Le football palestinien compte sur les étoiles arabes israéliennes
Pour l'amour du drapeau ou pour un meilleur salaire, certains joueurs arabes israéliens font le choix de jouer en Cisjordanie
Pour la première fois depuis 30 ans, les footballeurs des Chabab de Hébron ont remporté cette année le championnat de Cisjordanie, un succès qu’ils doivent en grande partie à cinq nouveaux venus : des joueurs arabes israéliens.
Ils représentent aujourd’hui 17,5 % de la population israélienne, ont des papiers d’identité israéliens et peuvent donc évoluer dans les clubs de l’Etat hébreu, professionnels et mieux équipés que leurs concurrents palestiniens.
Mais certains font plutôt le choix de rejoindre des clubs des Territoires, pour l’amour du drapeau ou parfois… pour un meilleur salaire.
Haitham Dhib, défenseur de 29 ans, vit à Majd el-Kroum, une ville arabe du nord d’Israël, mais depuis huit ans, c’est en Cisjordanie qu’il joue au football. Il porte même, comme une demi-douzaine d’autres Arabes israéliens, le maillot de l’équipe nationale de Palestine, membre de la FIFA depuis 1998.
Dhib a joué en première et deuxième division israélienne mais le salaire et le public palestinien l’ont décidé à traverser la barrière de sécurité. « Pour les matches du championnat palestinien, le public vient en nombre, les médias vous traitent comme un vrai professionnel et ne voient pas le championnat comme une compétition d’amateurs », témoigne-t-il.
Les joueurs, dont les visages souriants s’étalent sur les panneaux publicitaires, sont de véritables stars et le football, une religion pour les Palestiniens.
Pour les clubs, des joueurs comme Haitham, formés en Israël, sont une occasion en or à ne pas laisser passer, explique à l’AFP l’entraîneur des Chabab Khader Obeid. « Là-bas, ils ont de vrais entraînements […)] professionnels et sérieux dès l’enfance. »
Rivalités
A la Fédération israélienne de football, on se refuse à « parler de phénomène » car les chiffres de joueurs partis « ne sont pas énormes ». Et, note Eitan Dotan, en charge de la communication, « plusieurs sont revenus dans la ligue israélienne pour des raisons de conditions d’entraînement mais aussi pour répondre à des demandes ».
Il y a encore quelques mois, Obeida Abou Rabie (26 ans) jouait en deuxième division israélienne. Mais il a décidé de rejoindre les Chabab au début de l’année.
Un peu par nationalisme, affirme celui dont le père est emprisonné en Israël. Mais aussi parce qu’il voulait participer à l’essor du championnat palestinien.
« La professionnalisation du football est meilleure en Israël mais ici, elle se développe et je suis sûr que dans quelques années, le championnat sera totalement pro », explique-t-il.
Cette amélioration est due en partie aux joueurs arabes israéliens qui « ont plus de capacités et apportent une force supplémentaire au championnat palestinien », assure à l’AFP Abdel Majid Haja, secrétaire général de la Fédération palestinienne de football.
En 2012, les deux fédérations, qui interpellent régulièrement la FIFA pour qu’elle joue les arbitres entre elles, s’étaient même disputé un joueur : Ali al-Khatib, parti d’un club palestinien de Jérusalem pour rejoindre un autre, israélien, à Haïfa.
Finalement, les deux parties n’ont pas mis à exécution la menace de saisir la FIFA et le joueur, enregistré à la Fédération israélienne, y joue toujours.
La lune de miel entre les joueurs arabes israéliens et les équipes palestiniennes tourne parfois au cauchemar. En avril, la Confédération asiatique de football (AFC) a déclaré perdant un club palestinien parce que certains de ses joueurs arabes israéliens n’avaient pu disputer un match de la Coupe AFC au Liban.
Détenteurs de passeports israéliens, ils sont interdits d’entrer dans de nombreux pays arabes, qui jouent dans les mêmes compétitions régionales que les équipes palestiniennes.