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La Nouvelle-Zélande traîne à rouvrir les dossiers d’anciens émigrés nazis

Le chasseur de nazis Efraim Zuroff a fourni une liste de 50 criminels de guerre présumés il y a plusieurs décennies, mais les gouvernements successifs n'ont pas agi

Image illustrative non datée de la division Waffen-SS "Wiking" en Russie. (Crédit : CC BY-SA Bild National Archives, Wikimedia Commons)
Image illustrative non datée de la division Waffen-SS "Wiking" en Russie. (Crédit : CC BY-SA Bild National Archives, Wikimedia Commons)

NOUVELLE-ZÉLANDE – La mort largement médiatisée de l’ancien soldat de la Waffen-SS, Willi Huber, survenue en Nouvelle-Zélande l’année dernière, a permis d’éveiller la conscience des Néo-Zélandais sur le fait que des criminels de guerre et des sympathisants nazis vivaient, ou avaient vécu, parmi eux.

Huber, qui a émigré en Nouvelle-Zélande en 1953, était un skieur passionné.

Souvent qualifié de « héros du pays » et de « père fondateur » du domaine skiable du Mt. Hutt, sur l’île du sud du pays, il a acquis un statut quasi légendaire dans le monde du ski et a été encensé par certains médias.

Il est mort sans avoir jamais exprimé publiquement le moindre regret pour ses actions pendant la guerre.

Depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, la Nouvelle-Zélande, comme l’Australie, a pu servir de point de chute à des réfugiés de guerre et autres personnes déplacées, principalement en provenance d’Europe.

Mais tous, semble-t-il, n’ont pas été honnêtes quant à leurs antécédents.

Huber a par exemple nié avoir eu connaissance des atrocités commises par la Waffen-SS ou de la persécution tout aussi bien documentée des Juifs pendant la Shoah.

Ce déni est critiqué par des membres éminents de la Fondation pour la Shoah et l’Antisémitisme d’Aotearoa Nouvelle-Zélande (HAFANZ), qui soulignent que les nazis de la Waffen-SS formaient une unité d’extermination qui opérait en dehors des cadres légaux de la guerre.

Ils insistent sur le fait que tout membre de cette organisation notoire aurait été tout à fait conscient de son modus operandi.

Ces sentiments sont partagés par le Dr. Efraim Zuroff, membre du Conseil international de HAFANZ et directeur du Centre Simon Wiesenthal à Jérusalem.

Historien éminent, Zuroff insiste sur le fait que « l’impénitent Huber aurait été tout à fait conscient des atrocités commises par les SS ».

Il a également souligné certains commentaires de l’émigré autrichien, selon lequel Hitler était « très intelligent » et « avait offert (aux Autrichiens) une issue » aux difficultés qu’ils avaient subies après la Première Guerre mondiale.

Zuroff, qui a consacré sa vie à traquer les criminels de guerre nazis et que l’on surnomme aujourd’hui « le dernier chasseur de nazis », affirme que lui et d’autres ont porté à l’attention du gouvernement néo-zélandais, lors d’une visite au début des années 1990, l’identité de plus de 50 criminels de guerre nazis présumés (46 ou 47 selon les rapports précédents) vivant dans le pays. (Le nom de Huber ne figurait pas parmi ceux fournis par Zuroff.)

« Ils étaient tous d’Europe de l’Est et principalement Lituaniens, et je suis sûr qu’il y en avait d’autres. Peut-être beaucoup d’autres », a déclaré Zuroff au Times of Israël fin avril, par téléphone depuis Jérusalem.

Le Dr. Efraim Zuroff, chasseur de nazis. (Autorisation)

« Nous n’avons aucune possibilité de vérifier ce qu’ils sont devenus. Je sais que le gouvernement néo-zélandais a nommé deux détectives pour enquêter sur (les personnes citées), mais le Premier ministre de l’époque a refusé de donner suite à leurs conclusions », a déclaré Zuroff.

Le fait que les gouvernements successifs de la Nouvelle-Zélande n’aient pas donné suite à ces conclusions reste un point sensible pour Zuroff.

« La Nouvelle-Zélande est le seul pays anglo-saxon, parmi la Grande-Bretagne, les États-Unis, le Canada et l’Australie, à avoir choisi de ne pas engager de poursuites judiciaires après une enquête gouvernementale sur la présence de nazis. Et ce, malgré le fait que l’enquêteur principal ait fourni une confirmation (de la présence d’un criminel de guerre nazi en Nouvelle-Zélande) qui aurait dû être prise en compte », a déclaré M. Zuroff.

L’enquêteur auquel il fait référence est le sergent-détective Wayne Stringer, depuis retraité, qui a indiqué que de nombreux suspects étaient déjà morts et qu’il avait pu en rayer d’autres de la liste.

Stringer a notamment confirmé que l’un des noms de la liste de Zuroff était Jonas Pukas, un ancien membre du redoutable 12e bataillon de la police lituanienne, qui a massacré des dizaines de milliers de Juifs pendant la guerre.

Illustration : Entrée principale du ghetto de Vilnius en Lituanie, pendant la Seconde Guerre mondiale. (Crédit : Wikimedia Commons/Domaine public)

Interrogé à son domicile néo-zélandais en 1992, Pukas, alors âgé de 78 ans, a insisté sur le fait qu’il n’avait fait qu’assister au meurtre de Juifs et qu’il n’y avait pas directement participé.

Cependant, il s’est réjoui, sur des enregistrements, de la façon dont les Juifs « criaient comme des oies » et il a ri en décrivant comment les victimes « volaient dans les airs » lorsqu’elles étaient abattues.

Malgré cela, le gouvernement de l’époque a décidé qu’il n’y avait pas suffisamment de preuves pour accuser Pukas d’un quelconque crime.

Il est mort deux ans plus tard, après avoir vécu ses dernières années dans une paix relative dans son pays d’adoption.

Les tentatives pour joindre l’ancien détective Stringer sont restées vaines.

Cependant, un article du Daily Mail Australia datant de 2012 cite Stringer déclarant : « Les commentaires (de Pukas) me hantent encore… Je suis convaincu que M. Pukas était un criminel de guerre. »

Les membres de la communauté juive de Nouvelle-Zélande partagent la frustration de Stringer. Ils souhaitent que la liste des noms identifiant les criminels de guerre et les sympathisants nazis, telle que fournie par Zuroff il y a près de trente ans, soit déclassifiée afin que les personnes identifiées soient publiquement identifiées.

Bien que Zuroff soit celui qui a fourni les noms, il a déclaré au Times of Israël qu’il refusait de les publier lui-même, car « c’était le devoir du gouvernement néo-zélandais ».

« Les personnes identifiées ont renoncé à tout droit à la vie privée, pour elles-mêmes ou leur famille, lorsqu’elles sont entrées dans le pays sous de faux prétextes. »

Un haut responsable de HAFANZ, qui a demandé à rester anonyme, a décrit le problème comme une honte de la Nouvelle-Zélande.

« Les bureaucrates gouvernementaux des administrations successives voulaient être convaincus que la déclassification des documents fournis et la désignation des personnes identifiées seraient dans l’intérêt public et ne porteraient pas atteinte à la vie privée », a déclaré le responsable de HAFANZ.

« Notre réponse est la suivante : la vérité (sur ce qui s’est passé et sur les responsables) est certainement dans l’intérêt public. Quant aux questions de vie privée, les individus identifiés ont renoncé à tout droit à la vie privée, pour eux-mêmes ou leur famille, lorsqu’ils sont entrés dans le pays sous de faux prétextes. »

Étant donné le temps qui s’est écoulé depuis la fin de la guerre et le fait que la plupart, sinon la totalité, des individus nommés sont maintenant décédés, les questions de vie privée seraient aujourd’hui plus susceptibles de s’appliquer aux proches survivants des personnes nommées.

Le membre de HAFANZ a déclaré qu’il espérait que la médiatisation du sujet inciterait le gouvernement actuel de la Nouvelle-Zélande à faire ce qu’il faut et à déclassifier les documents.

« Ce n’est que justice », a-t-il déclaré.

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