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Le Tombeau de Joseph : un microcosme du conflit israélo-palestinien

Le Tombeau de Joseph, sacré dans toutes les religions, a été secoué par de multiples violences au cours des dernières décennies

Des Juifs au Tombeau de Joseph dans la ville de Naplouse, en Cisjordanie, tandis que des soldats israéliens montent la garde, en février 2010. Illustration. (Crédit : Abir Sultan/Flash90)
Des Juifs au Tombeau de Joseph dans la ville de Naplouse, en Cisjordanie, tandis que des soldats israéliens montent la garde, en février 2010. Illustration. (Crédit : Abir Sultan/Flash90)

Une délégation officielle d’activistes, de rabbins et d’experts en incendies criminels a profité de l’obscurité pour se rendre dans le Tombeau de Joseph à Naplouse au milieu de la nuit de dimanche, après que le lieu a connu son pire acte de vandalisme en 15 ans la semaine dernière.

Le chef sépharade Rabbi Yitzhak Yosef, le chef du Conseil régional de Samarie Yossi Dagan et le chef de Samarie le rabbin Elyakim Levanon menaient cette délégation pour évaluer les dommages au cours d’un déplacement autorisé par Tsahal, pré-requis indispensable à toute visite du site.

La nuit de samedi à dimanche, un groupe d’une trentaine d’Israéliens avait tenté d’accéder au site sans autorisation préalable de l’armée sous prétexte de vouloir évaluer les dommages que le site avait subis.

Cinq membres du groupe avaient été abordés puis attaqués par les forces de police palestiniennes avant d’être remis à Israël et que Tsahal n’extraie du site le reste des Israéliens.

La pierre tombale du Tombeau de Joseph, remplacée il y a quelques années après des heurts dans le bâtiment en 2000, a été brisée, ainsi que certaines parties du plafond et du sol et le feu a endommagé d’autres zones du bâtiment. Voilà ce qu’a rapporté David HaIvri, porte-parole régional de Samarie.

Le Tombeau de Joseph, à l’Est de Naplouse, est situé dans la zone A, ce qui signifie que l’Autorité palestinienne y exerce un contrôle sécuritaire et civil. Les accords d’Oslo ont désigné le Tombeau de Joseph comme étant l’un des deux lieux saints juifs qui pouvaient rester sous contrôle israélien dans la zone A, comme l’a expliqué le brigadier général (à la retraite) Ilan Paz, ancien chef de l’administration civile de Tsahal entre 2002 et 2005.

Le deuxième lieu saint sont les vestiges d’une synagogue du 6e ou 7e siècle à Jéricho sur les murs de laquelle on peut voir une mosaïque représentant un chofar avec les mots « Paix sur Israël » et qui abrite également une minuscule yeshiva.

Paz, qui est également un haut membre de l’initiative de Genève qui préconise une solution à deux états, a déclaré que les Accords d’Oslo exigent que l’Autorité palestinienne maintienne et protège le site et autorise les fidèles juifs à prier ici même si cette exigence n’est pas toujours respectée.

Au cours de ces dernières décennies, le Tombeau de Joseph a été témoin de plusieurs épisodes de violence.

En 1996, six soldats y ont été tués pendant des émeutes. Après le début de la deuxième intifada le 1er octobre 2000, un important conflit entre les forces de sécurité israéliennes et palestiniennes a blessé Madhat Yusuf, un policier druze âgé de 19 ans. Les forces de sécurité palestiniennes ont empêché une évacuation médicale pendant plus de cinq heures et Yusuf est mort sur place.

A la suite de la mort de Yusuf, Ehud Barak – le Premier ministre de l’époque – a ordonné à toutes les forces de sécurité de se retirer de cette zone. Pendant ce temps, les forces palestiniennes qui réparaient le site ont peint le dôme en vert, la couleur de l’islam.

Cet acte a suscité la peur dans certains cercles juifs qui craignaient que les Palestiniens ne veuillent transformer le site en mosquée. Cédant à la pression de la communauté internationale, les Palestiniens ont repeint le dôme peu après, explique Shmuel Berkovits, avocat et professeur expert des lieux saints et conseiller des accords de Camp David.

Des hommes priant au tombeau de Joseph dans la ville de Naplouse en Cisjordanie en 2011 (Crédit : Yaakov Naumi / Flash90)
Des hommes priant au tombeau de Joseph dans la ville de Naplouse en Cisjordanie en 2011 (Crédit : Yaakov Naumi / Flash90)

En 2002, l’armée a commencé à autoriser des visites intermittentes dans le Tombeau. Ces dix dernières années, les visiteurs juifs avaient le droit de se rendre sur le site avec une autorisation préalable conjointe du Conseil de la région de Samarie et de Tsahal.

« En raison de l’importance de ce lieu pour la nation juive et, dans le but de permettre une liberté de culte sur le site, l’entrée des Juifs est soumise à l’autorisation et l’accompagnement par les forces de Tsahal », a déclaré un porte-parole de l’armée dimanche.

En avril 2011, un policier palestinien avait tué Ben-Yosef Livnat, neveu de l’ancienne ministre des Sports et de la Culture Limor Livnat. Celui-ci avait tenté de se rendre sur le site accompagné d’un groupe de hassidiques de Breslev qui n’avait pas obtenu d’autorisation de Tsahal.

Ce site est l’une des trois transactions immobilières bibliques mentionnées dans la Torah. Les deux autres sites achetés pour de l’argent par les populations locales sont le Tombeau des Patriarches à Hébron et le mont du Temple à Jérusalem, a expliqué Yair Almakyas, directeur de l’école de Shomron Field.

Selon le Nouveau Testament, Jésus serait passé par le site du Tombeau de Joseph à Naplouse et le site est également mentionné par de nombreux écrits historiques, notamment ceux du voyageur du 12ème siècle Benjamin de Tudèle, explique Almakyas.

Le site se situe à l’Est de la Vieille Ville de Naplouse qui était conforme à la conception du cimetière dans les anciennes villes juives. Etant donné que les vents dominants viennent souvent de l’Ouest, les cimetières étaient en général situés à l’Est de la ville dans le but de maintenir les odeurs à l’écart, a ajouté Almakyas, qui a participé aux visites guidées du Tombeau de Joseph au moins une vingtaine de fois.

Le Tombeau de Joseph est également un lieu saint pour les Musulmans, bien que le Coran ne mentionne pas l’exact emplacement du tombeau. Certains Musulmans pensent que le Tombeau de Joseph est la résidence finale d’un cheikh appelé Joseph, mais pas forcément le Joseph de la Bible, précise Paz.

Ce tombeau est le deuxième lieu le plus saint pour les Samaritains, après le mont Garizim. Les Chrétiens le considèrent eux aussi comme un lieu saint, même si les pèlerins chrétiens sont peu nombreux à s’y rendre.

Même si le Tombeau est considéré comme l’un des cinq lieux sacrés du judaïsme après le mont du Temple, le mur Occidental, le Tombeau des Patriarches et le Tombeau de Rachel, son emplacement géographique isolé fait que peu de Juifs s’y rendent pour prier. Quand les visites sont autorisées par l’armée, ce qui arrive toutes les trois ou quatre semaines, elles ont généralement lieu au milieu de la nuit.

« C’est en plein milieu du territoire palestinien, c’est donc compliqué et dangereux de s’y rendre », constate Berkovits, l’expert des lieux saints en Israël.

« Dans des endroits comme le Tombeau de Rachel ou le Tombeau des Patriarches, il y a toujours une présence israélienne. [Au Tombeau de Joseph] il n’y a pas de Juifs, que ce soit à l’intérieur ou à l’extérieur, l’armée n’est pas présente sur place et le lieu est placé sous la responsabilité de l’Autorité palestinienne. On ne peut pas se lever et décider d’aller visiter le Tombeau de Joseph le lendemain. C’est vraiment compliqué d’y accéder et c’est pourquoi les Juifs s’y rendent si peu souvent ».

Mais le chef du conseil de Samarie, Dagan, insiste sur le fait que des centaines de fidèles qui participent aux visites guidées qui ont lieu environ une fois par mois prouve que de nombreuses personnes ressentent une connexion avec ce site.

« Il y a des dizaines de milliers de visiteurs, aussi bien des religieux que des individus laïques, des gens qui viennent de l’étranger, des ministres… Le public veut s’y rendre et s’exprime avec ses pieds », a expliqué Dagan au Times of Israel. Mais Dagan a précisé que les fidèles doivent respecter des « dispositifs d’ordre d’entrée existants » et ce, dans le but de protéger leur vie.

Shmuel Rabinowitz, le rabbin du mur Occidental et d’autres lieux saints, a également condamné la décision des jeunes Israéliens qui s’étaient rendus sur le site sans autorisation préalable des forces de sécurité. « Ces gens mettent non seulement leurs propres vies en danger mais nous tous également s’ils sont enlevés – que Dieu les en préserve – par des malfaiteurs » a-t-il expliqué dans un communiqué.

Les dirigeants politiques ont unanimement condamné la destruction du Tombeau vendredi.

Capture d'écran de l'incendie allumé par des émeutiers palestiniens au tombeau de Joseph à Naplouse en Cisjordanie, le 16 octobre 2015
Capture d’écran de l’incendie allumé par des émeutiers palestiniens au tombeau de Joseph à Naplouse en Cisjordanie, le 16 octobre 2015

« Nous n’avions pas été témoins de ce type de vandalisme depuis 2000 », a affirmé Dagan. « Quand on voit l’étendue des dégâts, on a juste envie de pleurer. Ils ont tout bonnement tout brûlé ».

A la suite de la destruction, des membres d’une yeshiva d’extrême droite qui se trouvait avant sur le site ldu Tombeau de Joseph exigent que l’armée les autorise à y retourner pour établir une yeshiva sur le lieu saint contesté. Les dirigeants de la yeshiva Od Yosef Hai qualifient l’acte de vandalisme de vendredi de « pogrom ». Ils ont exigé du Premier ministre Benjamin Netanyahu et de l’armée une « annulation immédiate et complète de la monstruosité terroriste que représentent les ‘accords d’Oslo’ et un retour du contrôle juif à Naplouse et dans le reste d’Israël », selon le site internet Kipa.

L’unité des porte-paroles de Tsahal a refusé de répondre aux questions relatives à l’avenir du site, dont des questions qui concernaient un éventuel arrêt des visites en raison du climat politique tendu.

Mais Paz, l’ancien directeur de l’administration civile, a déclaré que la violence continuerait inévitablement.

« Tant que l’armée prendra la responsabilité d’emmener des Juifs, il y aura encore des attaques », a-t-il déploré.

Répétant que les Palestiniens ne respectaient pas leur part de l’accord en ce qui concerne la maintenance ou les réparations du site, il a ajouté : « Je ne dis pas que ces attaques sont justifiées. Mais ce site se situe au cœur du Territoire palestinien et il n’y a aucun moyen de coopérer avec eux ».

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