Le voyage de Doug Emhoff à la rencontre de ses racines juives ancestrales
L'époux de la vice-présidente américaine Kamala Harris est allé en Allemagne et en Pologne - se souvenant de ses propres grands-parents, partis trouver un refuge en Amérique
BERLIN (JTA) — Pour le Second gentleman des États-Unis, Douglas Emhoff, l’époux de la vice-présidente américaine Kamala Harris, les dernières heures d’un déplacement de cinq jours en Pologne et en Allemagne ont aussi été les plus émouvantes.
C’est là, dans le centre d’information souterrain du mémorial de la Shoah de Berlin, qu’Emhoff s’est entretenu avec plusieurs survivants du génocide juif – et notamment avec deux survivants qui venaient de fuir l’Ukraine, ravagée par la guerre.
Assis sur des chaises, formant un petit cercle, les survivants ont raconté leur histoire. « L’une d’eux » – une femme – « a été sauvée de la Shoah alors qu’elle était bébé, sa famille s’est établie en Ukraine et aujourd’hui, elle a dû prendre la fuite encore une fois. Elle est finalement arrivée en Allemagne », a dit Emhoff à la sortie de cette rencontre. « C’était vraiment émouvant, c’était une manière intense de finir ce voyage ».
Le déplacement – qu’il a effectué en compagnie de Deborah Lipstadt, l’envoyée spéciale américaine à la lutte contre l’antisémitisme – a été l’occasion de visiter Cracovie, en Pologne ; le mémorial et le musée d’Auschwitz-Birkenau ainsi que le village polonais où vivait la famille d’Emhoff, Gorlice.
Le voyage visait à appuyer la mise en place d’un « plan national d’action contre l’antisémitisme » sur lequel travaille Emhoff, aux côtés de Lipstadt et d’autres. L’époux de la vice-présidente américaine Kamala Harris a fait du combat contre la haine anti-juive sa priorité depuis qu’il est entré à la Maison Blanche, écumant les campus des universités pour parler du sujet et organisant des événements avec les organisations juives.
Mais ce voyage, qui a commencé vendredi – pour coïncider avec la Journée internationale de commémoration de la Shoah – n’a pas seulement placé les initiatives prises par Emhoff sur la scène internationale : Il a été l’occasion d’un pèlerinage plus intime qui lui a permis d’aller à la rencontre de ses racines juives ancestrales.
Pendant les quarante-huit heures passées à Berlin, Emhoff a été pris dans un tourbillon. Lundi, il a rencontré l’ambassadrice des États-Unis en Allemagne, Amy Gutmann ; le commissaire allemand à la vie juive, Felix Klein, et d’autres responsables. Mardi, lui et Lipstadt ont pris part à une table ronde interconfessionnelle accueillie par le Conseil central des Juifs d’Allemagne avant de visiter la synagogue historique de ce qui était, dans le passé, Berlin-Est et de rencontrer des membres de la communauté. Il a aussi visité trois mémoriaux de la Shoah du centre-ville : L’un était consacré aux Sinti et aux Roms victimes des nazis, un autre aux homosexuels tués dans les camps et il s’est enfin rendu au site de commémoration massif édifié en mémoire des Juifs d’Europe assassinés.
S’exprimant, mardi matin, devant un petit auditoire composé de musulmans, de chrétiens et de Juifs au siège du Conseil central, Emhoff a raconté qu’il ne pouvait pas s’empêcher de penser à ses arrière-grands-parents qui avaient fui les persécutions en Pologne et qui s’étaient installés aux États-Unis.
« Ils y ont trouvé une nouvelle chance et la liberté », a-t-il expliqué. « Et aujourd’hui, 120 ans plus tard, leur arrière-petit-fils est l’époux d’une vice-présidente et il lutte pour combattre la haine et l’antisémitisme. Ce n’est pas rien, n’est-ce pas ? », a-t-il interrogé avait d’ajouter, comme se parlant à lui-même, « une boucle remarquable est dorénavant bouclée ».
Abraham Lehrer, vice-président du Conseil central, a déclaré aux invités que les relations interconfessionnelles entre Juifs et Chrétiens étaient généralement bonnes et que les deux groupes ont développé des canaux de communication susceptibles d’être utilisés « dans un contexte d’important conflit ».
Les relations avec les musulmans sont bonnes sur le terrain, a-t-il noté, mais « elles sont très difficiles avec les dirigeants de certaines organisations, beaucoup d’entre eux entretenant encore des liens avec des organisations antisémites ou anti-démocratiques ». Les participants à la table ronde ont tous reconnu, après la réunion, « le climat positif » dans lequel cette dernière s’est déroulée.
« J’ai été très impressionné par ce jeune musulman [Burak Yilmaz] qui organise des voyages pour ses jeunes coreligionnaires à Auschwitz, », a déclaré le rabbin Szolt Balla, qui dirige une congrégation de Leipzig et qui est rabbin dans l’armée allemande. « Cette table ronde a été une très bonne chose, elle a été très productive », a-t-il ajouté.
Emhoff a expliqué aux journalistes que l’objectif du voyage était de partager des méthodes et de trouver de nouvelles idées pour le « plan national d’action » sur lequel il travaille avec Lipstadt, avec l’ambassadeur américain à la liberté religieuse internationale Rashad Hussain et avec Shelley Greenspan, qui assure la liaison entre la Maison-Blanche et la communauté juive américaine.
« Nous allons réfléchir ensemble, évoquer ce que nous avons appris et l’intégrer à notre travail de manière à ce que nous puissions mettre en place le plan national le plus efficace possible », a dit Emhoff aux journalistes après les rencontres de la journée. Il a indiqué qu’il allait prendre la parole aux Nations unies au début du mois de février.
La dernière étape du programme officiel d’Emhoff en Allemagne a été ses entretiens avec les survivants. Il avait modifié son emploi du temps « pour pouvoir les rencontrer et les écouter », a expliqué Rudiger Mahlo, représentant en Allemagne de la Claims Conference (Conference for Jewish Material Claims Against Germany).
Sonja Tartakovska, qui avait survécu à une exécution de masse dans son village pris d’assaut par les nazis pendant la Seconde Guerre mondiale, a raconté à Emhoff sa fuite de l’Ukraine, l’année dernière, sans même prendre un vêtement de rechange. Elle était l’une des Juives ukrainiennes que la Claims Conference a fait venir en Allemagne au printemps dernier, a précisé Mahlo, qui a participé à la rencontre.
Le fait que d’anciennes victimes de la Shoah soient aujourd’hui venues trouver un refuge en Allemagne n’est pas passé inaperçu.
« On parle de la Shoah, on parle de l’antisémitisme, on parle des violences, de l’oppression et ici, en Europe, de longues années après la Seconde guerre mondiale, il se passe encore ces horreurs qui sont aujourd’hui commises dans le cadre de cette guerre injuste, gratuite », a confié Emhoff aux journalistes après ses derniers entretiens du jour.
Et, de la part de personnes telles que Tartakovska, « on entend ces histoires de survie. Il y a en partie le coup du sort, il y a de la chance. Avec un étranger non-Juif qui décide sur une impulsion de faire quelque chose – et ce quelque chose débouchera finalement finalement sur la vie sauvée, sur une vie qui pourra être pleinement vécue. »
« J’ai aussi été frappé : Une femme » – une survivante allemande de la Shoah, Margot Friedlaender — « était âgée de 101 ans. Imaginez-vous vivre pendant 80 ans avec ces souvenirs-là… C’est ce genre de choses que je vais ramener avec moi », a dit Emhoff.
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