Borrell : L’État palestinien pourrait devoir être imposé à Israël de l’extérieur
Selon le plus haut diplomate de l'UE, les parties sont trop opposées pour parvenir seules à un accord ; pour Washington, il n'y a "aucun moyen" d'assurer la sécurité d'Israël sans un État palestinien
Jacob Magid est le correspondant du Times of Israël aux États-Unis, basé à New York.
Le chef de la politique étrangère de l’Union européenne, Josep Borrell, a déclaré vendredi que la seule solution pacifique au conflit israélo-palestinien incluait la création d’un État palestinien, et il a laissé entendre que cette solution pourrait devoir être « imposée de l’extérieur », sans l’aval d’Israël.
Lors d’un discours prononcé à l’Université de Valladolid, en Espagne, Borrell a déclaré que, sans intervention internationale, la « spirale de la haine se poursuivra génération après génération », ont rapporté de nombreux médias espagnols.
« Les acteurs sont trop opposés pour pouvoir parvenir à un accord de manière autonome », a expliqué Borrell. « Si tout le monde est en faveur de cette solution, la communauté internationale devra l’imposer. »
Auparavant, le porte-parole du Département d’État américain, Matthew Miller, avait affirmé, lors d’une conférence de presse, qu’il n’y avait « aucun moyen » de résoudre les problèmes de sécurité à long-terme d’Israël dans la région et les problèmes à court terme liés à la reconstruction de Gaza sans la création d’un État palestinien.
La pression internationale en faveur d’une solution à deux États s’est intensifiée à la suite des attaques du groupe terroriste palestinien du Hamas contre Israël le 7 octobre et de la guerre entre Israël et le Hamas à Gaza.
Alors que certains acteurs internationaux estiment que les violences ne font que souligner la nécessité d’un accord de paix, les dirigeants israéliens affirment que l’attaque a mis en évidence l’extrême danger d’une entité palestinienne autonome à proximité de ses centres de population. De plus, alors que les Palestiniens soutiennent de plus en plus le Hamas à la suite de ces atrocités, l’opinion publique israélienne semble peu encline à s’engager dans des efforts de paix.
En outre, Israël craint que tout avantage accordé aux Palestiniens à la suite du 7 octobre ne représente une victoire pour le groupe terroriste palestinien et d’autres extrémistes, en montrant que la violence et le terrorisme donnent des résultats.
Lors de sa conférence de presse, Miller a expliqué qu’Israël avait une occasion historique à saisir en ce moment même, car les pays de la région étaient prêts à fournir des garanties de sécurité à Israël.
« Il n’y a aucun moyen de résoudre les défis à long-terme [d’Israël] pour assurer une sécurité durable, et il n’y a aucun moyen de résoudre les défis à court terme de la reconstruction de Gaza, de l’établissement de la gouvernance à Gaza et de la sécurité à Gaza, sans la création d’un État palestinien », a affirmé Miller, qui répondait à des propos de Netanyahu prononcés plus tôt.
Environ une heure plus tôt, Netanyahu avait été invité à répondre à une information de NBC News selon laquelle les États-Unis préparaient « l’après-Netanyahu » après que celui-ci a rejeté une proposition qui aurait vu l’Arabie saoudite aider à la reconstruction de Gaza après la guerre et normaliser les relations avec Israël si Jérusalem acceptait de créer une voie pour un éventuel État palestinien.
Netanyahu a indiqué qu’il avait fait savoir à Washington qu’il s’opposait à toute création d’un État palestinien qui ne garantirait pas la sécurité d’Israël, à l’heure où le pays se remet des attaques dévastatrices.
« Je précise que dans tout arrangement dans un avenir prévisible, avec ou sans accord, Israël doit avoir le contrôle de la sécurité sur tout le territoire situé à l’ouest du Jourdain. C’est une condition sine qua non« , a affirmé Netanyahu à Tel Aviv.
Il a ajouté que l’absence d’un État palestinien n’avait pas empêché la conclusion d’accords de normalisation avec les États arabes il y a quelques années et qu’il avait toujours l’intention de faire adhérer d’autres pays à ces accords.
Netanyahu s’est vanté d’avoir résisté aux pressions américaines dans le passé et a déclaré que ceux qui parlent d’une « ère post-Netanyahu » faisaient référence à une ère dans laquelle un État palestinien serait établi, suggérant à nouveau que son maintien au poste de Premier ministre est ce qui faisait obstacle à une solution à deux États.
Pour sa part, Miller a souligné que, lors de ses rencontres avec les dirigeants arabes au cours de son voyage au Moyen-Orient la semaine dernière, le secrétaire d’État américain Antony Blinken avait réussi à obtenir des engagements des pays de la région qui avaient indiqué « qu’ils participeraient à la reconstruction de Gaza, qu’ils participeraient à l’établissement d’une gouvernance de Gaza dirigée par les Palestiniens, mais qu’ils ne le feraient que s’il existait une voie tangible vers l’établissement d’un État palestinien ».
« Pour la première fois dans son histoire, vous voyez les pays de la région qui sont prêts à s’engager et à intégrer davantage Israël et à fournir de véritables garanties de sécurité à Israël et les États-Unis sont prêts à jouer leur rôle aussi, mais ils doivent tous avoir un partenaire volontaire de l’autre côté », a poursuivi Miller.
« Israël a une occasion historique à saisir (…). Et nous espérons que le pays saisira cette opportunité », a-t-il ajouté.
Israël et son principal soutien, les États-Unis, semblent aujourd’hui en désaccord, Netanyahu et sa coalition de droite rejetant la création d’un État palestinien alors que Washington maintient que la solution à deux États est le seul moyen possible d’instaurer une paix durable dans la région.
Malgré ces désaccords, le soutien des États-Unis à leur allié de longue date, Israël, « reste inébranlable », a affirmé Miller.
« Il ne s’agit pas pour les États-Unis de faire pression sur eux pour qu’ils fassent quoi que ce soit. Il s’agit pour les États-Unis de leur présenter les opportunités qui s’offrent à eux. »
Parallèlement, également en réponse à la prise de parole de Netanyahu, un porte-parole du dirigeant de l’Autorité palestinienne (AP), Mahmoud Abbas, a déclaré qu’il ne pouvait y avoir « de sécurité ni de stabilité dans la région » sans un État palestinien.
« Sans la création d’un État palestinien indépendant avec Jérusalem-Est comme capitale avec les frontières de 1967, il n’y aura ni sécurité ni stabilité dans la région », a déclaré jeudi Nabil Abu Rdeineh, porte-parole d’Abbas, cité par l’agence de presse de l’AP Wafa. Les Palestiniens veulent un État composé de Gaza, de la Cisjordanie et de Jérusalem-Est, qu’Israël a annexé en 1967.
Le ministre norvégien des Affaires étrangères, Espen Barth Eide, a également déclaré à l’agence de presse norvégienne NTB que le rejet d’une solution à deux États était « totalement contraire aux accords conclus entre Israël et l’OLP [Organisation de libération de la Palestine] à Oslo » en 1993.
Dans le cadre de ces accords, Israël a reconnu l’OLP comme le seul représentant du peuple palestinien, tandis que l’OLP a reconnu Israël.
L’AP a été créée en tant qu’organe intérimaire chargé de gouverner certaines parties de la Cisjordanie et de la bande de Gaza, mais le processus lancé à Oslo s’est finalement effondré sans accord sur le statut final, alors que les Palestiniens lançaient la Seconde Intifada.
« Les déclarations du Premier ministre israélien sont en décalage avec une communauté internationale presque unifiée », a affirmé Barth Eide dans un communiqué transmis à NTB.
Le ministre norvégien des Affaires étrangères a souligné « qu’une véritable solution politique est nécessaire » pour résoudre la situation.
« La Norvège estime qu’il n’y a pas d’alternative crédible à la solution des deux États, tout comme le pensent les Palestiniens eux-mêmes, les États-Unis, l’Union européenne, l’ONU et les pays arabes voisins », a ajouté Barth Eide.
L’équipe du Times of Israel a contribué à cet article.
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