Cambriolée, une famille juive française déménage sur les conseils d’un policier
Sur sa voiture, cette famille de Seine-Saint-Denis a découvert inscrit en grand le mot "juif", une étoile de David et "Israël"

« Nous avons été cambriolés fin mars 2017 », raconte, pour la première fois sous son vrai nom et face à la caméra d’I24News, Stella.
« On dormait, j’ai trois enfants, et personne ne s’est réveillé, » se souvient cette mère de famille juive qui habite le département de la Seine-Saint-Denis, près de Paris.
C’est plus tard, une fois le cambriolage constaté et la police prévenue que ce vol a pris un caractère plus dramatique.
« La police scientifique arrive, et c’est là que je comprends qu’il s’agit plus que d’un simple cambriolage, » poursuit Stella.
« Madame, c’est le père de famille qui vous parle, ils vous ont repéré, il faut partir ». Voilà ce qu’a dit un policier à une mère de famille de confession juive, cambriolée et harcelée uniquement parce que juive… Jusqu’à quand ce climat de haine à l’égard des Juifs va durer ? pic.twitter.com/htJWOL4l1Z
— Jérémy Benhaïm (@JeremBenhaim) February 4, 2019
Sur la porte avant de sa voiture, côté conducteur, est écrit en grand : « juif ».
Stella avait également trouvé deux autres inscriptions, grossièrement gravées sur la carrosserie : « Israël », accompagné d’une étoile de David.
« Le soir même, je décide, la peur au ventre et en larmes, de ne plus rester dans cette maison ». Une décision motivée par une phrase prononcée par l’un des policiers ce jour-là : « il me prend dans ces bras et me dit : ‘madame, c’est le père de famille qui vous parle, vous savez, ils vous ont repérés. Il faut partir' ».
La famille a déménagé d’une ville à l’autre de Seine-Saint-Denis après le cambriolage de son pavillon, pour un endroit plus sûr, illustrant le phénomène de « alyah interne » que connaît la France.
Elle n’est pas la seule. « Sur une quinzaine d’années, des effectifs de populations ou de familles juives se sont effondrés dans toute une série de communes » du nord-est de Paris, selon Jérôme Fourquet, de l’institut de sondage Ifop.
« Une épuration ethnique à bas bruit, » que dénonçait en avril 2018 un manifeste « contre le nouvel antisémitisme », signé notamment par l’ancien président Nicolas Sarkozy.
Pour autant, elle ne ressent pas de haine. « On continue à vivre comme avant, à côtoyer nos petits commerçants qu’on adore, notre boulanger qui est tunisien, mon primeur qui est turc. Et je ne veux pas que ça change », assure cette quinquagénaire, qui se définit comme une « Française d’origine juive » et n’envisage pas pour le moment de faire son alyah.
La France a connu une augmentation de 69 % des incidents antisémites en 2018 par rapport à l’année précédente. Des données qui ne sont pas encore définitives et qui n’incluent pas une partie du mois de novembre et celui de décembre, lors desquels la parole antisémite s’est libérée à l’occasion des protestations des gilets jaunes.