Kfar Aza: le mémorial du 7 octobre, une étape imprévue sur le sentier imaginé par feu Ofir Libstein
Le chef du conseil régional de Shaar Hanegev avait ouvert cet itinéraire touristique dix jours avant d'être tué par des terroristes ; sur les lieux, les signatures gravées dans le métal des résidents assassinés

Parmi les idées visionnaires d’Ofir Libstein, feu le chef du conseil régional de Shaar Hanegev, figurait un itinéraire touristique racontant l’histoire de l’implantation juive dans le désert du Néguev ainsi que les défis en matière de sécurité et de manque d’eau que cette région proche de la bande de Gaza était amenée à relever.
Entre 2021 et 2023, Libstein avait travaillé avec l’architecte Zvika Pasternak sur 14 arrêts pour les visiteurs, narrant l’histoire de différents sites, en commençant par la période qui avait précédé l’indépendance d’Israël.
Le sentier de randonnée longe un pipeline qui avait été installé en 1947 pour acheminer de l’eau dans cette région aride.
Le 27 septembre 2023, Libstein avait fêté l’ouverture du sentier comme il se doit.
Il était mort dix jours plus tard – assassiné par des terroristes du Hamas alors qu’il tentait de défendre sa communauté au kibboutz Kfar Aza.
Son fils, Nitzan Libstein, sa belle-mère, Bilha Epstein, et le neveu de son épouse, Netta Epstein, avaient également été froidement exécutés.

Ils avaient figuré parmi les 64 résidents de Kfar Aza qui avaient perdu la vie ce jour-là – alors que 250 hommes armés environ avaient pris d’assaut le kibboutz. Dans toute la région frontalière, des milliers de terroristes avaient massacré plus de 1 200 personnes, des civils en grande majorité. Ils avaient également kidnappé 251 personnes qui avaient été prises en otage dans la bande de Gaza. 19 d’entre elles vivaient à Kfar Aza.
Selon Pasternak, le rêve de Libstein était que le quinzième arrêt du sentier soit construit à Kfar Aza.
« Quelques semaines après sa mort, j’ai demandé à Vered, l’épouse d’Ofir, la permission de créer un site de commémoration à Kfar Aza », confie Pasternak au Times of Israel.
Une fois l’autorisation accordée, il s’est mis au travail avec les familles en deuil de leurs proches.
Alors qu’il a été ouvert au public au début du mois – mais il n’a pas encore été officiellement inauguré – le mémorial reprend le langage conceptuel des 14 autres arrêts en utilisant un tuyau stylisé pour raconter l’histoire du 7 octobre, pour localiser le site sur une carte du sentier et pour fournir un code-barre qui mène le visiteur vers un film explicatif.

Il y a des bancs et un sentier en béton brossé – similaire aux allées qui serpentent dans le kibboutz Kfar Aza. Le centre est coupé en deux par un ruban de gravier – symbole de la profonde blessure qui a été essuyée par la communauté le 7 octobre.
L’idée de Pasternak était initialement de demander aux familles ayant perdu un être cher d’écrire les noms de leurs 64 proches et de découper ces noms dans du métal.
« Mais un parent m’a dit : ‘Nous avons pourtant l’écriture de notre fils’, et nous avons compris que nous pouvions prendre l’écriture de chaque défunt comme si les personnes assassinées prenaient elles-mêmes part au projet », explique Pasternak.
Pasternak et son équipe ont passé un mois au kibboutz Shefayim, dans le centre d’Israël, où la communauté de Kfar Aza avait été initialement évacuée. Ils ont examiné toutes sortes de documents avec les familles, des journaux intimes, des notes griffonnées, avec pour objectif de trouver des exemples de la signature de chacune des victimes.

Lorsqu’il a fallu nommer le site, le nom « Ktav Yad », ce qui signifie « écriture » en hébreu, a été suggéré. Les familles ont proposé « Ketav Vashem » – « écriture et nom ». Lorsque Pasternak a fait remarquer que ce nom était similaire à celui de Yad Vashem, le mémorial israélien consacré aux victimes de la Shoah, « ils ont dit : ‘Oui, c’est effectivement ce que nous voulons’, » se souvient-il.
Il y a aussi une carte métallique de Kfar Aza, à travers laquelle le visiteur peut apercevoir la vraie Gaza, en particulier le quartier de Shejaiya, à Gaza City.
Pasternak explique qu’il a conçu la carte de cette manière en raison du rôle central joué par Gaza dans la vie du kibboutz.
Ce mémorial est le premier à avoir été construit dans une communauté rurale frappée le 7 octobre. Au mois de novembre, un monument commémoratif a été inauguré sur le site du commissariat de police démoli de la ville de Sderot, où des terroristes du Hamas avaient abattu 20 policiers avant de se barricader à l’intérieur. Après de violents échanges de tirs avec les forces de sécurité, le poste avait été détruit au bulldozer pour tuer les hommes armés qui se trouvaient encore dans le bâtiment.
Construit avec l’aide de l’Autorité chargée des assainissements et en collaboration avec l’Autorité régionale de Shaar Hanegev, ce dernier mémorial se trouve juste à l’extérieur de Kfar Aza. Les habitants ne sont pas encore prêts psychologiquement à décider de la manière dont ils commémoreront le 7 octobre au sein du kibboutz, indique Pasternak.

Ils vivent toujours dans des logements temporaires à l’extérieur de Kfar Aza, entre deux communautés (le kibboutz Shefayim et le kibboutz Ruhama dans le Néguev), résidant également dans des logements privés loués dans tout Israël. L’Administration Tekuma, chargée par l’État de réhabiliter la zone frontalière de Gaza, a été créée avec pour objectif d’achever les travaux de rénovation, à Kfar Aza, dans le courant de l’année prochaine.
Un accord a été conclu pour étendre le sentier jusqu’au kibboutz Zikim, à l’extrémité nord de la bande de Gaza, et jusqu’à Kerem Shalom, à l’extrémité sud, à la frontière égyptienne.
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