Israël en guerre - Jour 339

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Documentaire sur un Israélien qui découvre le passé égyptien de sa famille d’espions

Les Shahin ont été recrutés par Tsahal après la guerre des Six Jours pour espionner pour Israël ; après l'exécution du père, mère et enfants ont fui en Israël et sont devenus juifs

Inshirah et Ibrahim Shahin, des Égyptiens qui espionne pour le compte d'Israël avec leurs enfants dans les années 1960 et 1970. (Crédit : Capture d'écran de la Douzième chaîne - utilisée conformément à l'article 27a de la loi sur les droits d'auteur)
Inshirah et Ibrahim Shahin, des Égyptiens qui espionne pour le compte d'Israël avec leurs enfants dans les années 1960 et 1970. (Crédit : Capture d'écran de la Douzième chaîne - utilisée conformément à l'article 27a de la loi sur les droits d'auteur)

Daniel Ben-David a grandi dans ce qui pourrait sembler être la famille juive israélienne la plus ordinaire, quoique peut-être plus réservée que la plupart des autres. Ils célébraient le Nouvel An juif, les mariages, les bar mitzvot et les naissances, et menaient une vie typiquement israélienne.

Ce n’est qu’à l’âge adulte que Ben-David a découvert que ses racines n’étaient ni juives ni israéliennes, mais plutôt palestino-égyptiennes et que sa famille avait été contrainte de fuir l’Égypte pour l’État hébreu après avoir mené des activités d’espionnage dans leur pays d’origine pendant environ sept ans.

Cette histoire peut sembler sortir tout droit d’un roman d’espionnage, et pourtant c’est la vie de Ben-David, dont les recherches sur l’histoire de sa famille font l’objet d’un nouveau documentaire de Yes, intitulé ‘The Spy Family‘ [La famille d’espions].

Le film raconte l’histoire de la famille Shahin : un père palestinien, sa femme égyptienne et leurs trois enfants, qui ont tous servi d’agents au service d’Israël après la guerre des Six Jours de 1967.

Ben-David est le fils de Yossi Ben-David, anciennement connu sous le nom de Nabil Shahin, l’un des trois enfants. Il a grandi en sachant que son père, un personnage secret, était originaire d’Égypte, mais pas grand-chose d’autre.

« Nous avons grandi dans une famille juive israélienne à tous points de vue. Nous fêtions les grandes fêtes officielles, Rosh HaShana, Souccot », a expliqué Daniel à la Douzième chaîne, dans un reportage diffusé samedi sur le film documentaire. « La famille était secrète. Toute leur vie, ils ont agi de la sorte. Cela a été très difficile de découvrir la vérité ».

Le père de Nabil et le grand-père de Ben-David, Ibrahim Shahin, était un Palestinien né à Jérusalem et dont la famille avait fui en Égypte après la création de l’État d’Israël en 1948. C’est là qu’il a rencontré Inshirah, une Égyptienne qui allait devenir son épouse. Le couple a eu trois enfants et travaillait dans la ville d’El-Arish, dans la péninsule du Sinaï, quand celle-ci a été conquise par Israël lors de la guerre des Six Jours. Leurs trois fils – Nabil (le père de Ben-David), Muhammad et Adel – se trouvaient alors au Caire.

À la même époque, Micah Kobi servait dans l’unité 504 de l’armée israélienne, le service de renseignement qui emploie des agents étrangers pour le compte d’Israël. À la recherche d’agents, il s’est rendu à El-Arish pour y interroger des centaines d’Égyptiens restés dans la ville occupée.

C’est là qu’il a rencontré Ibrahim Shahin.

« J’ai vu quelqu’un qui affichait un énorme sourire », a déclaré Kobi à la Douzième chaîne. Lorsqu’il a demandé à Shahin s’il était prêt à travailler pour Israël, Shahin aurait répondu : « Je t’aiderai pour tout ce que tu veux, parce que j’aime Israël ».

Shahin et sa femme ont réussi à faire venir leurs enfants du Caire, et tous les cinq ont suivi un programme de formation dans un appartement secret de Givatayim, dans la banlieue de Tel Aviv. La volonté de Shahin d’inclure ses enfants dans le projet n’a pas été acceptée sans controverse.

« Personnellement, je n’étais pas favorable à l’idée de joindre les enfants au projet. Ils risquaient de gêner le réseau », a expliqué Kobi.

Mais la décision avait été prise. Après quelques préparatifs, la famille est retournée en Égypte, où les parents ont entrepris de nouer des liens avec de hauts responsables, y compris des membres des services de sécurité. À l’unité 504, ils ont reçu le nom de code « Réseau Sinyori ».

L’agent qui s’occupait des espions, identifié uniquement sous le nom « d’Abu Yaakov » en raison de la nature confidentielle de son poste, a déclaré que l’une des plus grandes erreurs de la sécurité avait été d’impliquer les enfants dans l’affaire.

« Les enfants restent des enfants. Ils bavardent, ils parlent, ils font des choses, ils en parlent à leurs amis », a-t-il déclaré.

Micah Kobi, qui a recruté la famille égyptienne Shahin pour espionner Israël après la guerre des Six Jours de 1967. (Crédit : Capture d’écran de la Douzième chaîne – utilisée conformément à la clause 27a de la loi sur le droit d’auteur)

« Cette décision a été fatidique. Ils ont pris un très gros risque », a déclaré Daniel Ben-David dans le reportage de la Douzième chaîne.

Yossi – il préfère son nom juif à celui de Nabil – a confié à la Douzième chaîne que son père Ibrahim lui confiait pour mission de photographier divers sites, notamment des bases et des installations militaires. Il n’avait que 13 ou 15 ans à l’époque.

Il se souvient de son enfance en Égypte et raconte « combien c’était difficile, et qu’il n’y avait jamais assez d’argent, mais dès que mon père a rencontré des Juifs, la situation s’est améliorée ».

Yossi se souvient de son père lui disant : « Nabil, nous travaillons avec des amis ». « Quand je lui ai demandé : ‘Quels amis ?’ Il m’a répondu : ‘Nos amis en Israël' ».

Yossi a confié qu’il aimait et soutenait son père, mais qu’il ne comprenait pas vraiment la portée des activités de la famille.

« Je prenais des photos de bases militaires, et parfois d’avions. Cet appareil en a vu des choses », a-t-il déclaré en brandissant l’appareil qu’il a gardé jusqu’à ce jour.

Yossi Ben-David, anciennement Nabil Shahin, un espion d’origine égyptienne pour le compte d’Israël dans les années 1960 et 1970, qui s’est réfugié en Israël après son emprisonnement et s’est converti au judaïsme. (Crédit : Capture d’écran de la Douzième chaîne – utilisée conformément à l’article 27a de la loi sur les droits d’auteur)

Kobi a fait l’éloge de la famille Shahin, qui a été « l’un des meilleurs et des plus précieux agents que l’Unité 504 ait jamais eus ».

« Ils nous ont fourni des renseignements sur les entraînements, sur les exercices de l’armée de l’air et de la marine », a-t-il déclaré.

« Ils nous ont même informé du départ de familles russes d’Égypte – un avertissement concernant la guerre de Kippour », a-t-il ajouté, en parlant du départ des diplomates soviétiques à l’approche de la guerre.

Pendant sept ans, les Shahin ont transmis des renseignements à Israël, et notamment des photographies de sites militaires et des messages secrets transmis en code morse et à l’encre invisible. La plupart des informations qu’ils ont fournies sont encore classifiées.

Mais en 1974, la famille a été démasquée.

Yossi se souvient avoir vu de sa terrasse, au Caire, son père se faire emmener par un groupe d’hommes dans une voiture. Il raconte qu’il s’est immédiatement débarrassé du matériel d’espionnage qui se trouvait dans leur maison.

Ibrahim et Inshirah ont été jugés et condamnés à mort, et leurs trois enfants ont été emprisonnés pendant cinq ans.

Lors d’une interview accordée après leur capture, Inshira a confié à un journaliste égyptien : « J’ai des regrets. J’ai de profonds regrets et je veux vraiment me racheter pour ce que j’ai fait. Je m’inquiète pour mes enfants. Où iront-ils ? Que feront-ils ? »

Yossi raconte qu’une fois en prison, il a été enfermé dans une pièce vide, « plongée dans une obscurité totale », et qu’il a été frappé.

Inshirah s’est alors enfuie avec ses trois enfants en Israël, où elle s’est installée à Bat Yam, dans la banlieue de Tel Aviv. Ils se sont convertis au judaïsme et ont pris le nom de Ben-David.

Inshirah a changé son nom en Dina, et ses enfants sont devenus Yossi, Haim et Rafi.

Daniel Ben-David tient un appareil photo appartenant à son père Yossi Ben-David, un espion d’origine égyptienne pour le compte d’Israël dans les années 1960 et 1970. (Crédit : Capture d’écran de la Douzième chaîne : utilisée conformément à l’article 27a de la loi sur le droit d’auteur)

Il a fallu attendre 1989 pour que l’affaire soit autorisée à être rendue publique en Israël, une fois la famille déjà bien établie dans le pays.

Yossi est le dernier survivant de sa famille et ce n’est que récemment qu’il a révélé son histoire à son fils. Sa mère, Dina, est décédée en 2021 et ses frères sont eux aussi décédés depuis longtemps.

« J’ai grandi dans le secret. Mon père m’a élevé et je n’aimais pas en parler ou donner des explications. Je voulais tout oublier », a-t-il déclaré.

Le fils de Yossi, Daniel, a déclaré à la Douzième chaîne que ses grands-parents avaient pris une « décision fatidique et risquée » pour leur famille.

Mais il a rejeté la question sur une quelconque crise d’identité. « Je suis israélien et juif et rien ne changera cela ».

Il a ajouté, lorsqu’on lui a demandé comment il conciliait ses origines palestiniennes et musulmanes avec la réalité actuelle, « Je suis de droite et je resterai de droite ».

Daniel considère que l’histoire de sa famille n’a pas reçu assez d’attention et qu’elle devrait être citée au même titre que l’histoire d’Eli Cohen, l’espion israélien le plus célèbre qui, pendant quatre ans sous couverture à Damas, a fourni des renseignements cruciaux à Israël, jusqu’à sa capture et son exécution en 1965.

« Mon grand-père a donné sa vie. Cette histoire doit être commémorée au même titre que celle d’Eli Cohen » dit-il.

Kobi a expliqué qu’il était impossible de diffuser cette histoire.

« Avec tout le chagrin, il faut dire qu’il y a une énorme différence entre l’histoire d’Eli Cohen et cette histoire-ci. Un espion d’origine juive sera toujours traité différemment d’un espion d’une autre religion », a-t-il déclaré.

Yossi a déclaré à la Douzième chaîne que quelqu’un lui avait dit un jour que ses ancêtres devaient être juifs « parce que sinon c’est inexplicable. »

« J’aime être juif, et toute ma famille est juive », a déclaré Yossi, qui a aujourd’hui 68 ans.

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