Gur Blaï : la réforme prive de protection des droits fondamentaux
Selon l'analyse du conseiller juridique de la Knesset, des droits civils fondamentaux comme l'égalité ou la liberté d'expression ne sont pas garantis par la loi israélienne

Le droit à la liberté d’expression et d’autres droits civils fondamentaux ne seraient plus protégés si le projet de loi du gouvernement limitant le contrôle judiciaire était adopté dans son état actuel, a déclaré lundi le conseiller juridique de la Constitution de la Knesset, Gur Blaï, avocat de la commission Droit et Justice.
Ses propos font suite au débat entre Blaï et le président de la commission, le député Simcha Rothman, l’un des architectes du projet de loi, au sujet d’une clause du projet de loi disposant que la Cour suprême ne pourrait invalider les lois votées par la Knesset que si elles violaient « clairement » des droits « établis » par une loi fondamentale.
Blaï a noté que plusieurs droits civils fondamentaux, comme le droit à l’égalité, la liberté d’expression et autres, n’étaient définis par aucune des lois fondamentales quasi constitutionnelles d’Israël, mais trouvaient leur origine dans la jurisprudence de la Cour suprême.
La Cour tire ces droits de l’interprétation qu’elle donne des lois fondamentales, a-t-il expliqué, et principalement de la Loi fondamentale sur la dignité et la liberté de l’être humain.
Les propos de Blaï ont été rendus publics à quelques heures du vote de la Knesset, en première lecture, sur la première partie de la réforme judiciaire, de nature à donner au gouvernement un contrôle total sur la sélection et la nomination des juges, y compris ceux de la Cour suprême.
(Les projets de loi doivent passer à trois reprises en lecture à la Knesset pour devenir des lois.)
« Dans le droit constitutionnel d’Israël…, la solution médiane [de l’ancien président de la Cour suprême Aharon] Barak prévaut, à savoir qu’il existe des droits, dont l’égalité et la liberté d’expression, que la Cour suprême a tirés de la Loi fondamentale sur la dignité humaine et la liberté et qui sont partiellement protégés en raison de leur association étroite avec la dignité humaine », a expliqué Blaï lundi matin, lors de réunion houleuse de la commission.
Si la Cour ne conserve pas la capacité d’invalider une loi qui serait contraire à ces droits, « cela signifie qu’il n’y aura aucune protection constitutionnelle des droits fondamentaux comme la liberté d’expression », a-t-il ajouté.

Rothman a répondu que si la Cour Suprême pouvait invalider une loi sur la base de l’argument selon lequel la Knesset, lors de la création de l’État, avait limité ses pouvoirs législatifs par le biais des lois fondamentales, elle ne devait pouvoir le faire que dans le cadre de ce qui était explicitement écrit dans ces lois.
« Cette limitation devrait être explicite », a déclaré Rothman.
« Rien ne justifie un contrôle judiciaire pour quelque chose qui ne figure même pas dans les Lois fondamentales. Que la Cour suprême invente des lois fondamentales pour elle-même, ou insère dans les lois fondamentales des choses qui leur ont été retirées afin d’invalider des lois, ne devrait pas être autorisé. »
Lorsque Blaï a demandé à Rothman s’il pensait que les droits civils fondamentaux tels que l’égalité ou la liberté d’expression seraient protégés après l’adoption de son projet de loi, le député a affirmé qu’ils bénéficieraient de telles protections en raison d’accords sociétaux sur ces questions.
« Je ne pense pas que la loi exclue la possibilité pour la Cour Suprême d’examiner une affaire de violation de la liberté d’expression », a déclaré Rothman.
« Il y a des cas dans lesquels nous serons tous d’accord, comme des violations de la dignité humaine, par exemple si vous forcez les gens à marcher dans la rue avec un pansement sur la bouche pour qu’ils ne puissent pas parler. Outre la violation de la liberté d’expression, il y a là une violation de la dignité humaine. »
Selon le constitutionnaliste Adam Shinar, de l’Université Reichman, d’autres droits de l’homme et du citoyen, comme le droit à un procès équitable, la liberté d’association ou la liberté religieuse, ne sont pas davantage repris dans les lois fondamentales.