Israël en guerre - Jour 433

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Révolution vs. Évolution

Les femmes ultra-orthodoxes ne sont pas des féministes

La forte augmentation du taux d'emploi chez les femmes orthodoxes pourrait changer leur rôle au sein de leurs familles

Des femmes ultra-orthodoxes sur leur lieu de travail (Crédit : Nati Shohat / Flash90)
Des femmes ultra-orthodoxes sur leur lieu de travail (Crédit : Nati Shohat / Flash90)

Pour la première fois depuis la création de l’Etat d’Israël, les femmes ultra-orthodoxes sont maintenant susceptibles d’être plus employées que les femmes non-ultra-orthodoxes.

Selon le Bureau central des statistiques, environ 75-80 % des femmes ultra-orthodoxes ont un emploi, contre 75 % dans la population féminine en général. Depuis 2000, l’emploi des femmes ultra-orthodoxes a augmenté à un rythme stupéfiant de 30 %.

Dans tous les secteurs, le taux d’accroissement de l’emploi des femmes est souvent un signe encourageant de l’autonomie des femmes, et la société ultra-orthodoxe n’est pas différente.

Mais les femmes ultra-orthodoxes -ou Haredi- ne qualifieront jamais cette tendance par le mot ‘féminisme’.

En raison de cette augmentation du taux d’emploi, la situation des femmes Haredi est en pleine révolution au sein de leurs communautés car elles commencent à suivre des études supérieures et une carrière professionnelle.

« Maintenant, les femmes se demandent ‘quel est mon rôle dans la famille ?’ « , a dit Tzipora Gutman, la directrice d’un centre pour jeunes filles en difficulté qui fait partie des Programmes Mandel pour le développement du leadership dans la Communauté Haredi.

Gutman a parlé lors d’un colloque de l’Institut israélien de la démocratie intitulé « La femme Haredi au 21e siècle : famille, collectivité et société« , qui a eu lieu le 21 décembre à Jérusalem.

« Personne n’appelle cela du féminisme ou de l’indépendance, mais ce sont des questions fondamentales que nous devons tous nous poser. Bien que ces voix soient une minorité, ce sont des voix qui sont très importantes pour le leadership [Haredi] et les principaux rabbins ».

Plus d'une vingtaine de femmes ultra-orthodoxes, dirigeants, éducateurs, rabbins, et sociologues se sont réunis à l'Institut de la démocratie en Israël pour un colloque intitulé «La femme Haredi au 21e siècle: famille, collectivité et société." (Photo: Melanie Lidman / Times of Israel)
Plus d’une vingtaine de femmes ultra-orthodoxes, dirigeants, éducateurs, rabbins, et sociologues se sont réunis à l’Institut de la démocratie en Israël pour un colloque intitulé «La femme Haredi au 21e siècle: famille, collectivité et société. » (Photo: Melanie Lidman / Times of Israel)

L’évolution du rôle des femmes dans la société Haredi est double : des études plus professionnelles et plus d’options pour l’emploi. Alors que beaucoup de femmes ultra-orthodoxes ont dit que le changement fait partie d’un changement culturel interne, des experts externes ont souligné la pression économique externe, comme la réduction des allocations familiales en 2003, qui a poussé les ultra-orthodoxes sur le marché du travail.

Deux parents, un salaire

Les femmes ultra-orthodoxes ont une position unique par rapport aux mères dans les autres familles biparentales. En Israël, elles ont toujours été respectueuses envers leurs maris, mais aussi les principaux soutiens de famille.

La culture Haredi honore par-dessus tous les hommes qui consacrent leur vie à étudier la Torah, de sorte que cela pousse les femmes à être le seul parent qui travaille. Cela signifie que les femmes sont souvent responsables à la fois du travail et de l’éducation de leurs enfants.

« Les femmes Haredi ont un feu intérieur, elles sont la base réelle de la société Haredi », a déclaré Naomi Perl, la directrice des Programmes Mandel pour le développement du leadership dans la Communauté Haredi. «Les femmes ultra-orthodoxes sont le moteur idéologique de la communauté. »

Alors que la culture ultra-orthodoxe dans le monde a toujours eu la plus grande estime pour ceux qui étudiaient la Torah à plein temps, après la fondation de l’Etat d’Israël, cela a pris une tournure tout à fait différente.

Tzipora Gutman, directrice d'un centre pour jeunes filles en difficulté et experte en politique éducative, dit que les femmes ultra-orthodoxes commencent à remettre en question leurs rôles traditionnels dans la famille (Photo: Melanie Lidman / Times of Israel)
Tzipora Gutman, directrice d’un centre pour jeunes filles en difficulté et experte en politique éducative, dit que les femmes ultra-orthodoxes commencent à remettre en question leurs rôles traditionnels dans la famille (Photo: Melanie Lidman / Times of Israel)

« Pour les Haredim, après la Shoah, il y a eu un grave souci que le mode de vie Haredi soit menacé de disparition, qu’il ne serait pas assez fort pour survivre », a expliqué Gutman.

« Les [dirigeants] ont adopté une ligne idéologique selon laquelle la façon d’assurer la survie était d’avoir autant que possible d’hommes étudiant la Torah. Cela signifie que dans les années 1990, les deux tiers des hommes haredim ne travaillaient pas. »

Les femmes étaient une partie importante de cette campagne, parce que quand elles vont travailler, elles permettent à leurs maris de poursuivre leurs études. « Il y a des femmes qui voient ce genre de soutien comme un immense bonheur et un honneur », a poursuivi Gutman. « Les femmes travaillent si dur, mais elles en sont très heureuses. »

Les hommes étudiant à plein temps dans un kolel (yeshiva pour les hommes mariés) reçoivent une petite allocation du gouvernement.

Environ 55 % des hommes ultra-orthodoxes étudient à temps plein et ne travaillent pas, selon Shahar Ilan, vice-président de Hiddush, une organisation qui milite pour la pleine intégration des Haredim dans l’armée et sur le marché du travail ainsi que sur d’autres questions de liberté religieuse dans la société civile.

Selon Hiddush, le gouvernement verse une allocation à environ 110 000 étudiants de yeshiva (70 000 hommes mariés, et 40 000 hommes célibataires de plus de 18 ans). Il y a en plus, 15 000 étudiants de yeshiva qui étudient à temps plein mais ne prennent pas d’argent du gouvernement, notamment pour des raisons idéologiques.

Des étudiants dans une yeshiva harédi (Crédit photo: Nati Shohat/Flash90)
Des étudiants dans une yeshiva harédi (Crédit photo: Nati Shohat/Flash90)

L’allocation du gouvernement est d’environ 900 shekels (209 euros) par mois, et généralement le kolel double ce montant en collectant des fonds et des dons. Quelque 10 000 étudiants de yeshiva reçoivent une allocation supplémentaire de 1 000 shekels par mois du gouvernement parce qu’ils ont trois enfants ou plus.

La véritable raison économique qui permettait aux femmes de rester à la maison et d’élever leur famille ou de travailler très peu d’heures était les allocations familiales, selon Ilan.

Jusqu’en 2003, une famille de dix enfants reçevait environ 6 000 shekels par mois. Benjamin Netanyahu, qui était ministre des Finances entre 2003 et 2005, a réduit considérablement les allocations familiales pendant son mandat. Une famille avec dix enfants reçoit désormais entre 2 000 et 3 000 shekels par mois.

« Les allocations familiales étaient une sorte de salaire, mais la baisse des allocations familiales a contraint les familles Haredi à trouver de nouvelles sources de revenus », a expliqué Ilan. « La réaction immédiate a été d’envoyer les femmes travailler. »

Ultra-Orthodox Jewish children, April 2010 (photo credit: David Vaaknin/Flash90)
Des enfants ultra-orthodoxes à Jérusalem, en avril 2010 (Crédit photo : David Vaaknin/Flash90)

Pour les femmes ultra-orthodoxes, travailler pour que leurs maris puissent étudier à plein temps est un symbole de statut. Même la rabbanit Adina Bar Shalom, la fille de feu l’ancien chef spirituel du Shas le Rav Ovadia Yossef et l’une des leaders féminins Haredi prééminentes, dit qu’elle a ressenti la même pression peu après son mariage.

« Je suis l’exemple classique. Je lui ai demandé de ne pas travailler pour que je puisse être le soutien de famille, » a confié Bar Shalom lors du colloque.

Son mari, Ezra Bar Shalom, a étudié à temps plein avant de devenir juge rabbinique. « Cela n’importait pas combien nous devions travailler, nous voulions qu’il continue à étudier la Torah, quoi qu’il advienne, » a-t-elle dit.

« Des femmes ont même menacé de divorcer si leurs maris cessaient d’étudier et allaient travailler. S’ils ne peuvent pas « s’accomoder » en étudiant la Torah, ils portent cette frustration et cette déception en eux-mêmes pendant des années ».

Il y a du changement dans l’air

Vardit Rozenblum, une avocate tant devant les tribunaux civils que rabbiniques pour l’Institut Midat ​​pour la politique de la Torah, a expliqué que la position ultra-orthodoxe d’être en mode de survie paniqué après la Shoah diminuait lentement.

« Ce fut un temps de guerre, les gens étaient dans une situation de guerre », a-t-elle dit au Times of Israel. « Les Haredim ont grandi avec l’idée ‘Nous allons à la guerre’. Ils ne posent pas de questions du genre ‘Est-ce que [l’étude de la Torah toute la journée] est bonne pour moi ?’ Telles sont les questions que vous pouvez vous poser uniquement lorsque vous n’êtes pas en lutte pour la survie. Le sentiment pour ma génération était que vous deviez amener tous les jeunes dans cette guerre ».

Cette mission collective de la lutte pour la survie a prévalu dans l’ensemble de la société ultra-orthodoxe pendant les 70 dernières années, a déclaré Rozenblum, qui est aussi diplômée de l’Institut Mandel pour le leadership Haredi.

Naomi Perl, co-fondarice du Ron Shulamit Conservatory pour jeunes filles Haredi à Har Nof (à gauche), et Vardit Rozenblum, avocate pour Midat, lors du colloque de l'Institut israélien de la démocratie le 21 décembre 2015. (Photo: Institut israélien de la démocratie)
Naomi Perl, co-fondarice du Ron Shulamit Conservatory pour jeunes filles Haredi à Har Nof (à gauche), et Vardit Rozenblum, avocate pour Midat, lors du colloque de l’Institut israélien de la démocratie le 21 décembre 2015. (Photo: Institut israélien de la démocratie)

« Mais nous avons gagné cette guerre ; elle s’est terminée et nous l’avons gagnée », dit-elle. Il est clair que le mode de vie Haredi n’est plus menacé, et qu’ils ne sont plus une minorité menacée.

Selon une étude de 2015 de l’Institut de Jérusalem d’études israéliennes, il y a environ 830 000 ultra-orthodoxes en Israël, ce qui représente 11 % de la population. Si les tendances demographiques actuelles se poursuivent, d’ici 2059 les ultra-orthodoxes representeront entre 30 à 40 % de la population.

« Quand les gens revenaient de la guerre, les voix les plus complexes ne sont pas sorties », a expliqué Rozenblum. « Maintenant que nous ne nous battons pas pour notre survie, nous pouvons nous permettre d’être critiques. »

Pour Rozenblum, cela signifie que les familles devraient se demander, ‘Est-ce la bonne décision pour mon fils d’étudier seulement la Torah ? Est-ce que c’est ce qu’il veut ? A-t-il la disposition et la capacité, de s’assoir et d’étudier toute sa vie ?’

Cette remise en cause affecte également le rôle des femmes.

« Nous sommes arrivés à cette situation où le monde de la Torah n’est plus en danger », a expliqué Gutman. « Cela signifie que mon rôle en tant que femme de le sauver n’est pas un besoin critique. »

« Au fur et à mesure que les femmes deviennent plus professionnellement émancipées, elles sont en contact avec le reste de la société israélienne et elles comprennent vraiment les notions de satisfaction et de développement personnels, et sont retournées à la société Haredi avec de nouvelles idées », a-t-elle dit.

Il est également clair que la situation actuelle des ultra-orthodoxes n’est pas durable.

« Il ne se peut pas que l’homme ne travaille pas, que la femme n’étudie pas [à l’université], et qu’ils aient assez d’argent pour acheter un appartement pour leur fils qui ne travaillera pas non plus, » a ajouté Gutman.

Passer un diplôme, aller travailler

Il y a deux décennies, le Conseil de l’enseignement supérieur a estimé qu’environ seulement 500 Haredim par an étudiaient pour des diplômes universitaires. Cela était dû à la fois à un manque d’établissements Haredi et à l’intense pression sociale pour rester dans les rôles traditionnels d’emploi pour les haredim, qui sont principalement l’éducation.

Mais en 2015, environ 10 000 Haredim (hommes et femmes) ont étudié pour obtenir des diplômes ou certificats avancés.

Un diplôme permet aux femmes de travailler dans plus de professions et de gagner plus d’argent, et les femmes ultra-orthodoxes sont aujourd’hui engagées dans de nombreux types de cursus.

« Il fut un temps où beaucoup de femmes ultra-orthodoxes étaient obligées d’être éduquées, car cela les maintenait ‘en securité’, même dans le monde du travail », a déclaré le Dr Mira Greenberg, une psychologue en éducation et conseillère parentale au Collège Talpiyot pour l’éducation, un collège national-religieux qui a des cursus séparés pour les femmes ultra-orthodoxes.

« Mais alors, la société Haredi a créé tellement d’institutrices et de jardinières d’enfants et il n’y avait même pas assez de travail pour toutes. »

Bar Shalom a fondé le Collège haredi de Jérusalem en 2001, qui compte aujourd’hui plus de 2 000 diplômées. Il propose aux femmes des diplômes en sciences de laboratoire, en musicothérapie et en psychologie, entre autres matières.

L'ancien ministre de l'Intérieur, Eli Yishai, embrasse la main du défunt leader spirituel du parti ultra-orthodoxe Shas Ovadia Yosef au cours de la cérémonie d'inauguration du nouveau siège du Collège Haredi à Jérusalem le 14 décembre 2009 (Crédit photo: Abir Sultan / Flash90)
L’ancien ministre de l’Intérieur, Eli Yishai, embrasse la main du défunt leader spirituel du parti ultra-orthodoxe Shas Ovadia Yosef au cours de la cérémonie d’inauguration du nouveau siège du Collège Haredi à Jérusalem le 14 décembre 2009 (Crédit photo: Abir Sultan / Flash90)

Bien que les études supérieures Haredi aient augmenté de façon exponentielle, il s’agit encore d’une tendance quelque peu radicale pour les hommes comme pour les femmes parce qu’il est nouveau.

La pression peut être encore plus intense pour les hommes, parce que cela signifie qu’ils font le choix explicite de ne pas apprendre la Torah à plein temps. Le Collège offre des cursus pour les hommes avec des études à temps partiel de la Torah dans le cadre du diplôme, et des programmes comme Kemach essaient aussi de combiner les études religieuses et les études professionnelles. Parfois, les femmes cachent même à leur famille élargie ou à leurs voisins le fait qu’elles apprennent un métier, a déclaré Rozenblum.

« Il y a eu un combat [des rabbins Haredi] contre les femmes qui suivaient des études universitaires », a déclaré Gutman. « Elles se trouvaient exposées à de nouvelles personnes et à de nouvelles façons de penser ; elles ne savaient même pas que ces choses existaient. C’était une grande menace pour le mode de vie Haredi traditionnel ».

« [Les femmes ultra-orthodoxes] terminent leurs diplômes quand les autres femmes rentrent chez elles », a déclaré la professeur en Science politique et en Communication Ines Gabel, qui n’est pas Haredie mais enseigne aux étudiants Haredi à l’Open University. « Même si elle est encore croyante, il y a encore des choses qu’elle a vu et qu’elle ne peut ne pas pas voir. »

Bar Shalom témoigne de cette transformation chez les étudiantes du Collège Haredi.

« Les étudiantes de première année, si elles entendent un mot sur le féminisme, elles ne reviendront pas en classe », a déclaré Bar Shalom.

« Elles disent ‘nous sommes arrivées pour apprendre dans un environnement Haredi !’ En troisième année, nous pouvons organiser une conversation avec le rabbin et la rabbanit qui les accompagnent pendant leurs études, et elles disent ‘Qu’est-ce que vous voulez dire par le mari a toujours raison ?! Cela est impossible, je peux avoir raison, moi aussi ! »

Adina Bar Shalom, la fille du chef spirituel du Shas, le défunt Ovadia Yosef (Crédit photo: Flash90)
Adina Bar Shalom, la fille du chef spirituel du Shas, le défunt Ovadia Yosef (Crédit photo: Flash90)

Le refoulement des dirigeants ultra-orthodoxes vient aussi parce qu’ils savent qu’un diplôme mènera à un emploi, peut-être même dans le monde extérieur.

« Les femmes ultra-orthodoxes reçoivent des messages divers, voire contradictoires », a déclaré Ilan, de Hiddush. « La société leur dit ‘vous devez être éduquées parce que vous devez apporter de l’argent qui permettra aux hommes d’étudier la Torah’. Mais elle leur dit aussi ‘il n’est pas bon pour les femmes d’être importantes. Vous ne devriez pas faire de carrière. La raison pour laquelle vous travaillez n’est pas de vous satisfaire, ceci n’est pas important. La seule chose qui importe vraiment est que vous allez apporter de la nourriture à votre famille et donner à vos maris la possibilité d’étudier la Torah' ».

Les femmes qui sortent dans le monde du travail créent des tensions non seulement dans la société ultra-orthodoxe, mais aussi probablement dans leurs foyers.

« Il peut y avoir des problèmes là où l’homme étudie uniquement la Torah, cela n’est pas seulement un prix matériel, mais aussi un prix spirituel », selon Rozenblum. « Il peut menacer l’intimité du couple, parce que l’homme reste dans le monde fermé de la Torah, alors que la femme sort dans le monde. »

Révolution vs. Évolution

Malgré les défis, les temps changent, comme le montrent le nombre d’étudiantes inscrites et les taux d’emploi des femmes. Mais beaucoup de dirigeantes ultra-orthodoxes soulignent que tout changement significatif pour les femmes doit venir de l’intérieur de leur propre communauté.

Les révolutions sont parfois nécessaires pour créer un changement radical, mais dans les sociétés conservatrices, il peut souvent créer une opposition si forte que toute tentative de changer sera contrecarrée. La meilleure approche, disent-elles, est de favoriser un changement évolutif et progressif, le développement naturel qui est finalement adopté comme mainstream.

« Les changements devront partir d’en bas, pas par des changements de politique, » dit Gabel, la professeur qui enseigne les Médias et la Communication aux femmes ultra-orthodoxes à l’Open University. « Ce type de développement ne peut venir que de la base. »

Mais même changer de l’intérieur ne sera pas simple.

Bar Shalom a combattu pendant des années pour obtenir l’accord nécessaire des rabbins pour permettre aux élèves de s’inscrire dans le Collège Haredi sans faire face à un isolement social.

Avant de fonder le collège en 2001, elle a subi une campagne de diffamation placardée sur des pashkevillim (affiches qui diffusent des informations dans les quartiers ultra-orthodoxes) et des attaques personnelles contre elle.

Un Juif ultra-orthodoxe lisant un "Pashkvil" - une affiche d'information - dans le quartier de Méa Shearim, le 19 août 2014 à Jérusalem (Crédit photo: Yonatan Sindel / Flash90)
Un Juif ultra-orthodoxe lisant un « Pashkvil » – une affiche d’information – dans le quartier de Méa Shearim, le 19 août 2014 à Jérusalem (Crédit photo: Yonatan Sindel / Flash90)

Bar Shalom a réussi avec peine dans sa tentative de créer un changement, alors même qu’elle était la fille du chef spirituel du monde ultra-orthodoxe.

Elle est toujours dans la bataille quotidienne pour encourager les femmes (et les hommes) à s’inscrire. Alors qu’elle envisageait de se présenter à la Knesset lors des dernières élections, son principal souci était que son entrée dans la vie politique risquait d’entacher le nom de tous les étudiants associés au Collège Haredi comme étant trop radical. Bar Shalom a finalement décidé de ne pas se présenter, mais a dit qu’il y aura des candidates ultra-orthodoxes dans l’avenir « quand le moment sera venu. »

Le pésident israélien d'alors Shimon Peres visite le Collège haredi de Jérusalem le 20 novembre 2011. (Crédit photo: Uri Lenz / Flash90)
Le pésident israélien d’alors Shimon Peres visite le Collège haredi de Jérusalem le 20 novembre 2011. (Crédit photo: Uri Lenz / Flash90)

Selon Rozenblum, les forces externes essayant de réformer la société ultra-orthodoxe peuvent faire plus de mal que de bien, comme Yair Lapid, le leader du parti Yesh Atid. Lapid a beaucoup parlé des questions telles que l’enrôlement des Haredi dans l’armée israélienne, la réduction des budgets des yeshiva, et l’introduction d’un programme de base dans l’éducation ultra-orthodoxe.

« [Lapid] dit des choses radicales qui nous ont affectés à court terme, qui nous ont fait fermer les voies pour le changement », a-t-elle dit. « Ce processus se passe lentement, c’est un développement naturel. »

Ilan est en désaccord avec le concept que le changement ne doit venir que de l’intérieur. « Le changement se produit principalement en raison de la pression de l’extérieur », a-t-il répondu.

« Le changement s’est produit parce que Netanyahu a coupé les allocations familiales, et que la société israélienne a dit ‘nous ne sommes pas prêts à payer plus pour que vous ne travaillez pas’. »

« Mais cette pression extérieure ne peut pas être une pression directe », a ajouté Ilan. « Vous ne pouvez pas les forcer à aller à l’université. Il doit être indirect, comme la coupe des allocations, qui est le genre de pression qui fonctionne. Vous ne pouvez pas dire ‘faites ceci, ou faites cela’ parce que cela créerait une situation où ils diraient ‘C’est contre la Torah !’ La Torah peut être très souple pour le leadership Haredi, il peut être tout ce qu’ils veulent qu’elle soit. »

Ilan a déclaré que des actions telles les incitations financières pour les écoles qui enseignent aux garçons des matières profanes comme les mathématiques et l’anglais seront plus efficaces que d’essayer de forcer toutes les écoles à enseigner ces matières. « C’est la carotte, et non le bâton, » a-t-il dit.

Les réactions à la pression directe ont été évidentes ces dernières semaines avec des immenses manifestations contre l’enrôlement obligatoire des ultra-orthodoxes dans l’armée, auxquelles ont participé des dizaines de milliers d’étudiants de yeshiva dans le quartier de Mea Shearim haredi de Jérusalem.

Des Juifs ultra-orthodoxes manifestent contre l'incorporation dans l'armée, dans le quartier de Mea Shearim à Jérusalem, le 22 décembre 2015 (Crédit photo: Yonatan Sindel / Flash90)
Des Juifs ultra-orthodoxes manifestent contre l’incorporation dans l’armée, dans le quartier de Mea Shearim à Jérusalem, le 22 décembre 2015 (Crédit photo: Yonatan Sindel / Flash90)

Le gouvernement et les institutions peuvent prendre des mesures concrètes pour encourager les femmes ultra-orthodoxes à entreprendre des études professionnelles et à entrer sur le marché du travail en créant des lieux de travail qui sont adaptés pour ce public, ou soutenir des programmes qui incitent les entreprises à embaucher des ultra-orthodoxes, a dit Rozenblum.

Rozenblum a rappelé l’histoire de Rabbi Shimon Bar Yohai, qui étudiait la Torah dans une grotte avec son fils Rabbi Eléazar, se nourrissant uniquement de caroubiers. Après 12 ans d’études, ils sont sortis de la grotte et ont vu des gens qui travaillaient dans leurs champs. Ils ont été choqués que des gens puissent être engagés dans les « affaires du monde » plutôt que dans l’étude de la Torah. Une voix céleste leur a alors ordonné de retourner dans la grotte pour une année supplémentaire. Quand ils en sont sortis à nouveau, Bar Yohai et son fils avaient une perspective différente sur le travail.

« Il y a un processus de sortir de cette grotte, » a-t-elle dit. « Si vous sortez brusquement, cela peut causer des dommages et vous couper du monde. La jeune génération comprend que la sortie doit être faite par étapes ».

« Chez nous, le mot ‘changement’ fait un peu peur », a ajouté Rozenblum. « Nous l’utilisons comme un mot négatif. Mais maintenant, peu à peu, le changement est en train de devenir un peu plus positif ».

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