Est-ce que l’Occident adoptera les stratégies anti-terroristes d’Israël ?
Il y a une façon de protéger vos citoyens. C'est comme ça qu'Israël a vaincu la deuxième Intifada... et a été critiqué
David est le fondateur et le rédacteur en chef du Times of Israel. Il était auparavant rédacteur en chef du Jerusalem Post et du Jerusalem Report. Il est l’auteur de « Un peu trop près de Dieu : les frissons et la panique d’une vie en Israël » (2000) et « Nature morte avec les poseurs de bombes : Israël à l’ère du terrorisme » (2004).
Je regarde la télévision en ce lundi après-midi dans une Amérique qui semble ébranlée, quelques heures après que les terroristes de l’Etat islamique aient menacé de frapper les Etats-Unis après le massacre des innocents à Paris. Et comme je le fais toujours quand je suis en voyage, je pense énormément à mon Israël vibrant, en combat et diabolisé.
Sur l’écran, la CNN affiche « les villes américaines renforcent la sécurité après les attaques de Paris », et « la nouvelle menace d’attaques de l’EI comprend Washington », et la chaîne montre et diffuse une série d’interviews de politiciens, de chefs militaires et d’experts en sécurité.
Ils affirment tous que la protection de tous les spectateurs dans les salles de concert, ou bien des gens attablés à des terrasses de café, contre d’éventuelles attaques terroristes potentielles est tout simplement impossible. »
Ils décrivent l’Etat islamique comme le pire fléau terroriste dont ils peuvent se souvenir. Ils débattent sur la question de savoir si le président Barack Obama a raison d’insister pour ne pas de mettre les bottes de l’armée sur le terrain pour attaquer l’EI en Syrie et l’Irak.
Les têtes parlantes, du président à la base de la pyramide du pouvoir, il me semble, sont plutôt perdus.
Dianne Feinstein, sénatrice depuis plus de 20 ans qui a siégé dans des commissions puissantes sur les affaires étrangères et des renseignements, a simplement marmonné quelque chose d’incohérent à propos de la nécessité de « rassembler le monde occidental ensemble » pour « fournir des éléments de sécurité ».
Une succession de républicains, de potentiels présidents, exhortent, dans un langage dur mais complètement généralisé, d’écraser l’EI sur le terrain.
« Nous devons les détruire », a déclaré Jeb Bush. « Je tiens à les combattre dans leur jardin, de sorte que nous n’ayons pas à les combattre pas dans nos jardins », a aboyé Lindsey Graham.
Le président vient de rabrouer ses critiques lors d’une conférence de presse, où il a rejeté leurs suggestions en utisant en grande partie le même ton qu’il a utilisé pour écarter les objections de Benjamin Netanyahu à son accord nucléaire avec l’Iran : « Les gens veulent venir et avoir des opinions sur ce qu’ils pensent qu’ils feraient ? Présenter un plan spécifique », a déclaré sèchement le président. (Netanyahu a fait exactement cela pour l’Iran, bien sûr, pour ce que cela a aidé.)
Les responsables de l’Etat et les commentateurs ont qualifié le bain de sang du 13 novembre, de « 11 septembre de la France ».
Aussi, à bien des égards, c’était le jour où Paris a subi une attaque terroriste qui ressemblait, le genre de terrorisme qu’Israël a enduré pendant des années. Mais cette information a visiblement été éclipsée.
Pas même au cours de la deuxième Intifada, pendant l’assaut dramatique des kamikazes du Hamas et du Fatah qui ont frappé et saigné Israël dans les premières années de ce siècle, nos ennemis terroristes sont parvenu à massacrer 129 d’entre nous en l’espace d’une seule soirée.
Cela leur a pris un peu plus de temps : en effet, pour le seul mois de mars 2002, quelque 120 civils israéliens ont été tués par des terroristes palestiniens.
Tandis que kamikazes et hommes armés ciblent nos bus, nos centres commerciaux, nos hôtels, nos collèges et nos restaurants, nous avons fait deux choses que la France, les Etats-Unis et le reste du monde libre auront à faire s’ils veulent les vaincre, et en particulier la méprisable terreur islamiste : nous avons appris à réduire notre vulnérabilité face au terrorisme, et nous avons taclé les tueurs dans leurs centres d’opérations.
Avec une forme de myopie, hypocritement, et avec constance, la communauté internationale, y compris la plupart du monde occidental, n’ont pas pris la peine de comprendre la nécessité de cette stratégie et nous a fustigé.
Nous avons rendu la tâche plus difficile aux terroristes de nous tuer en faisant ce que ces experts de la CNN disent qu’il est impossible de faire : oui, en protégeant tous nos cafés et les restaurants, les centres commerciaux, les entrées d’hôtels, les autobus, et tout autre lieu public où les citoyens se rassemblent avec des barrières et des détecteurs de métaux et des agents de sécurité.
Toutes ces années plus tard, les kamikazes ne peuvent toujours simplement pas entrer dans nos théâtres et nos salles de concerts. Nous avons renforcé notre collecte des renseignements dans les territoires palestiniens violemment hostiles, y compris notamment dans les villes de Cisjordanie desquelles nous nous étions retirés quelques années auparavant dans une vaine quête d’une coexistence pacifique.
Et malgré la fureur et les critiques, malavisés, venant de partout, nous avons construit une barrière de sécurité – un mélange de clôtures et de pans de mur – de sorte que les kamikazes palestiniens ne pouvaient pas juste rentrer en conduisant en Israël et nous exploser.
Nous sommes devenus une nation d’analystes de la sécurité intérieure, jaugeant où faire son shopping et si oui ou non, on peut prendre le bus dans une tentative visant à réduire notre exposition aux tueurs. Et nous nous sommes débrouillés nous-mêmes.
Nous avons également mené une offensive, notamment après que le mois de mars noir de 2002, lorsque nous avons lancé une importante opération militaire en Cisjordanie pour détruire « l’infrastructure » du terrorisme en Cisjordanie – les usines de fabrication des bombes et les lignes de production de l’endoctrinement des bombardiers.
Une grande partie de la communauté internationale, mal informée par un journalisme particulièrement pitoyable, a dénaturé le but de l’opération et fait écho aux fausses revendications palestiniennes sur le nombre de morts, et – notamment faites par le président George W. Bush – qui a insisté pour que nous nous arrêtions et que nous partions.
Mais nous ne l’avons pas fait. Et voilà pourquoi, en 2015, lorsque le leadership politique, spirituel et les médias palestiniens poussent son peuple à tuer à nouveau les Juifs, nous avons enduré les attaques meurtrières au couteau et à la voiture-bélier, plutôt qu’avoir à faire à des kamikazes qui tuent en masse. Jusqu’à présent, tout du moins.
La France, les Etats-Unis et le reste de l’Occident sont maintenant aux prises avec un grand nombre de dilemmes angoissants que nous avons vécus pendant des années.
Comment maintenez-vous vos libertés, s’interroge l’Occident, tout en luttant contre des ennemis qui abusent de toutes les libertés ? Quel genre de lois doivent être promulguées ? Qui autorisez-vous à passer à travers vos frontières ? Dans quelles circonstances des arrestations préventives doivent-elles être faites, et les suspects détenus sans jugement, et Internet surveillé, et l’incitation à la haine circonscrite ?
Pas facile, n’est-ce pas ?
Comment minimiser la menace meurtrière qui pèse sur vos citoyens, sans avoir un trop grand nombre de vos soldats tués ? Et sans tuer trop de civils (souvent soutenant la terreur) parmi lesquels votre ennemi s’est intégré ?
Voilà une autre question à laquelle nous nous sommes longtemps interrogés. Nous avons quitté Gaza en 2005, le Hamas a pris le pouvoir en 2007, et trois fois depuis, nous avons été entraînés dans un conflit par des attaques incessantes des islamistes contre Israël.
Mais nous savons que nous ne pouvons pas détruire l’idéologie extrémiste par la force. Et nous ne voulons pas être traînés dans le bourbier de Gaza. Un homme a dit un jour : « nous pouvons reprendre le territoire. Et tant que nous laisserons nos troupes là-bas, nous pouvons tenir, mais cela ne résout pas le problème sous-jacent de l’élimination de la dynamique qui produit ces types de groupes extrémistes violents ».
Cet homme, c’était le président Obama, parlant, lundi, à propos de la Syrie et l’Irak. Vous voudriez penser, en ce moment, qu’il comprend juste un peu plus les défis auxquels nous avons été confrontés.
Vous voudriez penser, maintenant, que lui et les autres dirigeants du monde bien intentionnés qui nous ont dit de prendre des risques pour la paix, qui nous a dit que nous pouvons en toute sécurité renoncer au territoire adjacent même dans notre perfide Moyen-Orient, en nous disant que nous ne savons pas où nos intérêts se trouvent, sont peut-être en train d’intérioriser que peut-être, juste peut-être, ce n’est pas si simple.
Peut-être que nous, les Israéliens, résistant obstinément aux politiques prescrites à l’échelle internationale, lesquelles nous craignons, pourraient constituer un suicide national, ne sont pas si bêtes, après tout.
Je ne retiens pas mon souffle.
En fait, j’attends de voir combien de personnes importantes, qui devraient être avisées, suivront l’exemple de la ministre des Affaires étrangères de la Suède et vont se contorsionner pour impliquer de quelque manière que ce soit Israël, pour les mauvaises actions d’un culte de la mort qui a persuadé ses partisans à tuer et être tué au nom de Dieu.
Cet argument est tellement dérisoire qu’il ne peut guère être réfléchi : si seulement nous avions fait ce que la communauté internationale nous avait dit de faire, insinue apparemment cet argument, et nous étions retirés de la Cisjordanie comme nous avons renoncé à Gaza (en plaçant l’ensemble de notre pays face à de graves risques potentiels dans le processus), l’Etat islamique pourrait ne pas avoir massacré 129 personnes à Paris et ne menacerait pas maintenant les Etats-Unis.
Honnêtement, les mots me manquent.
Tout du moins, cependant, je recommande aux dirigeants et aux chefs de la sécurité de la France et au reste de l’Europe et de l’Amérique du Nord de tendre la main à ces homologues israéliens qu’ils ont si souvent jugés et critiqués pour bénéficier de notre amère expérience acquise dans nos combats menés contre le terrorisme islamiste.
Il n’existe pas de moyen de défense absolu contre le terrorisme. Et il n’y a pas de remèdes offensives non plus. Mais il existe des stratégies efficaces.
Israël n’aurait pas survécu sans elles. Vendredi, Paris a signalé que le reste du monde libre devrait adopter beaucoup d’entre elles aussi.
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