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Décès de Geneviève Callerot, résistante honorée pour avoir aidé des familles à passer en zone libre

La résistante avait obtenu la Légion d'honneur en 2018, à l'âge de 102 ans

Geneviève Callerot, 102 ans, pose avec son dernier roman intitulé « Deux filles sous la botte » dans le jardin de sa ferme, le 25 août 2018 à Saint-Aulaye, dans le sud-ouest de la France. (Photo MEHDI FEDOUACH / AFP)
Geneviève Callerot, 102 ans, pose avec son dernier roman intitulé « Deux filles sous la botte » dans le jardin de sa ferme, le 25 août 2018 à Saint-Aulaye, dans le sud-ouest de la France. (Photo MEHDI FEDOUACH / AFP)

C’est l’une des rares centenaires à avoir reçu la légion d’honneur : Geneviève Callerot, décédée jeudi à l’âge de 108 ans en Dordogne, avait été distinguée en 2018 pour avoir aidé avec sa famille à faire passer en zone libre plus de 200 personnes pendant la Seconde Guerre mondiale.

Cette paysanne, devenue écrivaine à la retraite, avait alors reçu l’AFP dans sa ferme périgourdine, où elle a encore vécu plusieurs années, avant de finir ses jours dans un Ehpad de Saint-Aulaye-Puymangou.

« Je n’en voulais pas (de la légion d’honneur) parce qu’il y a des tas d’autres gens qui la méritaient beaucoup plus et puis j’ai réfléchi, je vais quand même la prendre en association avec mes parents, mes frères et sœurs », expliquait la centenaire, née en 1916 à Paris, avec ses lunettes autour du cou et ses prothèses auditives.

De la Dordogne occupée, ils ont fait passer des juifs bien sûr et aussi toute autre personne qui voulait entrer en zone libre, à quelques kilomètres de leur maison. Les gens qui arrivaient chez eux à Saint-Aulaye, entre Libourne (Gironde) et Périgueux, étaient trop épuisés pour repartir le jour même.

Arrêtée trois fois

Ils les accompagnaient le lendemain, toujours entre 12H00 et 14H00. « Au début on comptait. Il y en a eu plus de 200, c’est sûr », précisait en 2018 Geneviève qui en gardait de nombreuses anecdotes.

« J’ai fait passer une femme et j’étais assez furieuse. Elle est arrivée en short rouge et en blouse jaune. Jamais personne n’a eu de short ici, en plus en rouge et jaune, ça se voyait à un kilomètre. Je lui ai fait mettre une jupe foncée, elle était furieuse mais j’ai tenu bon », se souvenait-elle.

Geneviève Callerot, 102 ans, est assise dans son tracteur de sa ferme, le 25 août 2018 à Saint-Aulaye, dans le sud-ouest de la France. (Photo MEHDI FEDOUACH / AFP)

« Pourquoi elle passait? Je l’ai su plus tard. Elle était juive et sa tête était mise à prix. C’était la femme d’un médecin qui n’était pas juif ».

Mais ce n’était pas sans risque. La jeune femme fut arrêtée à trois reprises. « La première fois, j’étais sur la route avec ma bicyclette », racontait Geneviève qui portait toujours un sac d’orties et une faucille au cas où elle serait contrôlée par les Allemands.

« J’ai expliqué à grand renfort de cocorico et de coin coin que je ramassais des orties parce qu’ils nous prenaient tout. Je ne sais pas s’il a compris que je ramassais des orties pour nourrir mes coin coin et mes ‘cocorico’! », souriait la centenaire qui montait encore sur son tracteur pour faucher l’herbe et aimait marcher pieds nus.

 « Une combattante de l’ombre »

La troisième fois, elle a passé trois semaines en prison à Libourne: « Je ne faisais pas passer que des évadés. C’était une cousine de ma mère qui avait 56 ans et un jeune homme de 17 ans qui revenait de vacances ».

« Quand on a été arrêtés, on était dans les bois. J’ai dit que j’allais voir mon fiancé. J’ai inventé un fiancé, Jacques Martin. Le temps qu’ils répertorient tous les Martin de France… », se rappelait Geneviève avec ses yeux bleus rieurs.

Elle était l’aînée d’une fratrie de cinq enfants. Au moment de recevoir la légion d’honneur, seul son frère Étienne Morise, 19 ans de moins qu’elle, était encore en vie.

Geneviève Callerot, 102 ans, pose avec sa Légion d’honneur dans le jardin de sa ferme, le 25 août 2018 à Saint-Aulaye, dans le sud-ouest de la France. (Photo MEHDI FEDOUACH / AFP)

« Elle a fait beaucoup de résistance pendant la guerre. Ce n’était pas une guerrière mais c’était une combattante, une combattante de l’ombre. Elle a pris beaucoup de risques, mon père et sa sœur aussi », estimait alors le petit frère, décédé en 2024.

« Elle était intarissable et aimait partager son histoire avec les collégiens de la commune », a déclaré à l’AFP vendredi le maire de Saint-Aulaye-Puymangou, Yannick Lagrenaudie.

A l’heure de sa retraite d’agricultrice, cette mère de trois enfants avait aussi commencé à écrire, à 63 ans, des « romans paysans ».

Son sixième et dernier livre, Deux filles sous la botte, chronique d’une famille pendant l’occupation, a été écrit à partir de 600 lettres échangées pendant la guerre, « parce que bientôt personne ne pourra plus dire: j’ai vu… j’y étais… »

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