Les dirigeants juifs européens à Porto pour observer la renaissance de la communauté
Le nombre de Juifs vivant dans cette ville du nord du Portugal a triplé ces dernières années grâce à une nouvelle loi sur la citoyenneté et à l'arrivée de centaines d'étudiants en médecine juifs français
PORTO, Portugal – Des dizaines de dirigeants de la communauté juive européenne se sont réunis dans la ville portugaise de Porto lundi pour une conférence sur les stratégies communautaires, notamment les leçons tirées de la façon dont les Juifs locaux de la ville ont attiré des centaines de nouveaux fidèles.
« Les dirigeants de la communauté juive de Porto peuvent être un excellent exemple de la façon dont quelques individus qui croient au judaïsme, à l’avenir de la vie juive, peuvent accomplir un travail magnifique », a déclaré le rabbin Menachem Margolin, directeur de l’Association juive européenne, un groupe basé à Bruxelles qui a accueilli la conférence à Porto.
Composée d’environ 1 000 membres, la communauté juive de Porto a triplé de taille ces dernières années, en partie grâce à l’adoption, en 2015, d’une loi qui donne la citoyenneté portugaise aux descendants des Juifs qui ont été expulsés du pays pendant l’Inquisition, qui a débuté au Portugal en 1536.
Aidée par l’augmentation du nombre de membres et par l’arrivée de centaines d’étudiants juifs français à l’université locale, la communauté a agrandi ces dernières années sa synagogue – qui avait été sa seule possession pendant des dizaines d’années – avec un musée, une boucherie casher, une autre synagogue et un cimetière juif.
« Il y a cinq ans, lorsque je suis arrivé à Porto, c’était un désert en ce qui concerne la vie juive », a déclaré Ilan Cohen, un étudiant en médecine juif français né en Tunisie, âgé de 23 ans, qui a rencontré sa femme juive à Porto.
« Aujourd’hui, il y a une présence et une vie juives robustes et il y a un minyan tous les jours à la synagogue », a-t-il déclaré, utilisant le terme hébreu pour désigner le quorum d’au moins 10 hommes juifs requis pour certaines prières selon la halakha, la loi juive orthodoxe.
La croissance de la communauté s’est toutefois accompagnée de quelques tensions.
Ces derniers mois, la communauté juive de Porto a accusé le gouvernement d’antisémitisme à la suite d’une enquête de police sur le traitement des demandes de citoyenneté par la communauté. La police a déclaré que l’enquête portait sur des fraudes et la communauté a nié toute irrégularité. À ce jour, l’enquête n’a donné lieu à aucune mise en examen.
Margolin n’a pas commenté le différend, mais a déclaré que, quoi qu’il en soit, « ce qui a été réalisé ici peut être une source d’inspiration pour d’autres petites communautés, qui sont aujourd’hui en difficulté ».
C’est la raison pour laquelle l’Association juive européenne a choisi Porto comme ville hôte de sa conférence annuelle, dont le titre était cette année « Façonner ensemble l’avenir du judaïsme européen », a déclaré Margolin.
Le Grand Rabbin néerlandais Binyomin Jacobs a déclaré lors de la conférence que sa communauté était de plus en plus menacée par l’antisémitisme et l’assimilation.
Sa maison, qui fait l’objet d’une surveillance policière constante, a été vandalisée à cinq reprises au cours des dernières années et, le week-end dernier, il a été accosté dans la rue à deux reprises par des jeunes hommes ou des adolescents qui lui ont crié des slogans sur la Palestine, a-t-il déclaré.
« Je n’ai pas besoin de regarder les journaux télévisés pour savoir qu’il se passe quelque chose en Israël. Je n’ai qu’à compter le nombre de fois où la police passe devant notre maison », a déclaré Jacobs.
D’autres membres, dont Jacky Benzennou, chef de la communauté juive de la ville belge de Waterloo, qui compte 250 membres, ont déclaré qu’ils étaient plus préoccupés par l’assimilation que par l’antisémitisme.
« Nous sommes moins affectés par la haine des Juifs. La principale menace à laquelle nous sommes confrontés en tant que communauté est celle des mariages mixtes », a déclaré Benzennou, ajoutant qu’il n’était pas certain de la viabilité à long-terme de sa communauté.
« L’avenir du judaïsme européen est entre nos mains », a déclaré Margolin en réponse à ces préoccupations.
« Le message de notre conférence de Porto est que si nous trouvons la force de nous unir, de construire et de nous battre quand il le faut, alors notre avenir est garanti », a déclaré Margolin.
Les participants ont signé une déclaration exhortant « les gouvernements nationaux qui préparent des plans nationaux de lutte contre l’antisémitisme, ou qui ont déjà préparé des plans, à dissocier l’antisémitisme de toutes les autres formes de haine et à le traiter de manière isolée ».
L’antisémitisme est un phénomène unique qui nécessite une réponse adaptée.
Parmi les responsables qui se sont exprimés lors de la conférence, en personne ou à distance, figurent le ministre israélien des Affaires de la Diaspora, Amichaï Chikli, Elise Fajgeles, secrétaire générale de la délégation interministérielle pour la lutte contre le racisme et l’antisémitisme, et son homologue portugais, Pedro Bacelar de Vasconcelos.