Les policiers accusés d’avoir « menti » dans l’affaire Sarah Halimi
Thiéman Diarra, voisin de Sarah Halimi, dit avoir lancé ses clés à la police avant le meurtre, ce qui aurait pu permettre aux agents d'intervenir rapidement et d'éviter le meurtre
La Commission parlementaire d’enquête sur les éventuels dysfonctionnements de la justice et de la police dans l’affaire Sarah Halimi, formée en juillet dernier, poursuit actuellement ses travaux et auditions et doit rendre son rapport final en janvier prochain.
Le 20 octobre, le député UDI Meyer Habib, qui préside la commission, a révélé sur Facebook que, pendant l’audition de M. Thiéman Diarra (père) et Mlle. Soumpo Diarra (fille), locataires de l’appartement par lequel l’assassin Kobili Traoré est entré pour se rendre chez Sarah Halimi via le balcon, Thiéman Diarra avait confirmé avoir jeté à la police son trousseau de clés comportant un vigik et deux clés dont celle du domicile des Diarra. « Les policiers sont rentrés chez les Diarra (à 5h35) sans fracturer la porte. Ils sont donc rentrés avec les clés ! », a écrit Meyer Habib.
« Les policiers avaient les clefs leur permettant d’entrer chez les Diarra depuis 4h20 du matin, contrairement à ce qu’ils disent en procédure », a réagi le « Groupe Pas Silencieux », mouvement de contestation suite à la décision de justice déclarant Kobili Traoré irresponsable pénalement.
« Selon le père Diarra, ils sont entrés chez eux à 5h35 pour interpeller Kobili Traoré avec ces clefs alors que les policiers ont toujours affirmé être entré chez eux en forçant la porte. Si c’est confirmé c’est très grave, car il est clair que les policiers auraient pu facilement empêcher l’assassinat de Sarah Halimi en entrant chez les Diarra à 4h22 soit quinze minutes avant que Sarah Halimi ne soit défenestrée par Kobili Traoré. D’autant qu’ils avaient reçu l’autorisation d’entrer chez les Diarra de la part de leur hiérarchie à 4h30 et que, selon les premiers messages reçus, l’individu n’était pas armé », a écrit Nathanaël Majster, avocat à la cour, sur la page du mouvement.
« Pourquoi les policiers ont-ils menti ? Quelle est la portée pénale et judiciaire de ce mensonge ? Une enquête pour non-assistance à personne en danger peut enfin démarrer et le rôle global de la police être examiné. Rappelons également que la falsification de procès-verbaux de police est un faux en écritures publiques et que la peine devient criminelle lorsque l’auteur est un dépositaire de l’autorité publique. Si la clef a été écartée volontairement de la procédure par les policiers – et de fait elle ne figure dans aucun scellé – ce sont des faits de destruction ou de modification de preuves qui pourraient être retenus. Enfin le rôle et la connaissance de ces faits que pouvait avoir le parquet devra être examiné. Une nouvelle enquête judiciaire globale – confiée à un parquet indépendant – est inévitable dans ce qui pourrait se révéler être un scandale policier et judiciaire majeur. »
Suite à ces révélations, Shimon Samuels, directeur des relations internationales du Centre Simon Wiesenthal, a appelé à une réouverture de l’enquête.
Le 14 avril dernier, la Cour de cassation avait confirmé l’irresponsabilité pénale du meurtrier de Sarah Halimi, pris d’une « bouffée délirante » – selon les conclusions de sept experts psychiatriques consultés par la justice – au moment du meurtre. Au cri de « Allah Akbar », il avait roué de coups et jeté par-dessus le balcon de leur immeuble sa voisine Lucie Attal, aussi appelée Sarah Halimi, le 4 avril 2017 à Paris.
Cette décision a provoqué de nombreuses critiques, et des rassemblements ont eu lieu dans toute la France fin avril.