La Méditerranée orientale se réchauffe 2 fois plus vite que la moyenne mondiale – étude
Le niveau de la mer augmente de près de 40 % plus vite que la moyenne mondiale, l'eau est plus salée et les espèces envahissantes représentent plus de 50 % des proies capturées dans les filets d'échantillonnage
Sue Surkes est la journaliste spécialisée dans l'environnement du Times of Israel.

Selon le dernier rapport annuel de l’Institut israélien de recherche océanographique et limnologique (Israel Oceanographic and Limnological Research Institute), la mer Méditerranée continue de devenir plus salée et plus acide et se réchauffe deux fois plus vite que la moyenne mondiale.
Entre 1992 et 2023, le niveau de la Méditerranée orientale s’est élevé d’environ 15 centimètres, ce qui correspond à une augmentation moyenne d’environ 4,7 millimètres par an. Ce chiffre est à comparer à la moyenne annuelle mondiale de 3,4 millimètres, ce qui signifie que l’élévation est presque 40 % plus rapide.
Les algues envahissantes remplacent les algues indigènes sans apporter à la vie marine les avantages de ces dernières. De plus, deux espèces locales de poissons comestibles, autrefois courantes, étaient absentes des filets d’échantillonnage, une situation qui s’avère être préoccupante.
Cependant, ce rapport, basé sur le dernier d’une série de missions scientifiques, contient également quelques bonnes nouvelles, notamment une diminution des sacs en plastique sur les plages à la suite d’une réglementation gouvernementale et une tendance à la reconstitution de certaines populations marines dans la baie d’Haïfa, au nord d’Israël, où la vie industrielle est très intense.
Cette étude, qui couvre l’année 2023, indique que les températures de la couche supérieure de la mer Méditerranée orientale augmentent de 0,12 °C par an, soit plus du double de l’estimation de l’Organisation mondiale du climat (OMC) selon laquelle les mers du globe se réchauffent en moyenne de 0,055 °C par an.
Comme en 2022, les espèces invasives (non indigènes) représentaient plus de la moitié des proies capturées dans les filets d’échantillonnage. Des augmentations inquiétantes ont été observées dans le nombre de poissons-lions et d’oursins noirs dans les crêtes de Kurkar (sable fossilisé) peu profondes. Les oursins noirs, originaires de la mer Rouge, ont disparu d’Eilat, dans le sud d’Israël, à cause d’un parasite pathogène. Ceux de la Méditerranée sont envahissants.

Cette étude décrit la prolifération d’algues rouges envahissantes – Asparagopsis taxiformis – le long de toutes les côtes du pays. Elles ont été repérées pour la première fois en 2019. Comme elles ne sont mangées ni par les poissons ni par les invertébrés, ces algues se développent de manière anarchique et se détachent des rochers lors des tempêtes, s’accumulant sur les plages, notamment dans les villes situées au nord de Haïfa, dans le nord d’Israël.
En 2023, deux espèces locales de poissons comestibles – le rouget et la dorade rayée – étaient absentes des filets d’échantillonnage. Les chercheurs ont appelé à une surveillance continue, jugeant cette situation « préoccupante » et suggérant qu’elle était due au réchauffement de la mer et/ou à des espèces envahissantes qui les concurrencent pour la nourriture ou les poussent hors de leur habitat.

En 2021, deux espèces de raies ont été déclarées protégées pour un an. En 2022, une certaine tendance à la hausse du nombre de ces poissons a été enregistrée, mais elle semble s’être arrêtée en 2023.

En ce qui concerne la pollution, contrôlée chaque année dans l’eau de mer, les fonds marins, les estuaires des rivières, les mouillages et les tissus des animaux marins, les résultats pour 2023 indiquent une diminution des rejets industriels des usines dans la mer au sud de la baie de Haïfa.
Toutefois, les analyses ont également révélé une nouvelle augmentation des concentrations de mercure dans les poissons comestibles du golfe d’Akko, au nord de Haïfa, où 65 % des prises étaient contaminées. Le rapport indique que cette hausse est probablement due à des précipitations plus abondantes en 2023, ce qui aurait pour effet d’augmenter la quantité de mercure qui atteint la mer par le biais des eaux souterraines.
La lixiviation continue du mercure provient des eaux souterraines situées sous le site d’une usine abandonnée qui doit être assainie, et où la régénération des eaux souterraines n’a pas encore été effectuée.
Certains cours d’eau côtiers continuent de contenir des concentrations « inhabituelles et problématiques » de métaux et d’engrais, principalement en raison du rejet d’effluents de mauvaise qualité provenant de stations d’épuration et de déversements illégaux d’eaux usées.
Une « contamination inhabituelle » à l’arsenic métallique a été trouvée dans la marina de Tel Aviv à partir d’une source inconnue, et une pollution causée par de l’hexachlorobenzène illégal, un pesticide, a été identifiée dans le port d’Akko.
Du côté positif, cette étude note une tendance à la baisse de la quantité de sacs en plastique dans les déchets de plage, probablement grâce aux mesures prises par le ministère de l’Environnement, telles que le programme « plages propres », la loi sur les sacs et la récupération des sacs dans les égouts urbains.
Cependant, la concentration de microplastiques flottants dans les eaux peu profondes était plus élevée qu’en Méditerranée occidentale (1,2 article par mètre carré en Israël contre environ 0,7 en Italie).
Sur l’ensemble des tortues marines testées entre 2020 et 2023, 79 % avaient des déchets plastiques dans leur tube digestif, le nombre de particules de plastique par tortue allant de plusieurs centaines à plusieurs milliers.

Le programme national de surveillance élargi d’Israël fonctionne depuis 2019, avec un financement conjoint des ministères de l’Environnement et de l’Énergie, et conformément à la Convention pour la protection de la mer Méditerranée contre la pollution (Convention de Barcelone).