des Emiratis, était la suspension du plan d’annexion de larges pans de la Cisjordanie ourdi par le Premier ministre Benjamin Netanyahu – une suspension « pour longtemps ».
« Je ne comprends pas la politique israélienne. C’est très compliqué. Mais c’est un engagement à trois voies. Nous sommes sûrs que si nous tenons cet engagement, que les Etats-Unis sont impliqués, Israël respectera son engagement. Je pense que nous avons gagné beaucoup de temps… Je ne pense pas que ce soit une suspension de courte durée », a-t-il ajouté.
Netanyahu, cherchant à apaiser la droite et le mouvement pro-implantation au sein de l’Etat juif, avait indiqué jeudi que le président Donald Trump lui avait demandé de mettre un terme « temporaire » à son initiative d’élargissement de la souveraineté dans le cadre de l’accord conclu avec les Emirats, soulignant rester engagé dans le processus d’annexion en coordination avec les Etats-Unis.
Gargash a exprimé l’espoir que cette suspension à long-terme puisse offrir l’opportunité aux Israéliens et aux Palestiniens de retourner à la table des négociations pour discuter d’une solution à deux Etats au conflit.
« Nous continuons à vivement recommander aux Israéliens et aux Palestiniens de mener des pourparlers. Il est impossible d’arrêter une bombe à retardement mais, en même temps, de ne rien faire concernant les interactions qui sont nécessaires pour la désamorcer », a-t-il dit.