Israël ouvre – enfin – un nouveau point de contrôle à Qalandiya
Les travailleurs palestiniens disent que le nouveau point de contrôle facilite vraiment leur trajet vers le travail
Il était tôt le matin, avant même le lever du soleil, et des travailleurs palestiniens commençaient à arriver en masse au point de passage de Qalandiya au nord de Jérusalem.
Une majorité marchait d’un bon pas vers le point de passage, impatients d’arriver sur leur lieu de travail en Israël. Certains se sont rassemblés pour prier tandis que d’autres se pressaient autour d’Abu Ramzi, un marchand de 64 ans qui vend des petits pains au sésame et des falafels remplis d’oignon à ceux qui empruntent le point de passage.
Après des années avec un point de contrôle pour piétons terriblement inadéquat et inefficace à Qalandiya qui forçait souvent les travailleurs palestiniens en provenance du centre de la Cisjordanie à faire des queues très longues, Israël a finalement inauguré un nouveau point de contrôle dans la zone à la fin février.
Recevez gratuitement notre édition quotidienne par mail pour ne rien manquer du meilleur de l’info Inscription gratuite !
A l’intérieur du point des contrôles, des groupes de travailleurs forment des lignes ordonnées et attendent patiemment leur tour pour passer par des détecteurs de métaux et d’autres portiques automatiques (tous les travailleurs palestiniens en Israël ont des permis biométriques) alors que des soldats israéliens et des gardes de sécurité privés les observent à distance.
En l’espace de cinq à dix minutes, ils passent le point de contrôle et commencent à chercher les vans et bus qui attendent de les transporter vers leur lieu de travail.
Le point de contrôle est situé à l’extrémité sud de Kafr Aqab, le quartier le plus au nord de Jérusalem, qui est attenant à la barrière de sécurité et qui souffre depuis des années de services municipaux en décrépitude. Les
60 000 résidents de Kafr Aqab, dont beaucoup sont des résidents permanents d’Israël, et d’autres Palestiniens du centre de la Cisjordanie doivent passer par Qalandiya, et d’autres points de contrôle, pour parvenir au centre de Jérusalem.
Les travailleurs, qui ont différents emplois à travers Israël, ont très largement noté que le nouveau point de contrôle a véritablement facilité leurs déplacements vers le travail, en comparaison avec l’ancien point de passage.
« C’est beaucoup mieux », a déclaré Yousef Jabareen, qui travaille comme boucher au marché Mahane Zehuda de Jérusalem, alors qu’il était à la sortie Qalandiya. « Cela prenait environ une heure pour passer par l’ancien point de contrôle. Maintenant, ça ne prend que quelques minutes ce qui veut dire que j’ai une heure de sommeil en plus ».
Jabareen a déclaré qu’auparavant il quittait sa maison en Cisjordanie à 4h30 du matin pour arriver à Mahane Yehuda à 7 heures, mais que maintenant il part de chez lui à 5h30.
Des dizaines de milliers de Palestiniens passent en Israël toutes les semaines pour travailler dans des chantiers, des boutiques, des restaurants et d’autres endroits, où ils peuvent gagner des salaires beaucoup plus élevés que pour des emplois similaires en Cisjordanie.
L’ancien point de passage, qui est maintenant situé à côté du nouveau, ne disposait pas de l’infrastructure nécessaire pour faire transiter, de manière efficace, l’énorme volume de travailleurs, a déclaré Ina Friedman. Celle-ci a passé les dix dernières années à surveiller Qalandiya pour le compte de Machsom Watch, une organisation de défense de droits de l’homme qui observe le traitement des Palestiniens par Israël aux points de contrôle en Cisjordanie.
« Il n’y avait pas assez de points de contrôle à disposition pour le nombre de personnes qui traversaient chaque jour », a déclaré Friedman, supervisant l’entrée d’un ancien point de passage. C’est aussi simple que cela ».
Environ 4 000 personnes, principalement des travailleurs palestiniens, traversent à Qalandiya chaque matin, a déclaré le major Moti Stolovich, un officiel du Coordinateur du Gouvernement des Activités dans les Territoires (COGAT), l’organisme du ministère de la Défense responsable de la liaison avec les Palestiniens, lors d’une récente récente visite du point de contrôle avec des journalistes locaux et internationaux.
Le nouveau point de contrôle a six détecteurs de métaux et 27 portes automatiques qui lisent automatiquement les permis biométriques. Il dispose aussi de guichets pour les Palestiniens ou les étrangers qui ne possèdent pas de documents biométriques, où ils peuvent montrer aux soldats leurs cartes d’identification ou leurs passeports.
A l’inverse, l’ancien point de passage disposait de trois passages étroits que les Palestiniens devaient emprunter avant d’atteindre l’un des cinq points de contrôle, ou les travailleurs et d’autres devaient passer par des détecteurs de métaux et présenter manuellement leurs permis aux soldats.
L’ancien point de contrôle disposait aussi de toilettes, qui étaient souvent très sales. Les nouvelles toilettes du point de passage étaient fermées au moment de la visite.
Stolovich a déclaré qu’Israël a investi des dizaines de millions de shekels dans la construction de ce nouveau point de contrôle, qu’il a décrit comme « beaucoup plus rapide » et plus « confortable » que l’ancien.
Un officiel du COGAT qui a demandé à rester anonyme a ajouté que les autorités israéliennes ont fini, ou auront bientôt fini, de mettre à jour les différents points de contrôle en Cisjordanie.
Ahmad Abu Rub, âgé de 38 ans, qui travaille sur un site de fouilles à Jérusalem, a déclaré que le nouveau point de passage est plus organisé que l’ancien.
« C’est beaucoup mieux organisé. Les gens attendent en ligne et personne ne pousse les autres, a-t-il dit, en marchant vers une station de bus à proximité. Dans l’ancien point de contrôle, beaucoup de gens se poussaient et les soldats pouvaient alors décider de fermer toutes les sorties et tout le monde devait attendre jusqu’à ce qu’ils décident de recommencer à nous laisser passer. C’était très problématique ».
Un reportage télévisé en 2016, intitulé « Comme des animaux », traitant l’ancien point de passage a montré les scènes chaotiques de queues infinies, de personnes qui se poussent et de tensions.
Le reportage présentait un enregistrement en commentaire fait par l’ancien ministre d’Agriculture Uri Ariel à une station de radio sur les conditions auxquelles étaient confrontés les travailleurs palestiniens au point de passage, qu’il a décrit comme « une honte et une gêne pour l’Etat d’Israël ».
Même si, dans l’ensemble, les travailleurs ont exprimé leur satisfaction du nouveau point de contrôle, plusieurs autres Palestiniens, qui ne travaillent pas en Israël, l’ont durement critiqué.
« Il ne devrait rien y avoir ici. C’est mon droit d’aller de ville en ville dans mon pays sans passer par un point de passage, a déclaré Hanin, un coach en fitness âgé de 43 ans de Ramallah. Honnêtement, je suis choqué par ce nouveau point de passage. J’ai l’impression que l’occupation essaie de m’imposer une fausse réalité que nous passons ici entre deux Etats ».
Différentes formes de points de contrôle existent à Qalandiya depuis la deuxième Intifada au début des années 2000, quand des groupes terroristes palestiniens ont mené des attaques suicides à la bombe, des fusillades et d’autres attaques contre des Israéliens, tuant des centaines de civils et de soldats.
Azzam al Ahmad, un officiel du Fatah et de l’Organisation de Libération de Palestine (OLP), a déclaré qu’Israël « ne devrait pas travailler pour rendre les points de contrôle plus beaux, mais plutôt pour les retirer et mettre un terme à l’occupation ».
« Nous sommes un peuple qui veut sa dignité et la seule façon de l’obtenir est de mettre un terme à l’occupation et de fonder un Etat indépendant sur les lignes de 1967 avec Jérusalem est comme capitale », a déclaré Ahmad dans un appel téléphonique.
Interrogé sur la critique d’Ahmad du nouveau point de contrôle, l’officiel du COGAT qui a demandé à rester anonyme a dit : « Je ne réponds pas à cela. Tout le monde a le droit d’exprimer son opinion. Nous voulons fournir un meilleur service ici, a-t-il ajouté plus tard. Mon devoir est d’améliorer la circulation, l’accès et la vie quotidienne ».
Maher Awawda, un officiel du ministère de l’Information de l’Autorité palestinienne, a critiqué Israël qui demande aux travailleurs palestiniens d’utiliser des documents biométriques au point de contrôle.
« Il est totalement inacceptable qu’Israël utilise des documents biométriques pour les Palestiniens, a-t-il déclaré dans un appel téléphonique. « Pourquoi serait-il possible de détenir une base de données électronique sur des gens qui ne sont pas des citoyens ou qui ne votent pas aux élections ? »
Les autorités israéliennes demandent aux travailleurs palestiniens d’obtenir des permis biométriques. Un officiel de la sécurité, qui a parlé sous condition d’anonymat, les a défendus, en affirmant qu’ils permettent aux Palestiniens de passer rapidement tout en maintenant les protocoles sécuritaires.
Friedman, l’observatrice de Machsom Watch, a déclaré qu’elle pensait que le nouveau point de contrôle était une amélioration significative par rapport à l’ancien, mais elle a souligné que le contrôle militaire d’Israël sur la Cisjordanie était toujours en place.
« Qalandiya fonctionne maintenant très bien, c’est bien pour les gens et tout le monde est vraiment content, mais l’emprise plus globale d’Israël sur le peuple palestinien et la souffrance quotidienne qu’elle leur cause n’ont pas changé », a-t-elle déclaré.
Friedman a aussi noté qu’elle passerait maintenant moins de temps à Qalandiya et qu’elle se focaliserait sur la surveillance d’autres points de contrôle avec les mêmes équipements.
... alors c’est le moment d'agir. Le Times of Israel est attaché à l’existence d’un Israël juif et démocratique, et le journalisme indépendant est l’une des meilleures garanties de ces valeurs démocratiques. Si, pour vous aussi, ces valeurs ont de l’importance, alors aidez-nous en rejoignant la communauté du Times of Israël.
Nous sommes ravis que vous ayez lu X articles du Times of Israël le mois dernier.
C'est pour cette raison que nous avons créé le Times of Israel, il y a de cela onze ans (neuf ans pour la version française) : offrir à des lecteurs avertis comme vous une information unique sur Israël et le monde juif.
Nous avons aujourd’hui une faveur à vous demander. Contrairement à d'autres organes de presse, notre site Internet est accessible à tous. Mais le travail de journalisme que nous faisons a un prix, aussi nous demandons aux lecteurs attachés à notre travail de nous soutenir en rejoignant la communauté du ToI.
Avec le montant de votre choix, vous pouvez nous aider à fournir un journalisme de qualité tout en bénéficiant d’une lecture du Times of Israël sans publicités.
Merci à vous,
David Horovitz, rédacteur en chef et fondateur du Times of Israel