La députée du Meretz Rinawie Zoabi quitte la coalition, la mettant en minorité
Dans une lettre adressée à Bennett, l'élue arabe a déclaré qu'elle "ne peut pas soutenir une coalition qui harcèle honteusement" sa société
La député du Meretz Ghaida Rinawie Zoabi a démissionné de la coalition jeudi après-midi, la mettant en minorité à la Knesset et de ce fait, au bord de l’effondrement.
Dans une lettre adressée aux dirigeants de la coalition, le Premier ministre Naftali Bennett et le ministre des Affaires étrangères Yair Lapid, Rinawie Zoabi a affirmé que le gouvernement s’est déplacé vers la droite au cours des derniers mois.
« Malheureusement, ces derniers mois, en raison de considérations politiques étroites, les dirigeants de la coalition ont choisi de préserver et de renforcer leur flanc droit », écrit Rinawie Zoabi.
Elle a accusé le gouvernement d’adopter des « positions belliqueuses » sur des points critiques pour la société arabe, énumérant « al-Aqsa et le Mont du Temple, Sheikh Jarrah, l’entreprise d’implantation et l’occupation, la destruction de maisons et la confiscation de terres dans les communautés arabes du Néguev, et bien sûr la loi sur la citoyenneté ».
La députée de gauche a affirmé que le mois dernier a été « insupportable », citant les récents affrontements entre Palestiniens et policiers sur le Mont du Temple et la mort d’une journaliste d’Al Jazeera au milieu d’affrontements entre des palestiniens armés et des troupes de Tsahal lors d’un raid militaire dans la ville de Jénine, au nord de la Cisjordanie.
En tant qu’Arabe israélienne, Rinawie Zoabi, ajoute « ne pas pouvoir continuer à soutenir l’existence d’une coalition qui, de manière honteuse, harcèle la société dont je suis issue ».
Un porte-parole de Rinawie Zoabi a assuré au Times of Israel que la députée n’a pas de demandes immédiates ni de conditions dans lesquelles elle pourrait revenir au sein du gouvernement minoritaire du Premier ministre Naftali Bennett.
« Il est trop tôt pour parler de revendications. Pour l’instant, elle est hors de la coalition », a déclaré un de ses porte-parole.
Le porte-parole a refusé de dire si Rinawie Zoabi avait informé ses collègues du Meretz avant d’annoncer sa démission.
Un autre responsable du Meretz a déclaré au Times of Israel qu’ils n’ont appris la démission que lorsque les médias en ont parlé cet après-midi.
Bennett et le parti de gauche Meretz ont tous deux été surpris par sa lettre et l’ont appris par les médias.
Yair Golan, député du Meretz, a indiqué s’être entretenu avec Ghaida Rinawie Zoabi, membre de son parti, cette semaine, et a précisé qu’elle n’avait donné aucune indication de sa décision de démissionner de la Knesset.
« C’est la preuve d’un manque de compréhension politique de base. Je l’appelle à revenir sur cette décision fatale », aurait dit Golan, selon la chaîne publique Kan.
Le départ de Rinawie Zoabi intervient six semaines seulement après la démission de l’ancien porte-parole de la coalition et député de Yamina, Idit Silman. Le départ de Silman a poussé la coalition à la parité avec l’opposition, celui de Rinawie Zoabi la contraint à la minorité.
Les gouvernements israéliens ne sont pas dissous pas simplement parce qu’ils détiennent une minorité de sièges, ils doivent être renversés. Cependant, la situation est beaucoup plus précaire pour le gouvernement en difficulté et l’expose aux attaques d’une opposition qui détient 61 sièges.
La semaine dernière, le parti d’opposition Likud a retiré son projet de loi visant à dissoudre la Knesset et à forcer la tenue d’élections, après avoir échoué à obtenir le soutien nécessaire. En tant que projet de loi de l’opposition, il devrait passer sa première des quatre lectures avec une majorité simple, ou être sabordé pour les six prochains mois.
Avec Rinawie Zoabi qui fait tomber le nombre de membres de la coalition à 59, le Likud pourrait reconsidérer la présentation de son projet de loi de dissolution mercredi prochain, mais des sources au sein du parti affirment qu’il est encore trop tôt pour prendre une décision.
L’opposition, cependant, n’est pas unifiée dans ses alliances. Un bloc droite-religieux de 54 sièges s’ajoute aux 6 sièges détenus par le parti majoritaire arabe de la Liste arabe unie avec dorénavant, le siège de Rinawie Zoabi en plus.
Par ailleurs, deux des 54 députés du bloc de droite ont été élus avec le parti Yamina et subissent des pressions supplémentaires qui pourraient réduire leur capacité à voter contre la coalition autrement que par un vote de défiance constructif, une mesure immédiate dans le but de renverser le gouvernement.
Rinawie Zoabi a fait les gros titres pour s’être opposée à la coalition après avoir torpillé un vote de coalition serré en janvier. À l’époque, elle avait déclaré avoir émis le vote décisif contre le projet de loi visant à promouvoir l’enrôlement des ultra orthodoxes dans les rang de Tsahal, en signe de protestation contre les troubles dans le Néguev et l’avancement par la coalition de la loi dite de citoyenneté la semaine précédente.
Empêchant la plupart des Palestiniens qui épousent des Israéliens d’obtenir la résidence permanente, la loi sur la citoyenneté a été adoptée comme mesure de sécurité après la deuxième Intifada, mais reste profondément impopulaire dans la société arabe. Rinawie Zoabi l’a qualifiée de « loi raciste et fasciste ».
Rinawie Zoabi s’est rapidement vu offrir un rôle prestigieux, celui de prochain consul général à Shanghai, un geste que beaucoup ont interprété comme un isolement par le ministre des affaires étrangères Yair Lapid d’une variable inconnue de la coalition. Cependant, le poste ne sera pas libéré avant l’été et Rinawie Zoabi a annoncé aujourd’hui qu’elle rejette le poste et ne quittera pas la Knesset dans le but de l’occuper.