Ben Gvir autorisera-t-il le sacrifice de Pessah au mont du Temple ?
Chaque année, un groupe marginal tente d'abattre un agneau conformément à son interprétation d'un édit biblique, et se voit toujours refuser l'autorisation
Judah Ari Gross est le correspondant du Times of Israël pour les sujets religieux et les affaires de la Diaspora.
Lundi soir, un groupe religieux marginal a demandé au nouveau ministre de la Sécurité nationale, Itamar Ben Gvir, l’autorisation d’effectuer le sacrifice rituel de Pessah sur le mont du Temple au printemps prochain.
Le groupe « Retour au Mont » fait cette demande chaque année, sans succès. Mais Ben Gvir, qui s’est rendu sur le mont du Temple mardi matin, n’est pas un ministre de la Sécurité ordinaire, et ils ont plus de chances que jamais d’obtenir l’autorisation d’effectuer le rituel controversé du sacrifice animal.
« Chaque année, nous déployons de nombreux efforts pour faire progresser le sacrifice de Pessah, à la fois dans le cadre de campagnes éducatives nationales et dans la pratique, puisque chaque année nous tentons d’effectuer le sacrifice à l’endroit et au moment appropriés », a déclaré le groupe.
La plupart des responsables israéliens de la sécurité estiment que l’autorisation du sacrifice de Pessah sur le mont du Temple susciterait de vives protestations de la part des musulmans de Jérusalem, de Cisjordanie et des pays arabes voisins, qui y verraient un changement majeur du status quo sur le lieu saint. En conséquence, ces demandes ont toujours été rejetées, bien que des militants aient été autorisés à procéder à l’abattage rituel d’un agneau dans la Vieille Ville, mais à l’extérieur du mont du Temple.
« Cette année, à la lumière de la situation politique et de la formation d’un gouvernement « entièrement de droite » pour la première fois depuis longtemps, il existe un réel potentiel pour que le sacrifice de Pessah soit effectué de manière respectueuse, avec l’approbation et la coordination de toutes les différentes autorités, principalement la police israélienne, qui est sous votre pouvoir en tant que nouveau ministre de la Sécurité nationale de l’État d’Israël », écrit le groupe.
Par le passé, Ben Gvir aurait tenté d’accomplir lui-même le sacrifice de Pessah et, plus récemment, en tant qu’avocat, il a défendu devant les tribunaux d’autres militants qui avaient tenté de le faire, arguant qu’il est anti-démocratique d’interdire aux Juifs d’accomplir un commandement religieux.
Le groupe « Retour au Mont » y fait référence dans sa lettre et souligne que Ben Gvir « connaît bien l’importance du sacrifice de Pessah du fait de ses activités dans le passé. »
Le groupe a déclaré qu’il prévoyait de déposer une demande écrite officielle auprès de la police israélienne mercredi.
Le groupe a demandé à plusieurs reprises l’autorisation officielle d’effectuer le sacrifice et ses membres ont également essayé de le faire illégalement lorsqu’ils ont été inévitablement repoussés, en tentant de faire entrer clandestinement des agneaux sur le mont du Temple. Cela se solde souvent par des gardes à vue ou des arrestations par la police. L’année dernière, le groupe a fait sensation en offrant une récompense en argent liquide à quiconque parviendrait à accomplir le rituel et une compensation aux personnes arrêtées au cours du processus.
Dans le livre des Nombres, Dieu ordonne au peuple juif de sacrifier un agneau mâle âgé d’un an la veille de Pessah, qui tombe cette année le 5 avril. Ce sacrifice était effectué dans la cour du Temple. Après la destruction du premier et du deuxième Temple, la plupart des Juifs ont cessé d’effectuer tous les sacrifices d’animaux, attendant de reprendre cette pratique après la venue du Messie et la construction du troisième Temple.
Cependant, alors que la plupart des autres sacrifices d’animaux ne peuvent être accomplis que dans un temple, certaines sources rabbiniques – notamment le rabbin Zvi Hirsch Kalischer du 19e siècle – ont affirmé que le sacrifice de Pessah pouvait ou même devait être accompli aujourd’hui, du moins en théorie.
De nombreuses questions techniques sur la manière exacte dont un tel sacrifice doit être accompli restent sans réponse – comme l’emplacement précis sur le mont du Temple où il doit avoir lieu, la manière dont l’argent pour acheter l’agneau doit être collecté, et la question de savoir si le commandement doit être accompli s’il met potentiellement en danger la vie humaine – et par conséquent, la plupart des autorités rabbiniques estiment que le sacrifice ne doit pas être accompli.
Le groupe « Retour au Mont », en revanche, non seulement croit en la nécessité d’accomplir le rituel, mais est convaincu d’avoir les réponses à ces questions techniques et de pouvoir effectuer le sacrifice conformément à la loi juive.
Il s’agit toutefois d’une croyance extrêmement marginale. Bien qu’il existe un certain soutien – en théorie – à l’idée que le sacrifice doit être accompli aujourd’hui, l’écrasante majorité des autorités religieuses maintiennent que les questions non résolues sur la manière de l’accomplir dans la pratique en font un point tout à fait discutable.
Bien que cette croyance soit loin d’être commune, elle est apparemment partagée par Ben Gvir, ou du moins l’était dans le passé.
En 2006, Ben Gvir a été arrêté par la police alors qu’il tentait, avec un certain nombre d’autres militants d’extrême droite, d’accomplir le sacrifice de Pessah, selon un reportage de la Treizième à l’époque.
Ben Gvir a déclaré à l’époque que « partout ailleurs, on parlerait d’antisémitisme » pour interdire aux Juifs d’accomplir le sacrifice de Pessah.
En 2017, Ben Gvir – alors avocat pour un groupe de défense juridique d’extrême droite – a représenté un groupe de militants de « Retour au Mont » lorsqu’ils ont été arrêtés pour avoir prévu d’accomplir le sacrifice de Pessah.
« La police doit permettre aux militants du Mont du Temple de jouir de la liberté de culte. Israël est en train de perdre son caractère démocratique. Il est inimaginable que des gens soient arrêtés au milieu de la nuit parce qu’ils veulent accomplir un commandement religieux juif », a déclaré Ben Gvir dans un communiqué.
Le bureau de Ben Gvir n’a pas immédiatement répondu à une demande de commentaire. Dans une interview accordée mardi soir à la Douzième chaîne, Ben Gvir a été interrogé pour savoir s’il autoriserait le sacrifice, mais il a esquivé la question. Il n’a pas non plus répondu quand on lui a demandé s’il allait autoriser la prière juive sur le mont du Temple, en tant que ministre de la Sécurité nationale.