L’Otan signifie ses « lignes rouges » à Moscou et serre les rangs face à Pékin
"Nous ne cherchons pas un conflit avec la Russie, mais nous répondrons si la Russie continue ses activités", a averti Joe Biden.
Les dirigeants de l’Otan ont signifié lundi leurs « lignes rouges » à Vladimir Poutine avant sa réunion avec Joe Biden et ont décidé de faire front commun face à l’entrisme de la Chine en Europe lors de leur sommet annuel à Bruxelles.
« La Russie et la Chine cherchent à nous diviser, mais notre alliance est solide. L’Otan est unie et les Etats-Unis sont de retour », a soutenu le président américain lors de sa conférence de presse.
La déclaration adoptée lors du sommet traduit les préoccupations des alliés : la Russie, la Chine, les nouvelles menaces dans l’espace et le cyber-espace, le terrorisme, la montée des régimes autoritaires. Le texte long de 45 pages compte 79 points.
La Russie reste la préoccupation numéro un de l’Alliance. « Tant que la Russie ne montre pas qu’elle respecte le droit international et qu’elle honore ses obligations et responsabilités internationales, il ne peut y avoir de retour à la normale », ont averti les Alliés. Mais « nous restons ouverts à un dialogue périodique et substantiel », ont-ils assuré.
Moscou mis en garde
Joe Biden doit rencontrer le président russe Vladimir Poutine mercredi à Genève, dernière étape d’un périple en Europe commencé par un sommet du G7 au Royaume-Uni, suivi par le sommet de l’Otan et une réunion avec les présidents des institutions de l’UE mardi à Bruxelles.
« Nous ne cherchons pas un conflit avec la Russie, mais nous répondrons si la Russie continue ses activités », a averti Joe Biden. Le président américain a promis de dire au président russe quelles sont les « lignes rouges ».
« Je l’ai rencontré. Il est intelligent, il est dur », a-t-il souligné. Mais Vladimir Poutine doit comprendre que la mort de l’opposant emprisonné Alexeï Navalny serait « une tragédie », a-t-il averti. Et « nous ferons notre possible pour que l’Ukraine puisse résister à l’agression » russe, a-t-il ajouté.
La Chine est également devenue une source de préoccupation.
« Les ambitions déclarées de la Chine et son comportement déterminé représentent des défis systémiques pour l’ordre international fondé sur des règles et dans des domaines revêtant de l’importance pour la sécurité de l’Alliance », ont affirmé les alliés.
Mais pas question d’une nouvelle guerre froide. « La Chine n’est pas notre adversaire, notre ennemi », a affirmé le secrétaire général de l’Otan, le Norvégien Jens Stoltenberg. « Mais nous devons faire face aux défis posés par la Chine pour notre sécurité », a-t-il précisé.
« Nous constatons que la Russie et la Chine coopèrent de plus en plus ces derniers temps, tant sur le plan politique que militaire. Cela représente une nouvelle dimension et un défi sérieux pour l’Otan », a-t-il expliqué.
Joe Biden a obtenu que « le défi sécuritaire posé par la Chine figure dans la déclaration », même si certains alliés européens, notamment la France, renâclaient.
Eviter la dispersion
« L’Otan est une organisation qui concerne l’Atlantique nord, la Chine a peu à voir avec l’Atlantique nord », a insisté le président Emmanuel Macron lors de sa conférence de presse.
« Il est très important de ne pas nous disperser et de ne pas biaiser le rapport à la Chine. Il est beaucoup plus large que le sujet militaire : il est économique, il est stratégique », a-t-il ajouté.
Le sommet a également lancé la révision du concept stratégique de l’Alliance adopté en 2010 pour la préparer à faire face aux nouvelles menaces dans l’espace et le cyber-espace.
L’Otan a ainsi tourné la page Donald Trump, rassurée par la volonté affichée de Joe Biden de « revitaliser » les alliances des Etats-Unis.
Si le retrait américain d’Afghanistan, décidé sans concertation avec ses alliés, a mis à mal la crédibilité des opérations extérieures de l’Otan, les Alliés s’engagent à ne pas abandonner ce pays aux talibans.
Un financement sera accordé pour assurer le fonctionnement de l’aéroport international de Kaboul, indispensable au maintien d’une présence occidentale en Afghanistan. La Turquie a proposé de maintenir un contingent pour assurer sa sécurité, mais avec des conditions.
« Si on demande à la Turquie de ne pas quitter l’Afghanistan, un soutien américain diplomatique, logistique et financier serait très important », a observé le président turc Recep Tayyip Erdogan.
Il a discuté des modalités de cette contribution militaire durant un long entretien avec Joe Biden.
« L’Alliance doit se consulter davantage et investir mieux », a plaidé Jens Stoltenberg. Les Européens s’y disent prêts après avoir obtenu la reconnaissance de leur contribution à la sécurité collective.
Encore faut-il que les Américains les jugent « fiables ». 21 pays de l’UE sont membres de l’Otan, mais huit seulement tiennent l’engagement de consacrer 2% de leur PIB à leurs dépenses militaires. La France est du nombre, pas l’Allemagne, ni l’Italie, ni l’Espagne.