En pleine vague d’antisémitisme, New York baptise une de ses rues « Yad Vashem Way »
La rue a été baptisée du nom du musée et mémorial de la Shoah, en Israël, lors d'une cérémonie à laquelle ont assisté autorités locales et israéliennes : "Pour se rappeler, se souvenir"
Luke Tress est le vidéojournaliste et spécialiste des technologies du Times of Israël

NEW YORK – Les autorités new-yorkaises ont baptisé, jeudi, du nom de Yad Vashem – musée et mémorial de la Shoah en Israël – une des rues de la ville, sur fond d’antisémitisme et d’ignorance du génocide nazi.
« C’est pour se rappeler, se souvenir. C’est quelque part un monument à la Shoah », a déclaré le président de Yad Vashem, Dani Dayan, en employant le mot hébreu qui désigne l’extermination des Juifs d’Europe.
Cette nouvelle plaque de rue a été dévoilée dans le cadre d’une cérémonie qui s’est tenue jeudi matin en présence d’autorités de la ville de New-York et d’Israël. La rue en question se trouve dans l’Upper East Side de Manhattan, sur la 67e rue, entre la 3e Avenue et la 2e Avenue, non loin de la synagogue Park East.
Elle a été choisie pour sa proximité avec la synagogue, explique Dayan, ancien consul général d’Israël à New York.
Le grand rabbin de cette synagogue, Arthur Schneier, survivant de la Shoah, a qualifié l’événement de « moment à la fois très personnel et émouvant ».
« J’aurais pu faire partie du million et demi d’enfants qui n’ont pas survécu », dit-il.
« J’espère qu’en passant devant la plaque ‘Yad Vashem Way’, les gens auront envie d’en savoir plus et de se rendre à Jérusalem », là où se trouve Yad Vashem, a-t-il ajouté.
Quelques jours auparavant avait eu lieu la Journée internationale de commémoration de la Shoah.
A l’issue de la cérémonie, qui s’est tenue en pleine rue, dans le froid mordant de l’hiver new-yorkais, les officiels se sont retrouvés à l’intérieur de la synagogue Park East pour une série de discours et un chant interprété par la chorale des enfants de la congrégation.
L’antisémitisme a augmenté à New York depuis le pogrom commis par le Hamas, en Israël, le 7 octobre 2023. Selon les chiffres de la police, en 2024, les Juifs ont été la première cible de crimes de haine à New-York, plus que l’ensemble des autres minorités. Avant le pogrom du Hamas, déjà, les Juifs étaient la minorité la plus victime de crimes de haine.
Sur le lampadaire auquel est accroché le panneau « Yad Vashem Way », on pouvait voir des affiches rappelant le sort des otages, vandalisées, et des autocollants du drapeau israélien, avec l’étoile de David rayée. Un tract donnant à voir Omer Neutra, otage new-yorkais dont la mort a été annoncée le mois dernier, est revêtu de traits au marqueur rouge.
Selon plusieurs études, la Shoah serait méconnue du grand public, que ce soit aux États-Unis ou ailleurs. L’enquête de l’Anti-Defamation League publiée ce mois-ci estime que moins de la moitié des adultes croient au génocide.
Ce nouveau nom de rue est le fruit d’une initiative qui, depuis plusieurs mois, a permis de mettre en évidence l’existence de relations de confiance entre les autorités municipales, la communauté juive et les autorités israéliennes, et ce en dépit du contexte politique tendu lié au conflit au Moyen-Orient.
Ont pris part à cette cérémonie le consul général d’Israël à New York, Ofir Akunis, le représentant Jerry Nadler, le président de l’arrondissement de Manhattan, Mark Levine, sans oublier Julie Menin, membre du conseil municipal de New York, membre du caucus juif de la ville et descendante de survivants, et le conseiller Keith Powers, qui représente la région. Des représentants des services du maire étaient également présents, et le maire Eric Adams a signé une proclamation déclarant le 30 janvier « Journée de la Yad Vashem Way ».

M. Powers a expliqué que les discussions en vue du baptême de cette rue avait commencé à Park East il y a de cela plus de six mois, en concertation avec les services du maire. La proposition a ensuite été soumise à Powers, qui e a fait une résolution votée par le conseil municipal il y a de cela plusieurs mois.
Les organisateurs tenaient à ce que cette rue soit baptisée cette semaine, à l’occasion du 80e anniversaire de la libération du camp de la mort d’Auschwitz.
Powers a expliqué qu’il s’agissait d’un outil de mémoire inscrit dans le temps, en hommage aux habitants du quartier, et d’une étape dans la lutte contre l’antisémitisme.
« L’idée est de faire notre devoir et de dire ‘Plus jamais ça’, d’autant plus que toute la ville fait face à un regain très inquiétant de l’antisémitisme », a expliqué Powers.
« J’espère, et je crois, qu’en passant par Yad Vashem Way, les gens vont réfléchir et penser à l’histoire, au passé », a indiqué Dayan. « Mais cela nous parle aussi du présent, au fait qu’à peine 80 ans après la Shoah, l’antisémitisme atteigne des niveaux endémiques – pourquoi ? Et cela nous parle aussi de l’avenir et de ce qu’il faut mettre en œuvre pour mieux faire sur la question. »
D’autres rues new-yorkaises portent le nom de personnalités juives, à commencer par le survivant de la Shoah et auteur Elie Wiesel ou encore l’ancienne Première ministre d’Israël, Golda Meir.