Barkat veut des nominations politiques aux postes de hauts fonctionnaires
Selon l'ex-maire de Jérusalem, certaines fonctions, notamment celle de procureur-général, doivent devenir "des postes de confiance" - avec des bureaucrates fidèles au pouvoir
Carrie Keller-Lynn est la correspondante politique et juridique du Times of Israël.
Le député du Likud Nir Barkat a indiqué qu’il voulait réexaminer le rôle du procureur-général et transformer ce bureau non-partisan en « poste de confiance ». Il a tenu ces propos alors qu’il s’exprimait devant des activistes du parti qui se sont réunis à Tel Aviv, dans la soirée de lundi.
Ce n’est pas la première fois que l’ancien maire de Jérusalem suggère de remplacer des hauts-fonctionnaires par des personnels désignés par les politiques.
Elu pour une période de sept ans, le procureur-général israélien doit être apolitique mais il se retrouve parfois dans une situation d’équilibre précaire, devant à la fois assumer la fonction de chef du parquet et de conseiller juridique du gouvernement.
« Nous devons couper en deux le rôle du procureur-général » et transformer le procureur-général « en poste de confiance », a dit Barkat qui a ajouté que le double mandat, qui est rare dans les démocraties occidentales, « est illusoire ».
Occupant la huitième place sur la liste du Likud à l’issue des primaires de la formation, au mois d’août, Barkat a rejoint par ces paroles de nombreux autres candidats du Likud qui réclament des réformes du système judiciaire mais qui hésitent sur la question du traitement du procureur-général. Alors que le leader du parti, Benjamin Netanyahu, est actuellement poursuivi en justice dans le cadre de trois dossiers distincts de corruption, la réforme judiciaire est au cœur des élections israéliennes du mois de novembre, et le ton du débat reflète fidèlement les lignes politiques séparant le bloc de droite et religieux du Likud et l’alliance anti-Netanyahu, qui est dirigée par le Premier ministre Yair Lapid.
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Barkat a également déclaré aux 3 000 activistes environ que la prochaine cible devrait être le Bureau du procureur de l’État, qui est placé sous la supervision du procureur-général.
« La prochaine réforme qui devra être faite est celle du Bureau du Procureur de l’État », a indiqué Barkat qui a ajouté que la conduite du Bureau lui faisait « perdre le sommeil ».
« Il n’est pas régulé et il représente une menace pour le système de gouvernance. Personne, là-bas, ne paie le prix des erreurs commises, des abus de la justice, des persécutions, des injustices à l’encontre du public et de ses responsables élus – des injustices qui ne débouchent souvent sur rien. Et peu importe si ces injustices sont faites à l’encontre de Benjamin Netanyahu… à mon encontre ou encore à la vôtre ».
Netanyahu n’a cessé de clamer son innocence dans les affaires de corruption qui le concernent et il affirme sans avancer de preuves que les accusations qui le visent ont été fabriquées de toutes pièces par une police et un parquet politisés, qu’elles ont été encouragées par un procureur-général faible et par des médias situés résolument à gauche de l’échiquier politique.
Lors de la chute du gouvernement sortant, plusieurs législateurs du Likud avaient fait savoir qu’ils feraient remplacer la procureur-générale actuelle, Galia Baharav-Miara, une fois qu’ils reviendraient au pouvoir si cette dernière devait autoriser le ministre de la Défense, Benny Gantz, à nommer un nouveau chef d’État-major de Tsahal. Ce qu’elle a fait.
D’autres députés du Likud, notamment Miki Zohar, ont choisi d’opter pour un ton plus conciliant et ils ont insisté sur le fait que le poste de Baharav-Miara ne serait pas immédiatement en danger. En 2020, Zohar avait été interrogé par la police, soupçonné d’avoir extorqué le précédent procureur-général.
Netanyahu a également dit qu’il ne prévoyait pas de remplacer à son poste Baharav-Miara s’il devait reprendre la barre du pays.
Barkat a indiqué que le poste de procureur-général devait être « un poste de confiance » lié au gouvernement parce qu’il « est déterminant dans l’application de nos politiques ». Il a élargi ces propos à tous les hauts-fonctionnaires qui, a-t-il précisé, doivent s’aligner sur le gouvernement au niveau politique pour permettre une mise en œuvre harmonieuse des lois votées par ce dernier.
« Nous changerons les hauts-fonctionnaires aux postes de confiance en y plaçant d’éminents bureaucrates et administrateurs engagés à nos côtés », a dit Barkat, attribuant aux hauts-fonctionnaires « de gauche » la responsabilité du blocage de la mise en vigueur de politiques de droite lorsque Netanyahu était au pouvoir.
« Aux États-Unis, en Allemagne, en France, le jour même de l’arrivée d’une nouvelle administration, ce sont des milliers de bureaucrates qui rangent leurs affaires, qui quittent leur poste et qui rentrent chez eux. Là-bas, c’est naturel et accepté », a insisté Barkat. « C’est la seule manière pourtant de contrôler et de mettre en œuvre la politique pour laquelle un gouvernement a été élu ».
Le député a aussi dit qu’il voulait que les politiques puissent contrôler la méthode de sélection des juges à la Cour suprême.
« La révolution que nous mènerons, c’est que les juges seront élus par les représentants du peuple à la Knesset, que leurs opinions reflèteront l’opinion du peuple », a-t-il déclaré.
Actuellement, les 15 magistrats de la Cour suprême sont choisis par la Commission de sélection judiciaire, formée de neuf membres. Elle réunit ainsi des représentants politiques, des représentants de l’Association israélienne du Barreau et des juges.
Barkat a indiqué qu’il voulait mettre en place un contrôle politique direct sur la sélection judiciaire, rappelant une législation qui avait été examinée par le Likud au début de l’été et qui proposait de démanteler la commission et de procéder aux nominations sur la base des recommandations gouvernementales et de l’approbation des candidats devant la Knesset.
Ce qui, dans un gouvernement doté d’une majorité stable et apte à travailler correctement, offrirait une approbation politique aux candidats avancés par le gouvernement, sans participation de l’opposition au processus de choix.