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Décès de Jean-Louis Debré, porte-flingue de Chirac devenu sage de la République

Un nom de famille irrémédiablement lié à la Ve République : Jean-Louis Debré est décédé dans la nuit de lundi à mardi à l'âge de 80 ans

Le président du Conseil constitutionnel français Jean-Louis Debré pose avec un buste au siège du Conseil constitutionnel français le 1er octobre 2013, à Paris, à la veille du 55e anniversaire de la constitution française. L'ancien président français du Conseil constitutionnel français et de l'Assemblée nationale française Jean-Louis Debré est décédé le 4 mars 2025. (Crédit : Eric Feferberg / AFP)
Le président du Conseil constitutionnel français Jean-Louis Debré pose avec un buste au siège du Conseil constitutionnel français le 1er octobre 2013, à Paris, à la veille du 55e anniversaire de la constitution française. L'ancien président français du Conseil constitutionnel français et de l'Assemblée nationale française Jean-Louis Debré est décédé le 4 mars 2025. (Crédit : Eric Feferberg / AFP)

Considéré un temps comme le vilain petit canard de son illustre famille, grognard de la chiraquie d’abord associé à la droite dure, Jean-Louis Debré, décédé mardi à l’âge de 80 ans, s’était imposé comme un sage de la République, à la parole émancipée.

La famille de l’ancien élu de l’Eure a annoncé le décès mardi matin à LCI, dirigée par l’un de ses fils, le journaliste Guillaume Debré.

L’Assemblée nationale lui rendra hommage mardi après-midi avant la séance de questions au gouvernement, et le Sénat également au début de la séance.

« C’était un personnage truculent et assez unique. Et puis c’était l’héritier d’une grande famille politique », a réagi l’ancien Premier ministre, et maire du Havre, Édouard Philippe, sur France Inter.

Sa fidélité sans faille à Jacques Chirac lui a valu d’obtenir les postes les plus en vue: le ministère de l’Intérieur en 1995 dès l’arrivée à l’Elysée de son mentor, la présidence stratégique du groupe RPR à l’Assemblée après la dissolution ratée de 1997, le perchoir du Palais-Bourbon (2002-2007) remporté au nez et à la barbe d’Edouard Balladur et, récompense suprême, la présidence de 2007 à 2016 du Conseil constitutionnel, institution qu’il a profondément modernisée.

« Fidèle, républicain et libre »

« C’est un politique jusqu’au bout des ongles », décrivait le président des Hauts-de-France Xavier Bertrand.

Après avoir quitté la rue de Montpensier et retrouvé sa liberté de parole, dont il use dès lors pleinement, Jean-Louis Debré révèle même avoir voté Hollande en 2012 face à Nicolas Sarkozy, son ennemi intime, « homme de clan » sans « aucun sens de l’Etat » à ses yeux. « Sarkozy et moi, ça n’a jamais collé… », soufflait-il.

Né le 30 septembre 1944 à Toulouse, Jean-Louis Debré est issu d’une famille éminente. Son père Michel, résistant, rédigera la Constitution de la Ve République en 1958 et sera Premier ministre du général de Gaulle. Le grand-père Robert a fondé la pédiatrie moderne et est à l’origine des CHU et l’arrière-grand-père Simon a failli être grand rabbin de France.

Il a trois frères dont un jumeau, Bernard, chirurgien urologue réputé, député et ministre, décédé en 2020. Son faux jumeau à tous égards : Bernard hérite du fief politique familial d’Amboise quand Jean-Louis, dans l’ombre envahissante de leur père et moins charismatique, doit conquérir seul sa place au soleil, dans l’Eure. Et lors de la guerre Chirac-Balladur, les frères sont dans des camps opposés, Bernard choisissant Balladur.

Docteur en droit sans avoir passé le bac, magistrat instructeur, Jean-Louis Debré se lance définitivement en politique en 1986, dans le sillage de Chirac bien sûr.

Avec qui il a des relations quasi filiales – lui restant fidèle jusqu’à la mort – mais empreintes de franchise. « Chirac, je l’adore, je l’aime. Mais je suis aussi lucide sur le personnage » à qui il est l’un des seuls à pouvoir dire « des choses désagréables en privé ».

Ministre de l’Intérieur, il doit faire face à la série d’attentats islamistes à l’été 1995 et devient la bête noire de la gauche et des caricaturistes après l’expulsion musclée en 1996 de centaines de sans-papiers occupant l’église Saint-Bernard à Paris.

Après 2002, changement radical : au perchoir, la gauche découvre « un vrai républicain », une « personnalité originale », « pas sectaire », qui « défend les droits de l’opposition » au grand dam de la droite, résume pour l’AFP Jean-Marc Ayrault, alors patron des députés PS.

Veuf, père de trois enfants, il a toujours aimé écrire : des romans policiers comme « Quand les brochets font courir les carpes » mais aussi un « Dictionnaire amoureux de la République » ou une galerie de femmes pionnières, « Ces femmes qui ont réveillé la France », qu’il adapte au théâtre en montant sur les planches en 2021 avec sa nouvelle compagne Valérie Bochenek.

En privé, il montre aussi des talents de conteur et d’imitateur. Narrant avec délectation la haine inextinguible entre Valéry Giscard d’Estaing et Jacques Chirac, amenés en 2007 à siéger ensemble parmi les Sages.

Réactions

L’ancien patron des députés LR (ex UMP, ex-RPR), Christian Jacob, a salué « le fidèle grognard de Jacques Chirac, celui qui aura apporté une réelle contribution à la victoire de 1995 ».

« Très attaché à la Constitution de la Cinquième République (…) il avait ainsi poursuivi durant sa présidence le service de la République qui l’a animé tout au long de son parcours », a salué l’actuel président du Conseil Laurent Fabius.

« Sa valeur cardinale était la fidélité, à ses idéaux gaullistes, à une certaine idée de la France, à Jacques Chirac. Ministre, président du Conseil constitutionnel, il savait cultiver sa voix singulière, et la défense des libertés, avec un humour décapant. Je n’oublie pas que l’une de ses dernières pièces fut consacrée aux femmes qui firent la France ! », a souligné la présidente (Les Républicains) de la région Ile-de-France Valérie Pécresse.

Le président français Jacques Chirac le 14 mars 2006. (Crédit : PATRICK KOVARIK / AFP)

L’ancien président de la République socialiste François Hollande a salué à la fois l’homme « passionné, ardent, fiévreux » dans sa défense de Jacques Chirac et de ses « convictions gaullistes », mais aussi la « grande capacité d’indépendance » de l’ancien président du Conseil constitutionnel qui « savait quel était le sens de l’intérêt général ». Les deux hommes ont longtemps bataillé ferme avant d’entretenir des relations d’estime mutuelle.

« Homme de dialogue, il partageait avec les Français l’amour de la République, de son histoire, jusque sur les planches des théâtres. Nos débats passionnants et respectueux dépassaient nos divergences », a souligné le secrétaire national du Parti communiste Fabien Roussel.

« Ce grand connaisseur et ce grand serviteur de nos institutions aura marqué de ses convictions gaullistes la vie politique française », a de son côté réagi sur X le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau.

Ces dernières années, l’homme, toujours à l’affût d’un bon mot, était devenu chroniqueur à la radio et à la télévision.

Sans filtre, il aimait décocher ses flèches, notamment contre ces « politiques à bout de souffle ». Mais aussi prodiguer des conseils. Ainsi proposait-il en 2023 qu’Emmanuel Macron, pour qui il a voté dès 2017, ait recours au « référendum » ou à « la dissolution ». Vraisemblablement sans imaginer être pris au mot…

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