Le gouvernement appuie l’allongement de la durée du service des réservistes, malgré l’indignation
La commission des Lois soutient le projet de loi prolongeant la mesure d'urgence de trois mois et approuve une proposition de Loi fondamentale accordant certains avantages aux réservistes
Le gouvernement a apporté son soutien dimanche à un projet de loi visant à retarder le départ à la retraite des réservistes de l’armée israélienne, dans un contexte de critiques généralisées de ses politiques de recrutement qui, selon de nombreux Israéliens, imposent un fardeau inégal aux différents segments de la population.
La proposition, un « projet de loi sur le service de sécurité » soutenu par le ministère de la Défense, appelle à prolonger de plusieurs mois une mesure temporaire portant l’âge d’exemption pour le service militaire de réserve de 40 à 41 ans pour les soldats et de 45 à 46 ans pour les officiers, en raison d’une pénurie de main-d’œuvre constante.
Les spécialistes tels que les médecins et les membres du personnel navigant devront continuer à servir jusqu’à 50 ans, au lieu de 49 ans.
Le relèvement actuel de l’âge d’exemption, initialement adopté par la Knesset à la fin de l’année dernière, doit expirer à la fin du mois.
Après avoir annulé dimanche matin une discussion prévue au sein du cabinet sur cette mesure à la suite de vives critiques de la part de la population, le gouvernement a renvoyé la question à la commission des Lois de la Knesset. La commission a approuvé l’envoi du projet de loi à la Knesset, où il doit faire l’objet de trois lectures avant de faire loi.
S’il est finalement approuvé par la Knesset, le projet de loi marquera la deuxième extension de la mesure, qui a été conçue comme une solution palliative pour empêcher une sortie massive des réservistes atteignant l’âge d’exemption au cours des opérations de combat en cours dans la bande de Gaza.
Elle a été prolongée pour la première fois de quatre mois par un vote de la Knesset (44-33) à la fin du mois de février.
Bien que le ministère de la Défense ait demandé à ce que la mesure soit prolongée jusqu’à la fin de l’année, la commission n’a soutenu qu’une prolongation de trois mois, suite aux objections de la procureure générale Gali Baharav-Miara.
Dimanche, Baharav-Miara a déclaré au gouvernement que le projet de loi était juridiquement inacceptable à moins qu’un effort immédiat ne soit fait pour recruter des forces militaires supplémentaires « dans toute la population », une référence aux dizaines de milliers d’ultra-orthodoxes – ou Haredim – étudiant en yeshiva qui bénéficient d’exemptions générales du service militaire.
Le gouvernement a dû faire face à de vives réactions de la part de l’opinion publique pour avoir prolongé le service des réservistes tout en semblant ne pas prendre de mesures pour enrôler les ultra-orthodoxes. La commission des Affaires étrangères et de la Défense de la Knesset doit débattre mardi d’un projet de loi visant à abaisser l’âge de l’exemption du service obligatoire pour les Haredim étudiant en yeshiva.
Le projet de loi vise à exempter les étudiants en yeshiva du service militaire à l’âge de 21 ans tout en augmentant « très lentement » le taux de conscription des ultra-orthodoxes.
Suite à l’annonce de la commission de soutenir le projet de loi, le chef de l’opposition Yaïr Lapid a accusé le gouvernement de faire de la discrimination « entre le sang et le sang », déclarant que l’extension signifie un service supplémentaire pour ceux qui sont déjà dans l’armée « alors que le gouvernement promeut une loi d’évasion massive pour les jeunes Haredim ».
Tout en prenant soin de ne pas commenter la législation en vigueur et de ne pas s’immiscer dans la politique, le chef d’état-major de Tsahal, le lieutenant-général Herzl Halevi, a également approuvé l’intégration des ultra-orthodoxes dans l’armée, dans des propos rendus publics dimanche.
S’adressant à des soldats lors d’une visite à Gaza au cours du week-end, Halevi a déclaré qu’il y avait « un besoin évident » de soldats haredim et que chaque « bataillon ultra-orthodoxe [que l’armée met en place] réduit la nécessité de déployer plusieurs milliers de réservistes ».
Au cours des huit derniers mois, les réservistes se sont plaints des problèmes économiques et familiaux engendrés par leurs longs séjours à répétition dans l’armée. Dans de nombreux cas, les conjoints se sont retrouvés seuls pour s’occuper des enfants – parfois avec des écoles et des jardins d’enfants fermés en raison de la guerre, selon la région – et ont été incapables de travailler pendant des mois.
Au moment où la commission a voté en faveur de la hausse de l’âge d’exemption, elle a également approuvé une proposition de Loi fondamentale rédigée par le parti HaTzionout HaDatit et soutenue par les législateurs de la coalition et de l’opposition.
Le projet de loi consacrerait le devoir de réserve comme une « valeur fondamentale » de l’État et accorderait un traitement préférentiel aux réservistes en matière d’achat de terres, d’admission dans les universités et d’emploi dans la fonction publique.
L’intention du projet de loi était de fournir aux réservistes « un statut spécial, de leur donner une reconnaissance », a déclaré son auteur, le député Ohad Tal (HaTzionout HaDatit ), au Times of Israel – ajoutant que l’égalisation du fardeau [surnom du service militaire en Israël] entre les Israéliens ultra-orthodoxes et leurs pairs dans le service nécessite de « changer la structure des incitations », à la fois positives et négatives.
Interrogé sur la manière dont il concilie son soutien aux réservistes avec son vote en faveur du projet de loi sur l’enrôlement des Haredim, Tal a appelé à amender la législation controversée pour renforcer l’application de la loi afin d’enrôler ceux qui prétendent seulement étudier en yeshiva – mais il a déclaré qu’il n’y avait pas de voie immédiate pour enrôler tous les ultra-orthodoxes et qu’il pensait à long-terme.
Permettre aux étudiants de quitter leur yeshiva et d’entrer sur le marché du travail à l’âge de 21 ans favoriserait une meilleure intégration dans la société et l’économie israéliennes, ce qui permettrait à un plus grand nombre de Haredim de servir à l’avenir, a soutenu Tal.
« Je veux qu’ils fassent partie de l’économie israélienne, qu’ils contribuent, qu’ils paient des impôts, parce que je pense que c’est le seul moyen. De plus, pour leurs enfants, s’ils font partie de la société, je n’ai aucun doute que leurs enfants, lorsqu’ils examineront la question de savoir s’ils doivent s’engager dans l’armée, seront dans une situation différente », a-t-il ajouté.
« On ne peut pas changer 76 ans de mentalité dans un projet de loi », a poursuivi Tal.
« Il n’y a pas de projet de loi qui puisse faire bouger les choses demain. Vous pouvez lancer le processus. Dans vingt ans, dans une génération, nous verrons un changement complet. »